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Une nouvelle plateforme européenne pour connaître l’état des stocks et anticiper les pénuries
Anticiper plutôt que subir : c’est le principe fondateur de l’European Shortages Monitoring Platform (ESMP), mise en service par l’Agence européenne des médicaments (EMA) depuis le 29 janvier 2025. Cette nouvelle base de données européenne vise à détecter, évaluer et anticiper les pénuries de médicaments, en centralisant les signalements remontés par les titulaires d’autorisations de mise sur le marché (AMM) et les autorités nationales compétentes (NCA).
Un système structuré selon le niveau de gravité
Lancée à l’issue d’un travail engagé dès 2022, l’ESMP repose sur trois modules :
– un module pour les déclarations de routine, obligatoire pour tous les médicaments enregistrés en procédure centralisée,
– un module « prévention » pour les situations de risque potentiel en cas d’urgence de santé publique,
– un module « crise » pour les ruptures majeures ou avérées.
Dans les deux derniers cas, les laboratoires doivent fournir des données stratégiques détaillées : statut de commercialisation du médicament, volume de ventes, part de marché, prévisions de stock, dates d’apparition probable des tensions, nombre de patients concernés, informations sur les capacités de production, etc.
À partir de ces données, l’EMA peut modéliser des scénarios de crise à six mois, calculer les besoins en fonction des posologies moyennes et des populations traitées, et ajuster les mesures d’urgence (réaffectation des stocks, dérogations, solidarité intra-européenne…).
Interopérabilité encore limitée avec la France
En France, la contribution des industriels est coordonnée par l’ANSM, mais les outils restent cloisonnés. À ce jour, la plateforme nationale Trustmed et l’ESMP ne sont pas interopérables.
Une double saisie qui complique la tâche des titulaires d’AMM, mais à laquelle ils se plient pour des raisons de sécurité sanitaire.
Une vision européenne à renforcer
Si la création de l’ESMP marque un tournant dans la réponse coordonnée de l’Union européenne face aux pénuries, sa pleine efficacité dépendra de son articulation avec les outils nationaux – en particulier dans un contexte de fragmentation des obligations de déclaration. Pour l’heure, les pharmaciens d’officine ne sont pas connectés directement à l’ESMP, mais l’intégration des données issues de leur environnement professionnel (notamment via DP-Ruptures) pourrait, à terme, enrichir la capacité d’alerte en temps réel.
Reste à savoir si la mise en réseau de ces bases sera techniquement et politiquement assumée. Car en matière de tensions d’approvisionnement, les retards d’information ne se mesurent pas en heures… mais en arrêts de traitement.
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