« Les acquéreurs doivent se battre pour faire financer leurs dossiers »

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Publié le 5 mars 2011
Par Francois Pouzaud
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Fait-il bon de s’installer en 2011 ? Est-il préférable d’attendre 2012 ? Les prix sont-ils devenus plus raisonnables ? Quelle attitude adopter par rapport à une remontée probable des taux à long terme ? Autant de questions auxquelles répond Philippe Becker, directeur du pôle pharmacie chez Fiducial.

« Le Moniteur des pharmacies »: Quel était l’état du marché fin 2010 ?

Philippe Becker : Le marché est difficile en Ile-de-France, et plus généralement dans les régions qui ne sont pas particulièrement recherchées pour des secondes ou troisièmes acquisitions. Ailleurs, c’est un peu plus fluide. Les banques sont assez attentistes et les acquéreurs, surtout les primo-accédants, doivent se battre pour faire accepter les dossiers. Si les taux d’intérêt remontent sensiblement, cela va être très dur en 2011.

Les prix de cession se sont-ils suffisamment adaptés aux réalités économiques ?

Toujours pas, car on dépasse dans beaucoup de cas huit fois l’EBE, en particulier dans les régions de l’Ouest et du Sud, sans qu’il y ait une corrélation avec les résultats futurs attendus. Il n’est donc pas surprenant de voir la multiplication des redressements judiciaires et des procédures de sauvegarde. Toutes ces situations ne peuvent s’expliquer par la conjoncture ou la malchance… La survalorisation des fonds est à mon avis l’une des causes essentielles.

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Comment concilier une première installation avec ce contexte difficile ?

Il faut avoir quelques bons réflexes et s’y tenir : ne pas acheter trop cher, faire un plan de financement très prudent, tabler sur une rémunération modeste les premières années et investir beaucoup de temps et d’énergie. Aujourd’hui, celui qui a un projet sait qu’il ne peut plus compter sur une forte croissance de son chiffre d’affaires. Il est conscient que les déficits sociaux amèneront d’autres mesures de réduction des dépenses de santé. Parfaitement informé, il doit donc bâtir son prévisionnel en tenant compte de cette situation. Ne pas le faire serait suicidaire.

Faut-il différer son projet d’acquisition d’un an à cause de l’élection présidentielle de 2012 ?

Certains pharmaciens rendus anxieux par l’annonce des résultats pourraient être pressés de vendre et seraient peut-être un peu plus enclins à faire des efforts sur le prix. Ce ne sera certainement pas la grande braderie. Mais si un jeune pharmacien trouve demain une officine qui lui plaît à un prix décent, il a sûrement intérêt à filer voir son banquier pour obtenir un bon taux de financement. L’autre incertitude qu’il faudra savoir gérer intelligemment est le niveau des taux d’intérêts.

Comment améliorer la rentabilité d’une officine que l’on vient de racheter en l’absence de croissance ?

Dans les prochaines années, la gestion se fera par l’optimisation des charges d’exploitation. Les gains de productivité vont donc être l’axe majeur de progrès dans les pharmacies et un passage obligé pour ceux qui rachètent. Au travers de nos différentes études annuelles, nous avons ainsi constaté que la gestion de la masse salariale était un point faible dans beaucoup de pharmacies. Alors que ce n’était pas un problème quand l’activité progressait, cela l’est devenu en phase de stagnation. C’est pourquoi la recherche de rentabilité est une véritable révolution culturelle pour les pharmaciens.