Des équipes en or

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Publié le 4 juin 2013
Par Fabienne Colin
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Signe des temps, un étudiant en pharmacie vient de soutenir sa thèse sur le management de l’officine. Et met en lumière la chance inexploitée des titulaires. Explications.

Cherchez l’erreur : les équipes officinales sont ultra-impliquées et les titulaires délèguent peu. Tel est l’un des enseignements de la thèse qu’a soutenue Christopher Mourcia le 3 mai dernier à la faculté de Lille. Les jeunes générations feront-elles évoluer cet état de fait ? La seule existence de cette recherche universitaire intitulée « Management du personnel à l’officine : le pharmacien titulaire au cœur de la motivation de ses collaborateurs » est déjà significative. En six ans à la faculté de pharmacie de Lille, c’est la première fois que Thomas Morgenroth, professeur d’économie-gestion et directeur de cette thèse, voit un tel thème abordé.

Management aux oubliettes

L’étudiant a d’abord mené une enquête* auprès des équipes officinales. Objectif, connaître les habitudes des titulaires et le ressenti des salariés. Côté expertise en management, les résultats sont édifiants : 82 % des salariés ne bénéficient pas d’entretiens annuels, les réunions mensuelles ne sont organisées que par 8 % des titulaires et 71 % ne rédigent pas de fiche de poste… « Pour se justifier, ils disent manquer de temps. Or, manager, c’est notamment savoir gérer son temps et ses priorités », explique Thomas Morgenroth.

L’argument du temps est d’autant plus contestable que les titulaires délèguent peu. Selon le sondage, 41 % d’entre eux ressentent le « besoin d’alléger [leur] travail » et autant la nécessité de « déléguer davantage ». « Pourtant, ils n’osent pas. C’est dommage, car leur équipe ne demande que ça, remarque Christopher Mourcia. « Dans d’autres secteurs d’activités, les missions chronophages comme le contrôle de gestion ou la gestion du stock sont déléguées. Il serait valorisant pour l’adjoint de se les voir confier. Et pour le manager ce serait l’opportunité de se dégager du temps pour faire du conseil au comptoir, former, manager… », remarque Thomas Morgenroth.

Motivation au top

Reste que, selon l’enquête, le staff officinal est particulièrement enthousiaste. Près de 9 personnes sur 10 se disent motivées « par [leur] travail », 45 % « par [leurs] responsabilités » « Je ne m’attendais pas à des résultats aussi élevés sur la motivation, confie Thomas Morgenroth. Les titulaires sont assis sur une mine d’or. La motivation est intrinsèque, en raison du métier, qui est lui-même valorisant : on apporte un service à un client, un patient. » Pour autant, les managers ne doivent pas rester assis sur ces acquis… Plus de la moitié des collaborateurs souhaite « davantage de responsabilités en contrepartie d’une récompense », qui n’est pas prioritairement de l’argent. 80 % souhaitent d’abord une formation ! À bon entendeur…

Sans surprise, la majorité des titulaires qualifie leur mode de management de paternaliste. En d’autres termes, le cœur et le bon sens dirigent. À raison mais aussi à tort… Logique, quand seule une minorité (45 %) a suivi une formation sur le management. Signe des temps, Thomas Morgenroth a lancé à la rentrée dernière un DU « Gestion de l’officine » incluant des cours de management. Mais le haut-comité de formation pharmaceutique continue a estimé le D. U « adapté » aux adjoints et « non prioritaire » pour les titulaires ». Cherchez l’erreur…

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* Questionnaire rempli par 87 titulaires et 110 collaborateurs, soit un échantillon significatif, même s’il n’est pas représentatif.