QUE LA FORCE SOIT AVEC LES CANDIDATS !

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Publié le 1 novembre 2022
Par Francois Pouzaud
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Le marché de l’emploi de la pharmacie est aujourd’hui favorable aux salariés. Mais, si le rapport de force entre employeur et employé s’est inversé, cela ne signifie pas pour autant que c’est gagné d’avance pour les candidats ! Voici quelques conseils pour muscler ses arguments lors de l’entretien d’embauche.

Si vous n’osez pas demander, vous n’obtiendrez rien ! Cette règle d’or à mettre en pratique pour négocier une augmentation de salaire vaut également pour un entretien d’embauche. Pour arriver à ses fins, il faut affûter ses arguments comme pour un grand oral. Dire que vous êtes bons et que vous faites bien votre travail au comptoir ne suffit pas, car c’est justement pour cela que l’on vous paie… et même plutôt correctement, depuis la réévaluation du point conventionnel de salaire en pharmacie d’officine (deux fois une hausse de 3% du point en valeur en 2022). Pour obtenir plus, il faut prouver que vous le valez bien ! En parlant, par exemple, de vos expériences passées et de votre implication qui a permis de développer des ventes, d’assurer des nouvelles missions, d’attirer de nouveaux clients, etc. Dans une négociation, il faut aussi savoir user de patience et de finesse. Plutôt que d’imposer une revendication, amenez votre interlocuteur à vous faire des propositions qui correspondent à vos attentes. Évoquez la générosité de vos anciens titulaires en cas d’atteinte de vos objectifs peut être une bonne stratégie. Enfin, fixez-vous une rémunération en dessous de laquelle vous ne transigerez pas.

L’art de négocier sa rémunération.

Pour être sûr d’obtenir gain de cause sur ce qui vous tient à cœur, identifiez les points que vous jugez non négociables et ceux sur lesquels vous êtes prêt à faire un compromis. Si votre interlocuteur s’engage sur un montant qui ne correspond pas complètement à vos espérances, prenez le temps de la réflexion avant d’accepter la proposition. Vous pouvez encore faire monter les enchères en appliquant « la technique de l’écho », qui consiste à répéter le chiffre et à marquer un temps de silence. « Cela oblige votre interlocuteur à reprendre la parole et à justifier sa proposition, conseille Sophie Muffang, executive coach du cabinet SMC2. S’il a une marge de manœuvre, il reviendra, à coup sûr, sur ce montant. Il faut savoir attendre la réaction à une demande et bien apprécier l’élasticité de votre interlocuteur par rapport à celle-ci. »

Dans une petite équipe, les employeurs se méfient des politiques salariales trop individualisées, car les salariés se parlent entre eux et les écarts sont alors perçus comme injustes. « Un nouvel arrivant mieux payé que le reste de l’équipe démotive les salariés déjà en place qui réalisent pourtant du bon boulot. Pour préserver un bon esprit et une bonne ambiance de travail, le titulaire est dans les faits souvent obligé d’ajuster leurs salaires », souffle Sophie Muffang aux futurs postulants pour les sensibiliser à la problématique managériale de l’entreprise. Idem pour les avantages dans les emplois du temps. Il faut toujours pouvoir justifier les écarts, en mettant en place des contreparties.

Au-delà du salaire.

Si le titulaire n’accède pas à vos prétentions salariales, mais que la proximité de son officine avec votre domicile vous intéresse particulièrement, vous devez alors envisager toutes les stratégies de repli possibles plutôt que de repartir bredouille : prime, intéressement, abondement dans un plan d’épargne d’entreprise (PEE) ou un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco), avantages nouvellement autorisés par la loi pour renforcer le pouvoir d’achat des Français face à l’inflation galopante (lire p. 16), prime de partage de la valeur (PPV), prime transports, financement de titres-restaurant, chèques carburant, chèques vacances, etc. Sophie Muffang invite les postulants à dresser leur liste de revendications pour identifier leurs sources de motivation et à se référer aux leviers de Steven Reiss. « Les gens sont motivés par ce qui a de la valeur à leurs yeux : la rémunération, le statut social, l’intérêt pour les tâches confiées, les opportunités de carrière, la reconnaissance du travail, l’envie d’apprendre, la flexibilité des horaires et la semaine de quatre jours, car ils aspirent à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, etc. » Même discours du côté de Kareen Mazeau Bobée, présidente de la Cerp Rouen Formation : « Le candidat doit prendre de la hauteur et se questionner en amont sur tous les points importants, rémunération comprise : conditions de travail, ambiance dans l’équipe, management participatif et, surtout, formation continue qui permet d’ouvrir de réelles perspectives d’évolution professionnelle avec des augmentations salariales à la clé. »

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Les limites du coup de bluff.

Si vous ne parvenez pas à obtenir gain de cause sur toutes vos revendications, la tentation de sortir un joker peut être forte. Avancer la carte de la proposition d’embauche par un concurrent proche est une des stratégies les plus efficaces, mais aussi l’une des plus dangereuses. En revanche, les arguments du type « J’ai un nouvel enfant et mon conjoint a été licencié, ou j’ai un emprunt sur les bras » sortent du cadre professionnel et votre (futur) employeur n’est pas une assistante sociale. Jouer les candidats blasés ou hésitants pour faire monter les enchères n’est pas non plus une attitude payante : un recruteur n’a pas de temps à perdre avec un individu peu enthousiaste.

OBJECTIONS DES EMPLOYEURS : QUE RÉPONDRE ?

Voici quelques-unes des objections dont les employeurs usent lors d’un entretien d’embauche. Un coach en management nous livre ses conseils pour ne pas rester sans voix.

– « Le coefficient que vous demandez ne correspond pas à votre diplôme et à vos compétences. » Sautez sur l’occasion pour négocier une formation.

– « Vous n’avez pas assez d’expérience. » À partir d’un an de présence dans l’entreprise, votre demande sera justifiée si vos résultats sont bons.

– « Le salaire auquel vous prétendez va poser un problème d’homogénéité dans l’équipe. » Expliquez à votre interlocuteur qu’un collaborateur démotivé est encore plus perturbant pour une équipe ! Et assurez-le de votre totale discrétion.

– « La situation financière de l’entreprise ne permet pas d’embaucher au niveau de rémunération que vous me demandez. » N’essayez pas de contredire cet argument. Dites que c’est d’ailleurs en toute connaissance de cause que vous avez l’intention de vous impliquer dans le développement du chiffre d’affaires de l’entreprise si vous êtes embauché.