L’officine sous le regard des Français

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Publié le 3 avril 2013
Par Fabienne Colin
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Exclusif ! À l’heure des nouvelles missions et du e-commerce, Pharmacien Manager a sollicité l’institut OpinionWay pour recueillir le jugement des Français sur la pharmacie. Un sondage* lourd d’enseignements.

Près d’un Français sur deux (49 %) estime impossible de dialoguer en toute discrétion avec son pharmacien. Pire, ce manque de confidentialité est dénoncé par 58 % des Parisiens et 56 % des personnes ayant un niveau d’études supérieur au baccalauréat. Les résultats du sondage OpinionWay/Pharmacien Manager laissent comme une ombre au tableau d’une profession qui souhaite se recentrer vers les entretiens pharmaceutiques. Qui accepterait de consulter un médecin dans une pièce ouverte, à la vue de tous ? Pour beaucoup, la pharmacie est inadaptée aux sujets de conservation délicats et personnels.

Missions inconnues

Autre fait préoccupant, la population méconnaît le périmètre d’action de l’officine. Alors que les syndicats et l’Ordre ont la volonté de valoriser l’image « experte » de la pharmacie, seule une minorité (42 %) de nos concitoyens savent qu’on y réalise des dépistages du diabète ou de l’hypertension artérielle. Pourtant les groupements organisent depuis longtemps des rendez-vous santé sur ces pathologies, le sevrage tabagique, l’ostéoporose ou encore les risques cardio-vasculaires. Trop peu d’opérations sont-elles menées ? Sont-elles assez visibles ? L’équipe officinale et le point de vente lui-même communiquent-ils clairement à ce sujet ? Il semble que non.

Les Français sont encore moins nombreux (38 %) à être au courant des entretiens de suivi des maladies chroniques. « Ce score de 38 % n’est pas si mauvais compte tenu du peu d’informations grand public existant sur cet aspect de la loi HPST », relève Nadia Auzanneau, directrice du département santé d’OpinionWay. Il faut aussi dire que seuls quelques titulaires se sont lancés en pionniers, sans rémunération. « Il reste beaucoup à faire pour que les Français soient conscients de l’étendue des domaines d’action de l’officine. La valorisation de ces « services santé » dans le point de vente contribuera à rehausser l’image du pharmacien, à le réinstaller dans son rôle de professionnel de santé. C’est d’autant plus vrai dans un contexte où certaines personnes renoncent aux soins faute de moyens ou de rendez-vous possibles chez le médecin. D’où l’urgence de communiquer sur les nouvelles missions. »

Image dermo-cosmétique

Étonnamment, les services liés à la peau sont mieux connus que les dépistages et suivis de santé purs et durs (lire encadré ci-dessous). Même si d’aucuns avanceront que la dermo-cosmétique s’apparente à la « santé de la peau », avec ce type de réputation, il reste de la marge à l’officine pour être mieux reconnue dans le parcours de soins. « Il est certainement plus pertinent, pour fidéliser à terme, de valoriser le conseil de santé plutôt que l’information sur la dermo-cosmétique », conseille Nadia Auzanneau, qui estime que l’accompagnement « santé » est trop peu mis en avant. « Dans une relation de fidélisation, le pharmacien doit être amené à parler de ses « offres santé » plus facilement. Lors du premier enregistrement d’une Carte Vitale, c’est le moment d’expliquer ses différentes missions, de donner des conseils, de poser des questions pertinentes… » S’ils veulent cultiver leur image « santé », les pharmaciens… peuvent donc mieux faire en termes de communication. Reste qu’ils peuvent aujourd’hui se féliciter ! Ils ont pour leur compte une bonne réputation.

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Accueil et conseils appréciés

Ainsi, notre sondage révèle qu’en officine les Français se considèrent « accueillis avec amabilité » pour 91 %. Les files d’attente ne semblent guère ressenties comme gênantes puisque 80 % des personnes interrogées estiment être servies rapidement. Et surtout près de neuf sur dix se sentent « pris en charge par un professionnel de santé ». Toutefois, les Français ne sont pas tout à fait naïfs.

Plus de sept sur dix, estiment être « pris en charge dans un esprit commercial ». « Seuls 20 % sont « tout à fait d’accord » avec cet item, c’est un accord assez mou », précise Nadia Auzanneau. Et ce sont 86 % des clients qui se déclarent « bien conseillés » en pharmacie. Le sérieux de la profession est reconnu. Globalement positifs vis-à-vis de leur pharmacien, les Français se disent « fidèles » à leur principale officine pour 81 % d’entre eux, et 70 % « toujours aussi fidèles ». Sans surprise, les plus de 65 ans sont les plus assidus (94 %). Ce sont également eux les moins enclins à e-mailer leur ordonnance pour qu’elle soit préparée avant leur passage. « Jusqu’à 75 ans, ce frein n’est pas technologique. Ces gens n’ont pas envie de perdre l’occasion d’un face-à-face avec le pharmacien, pour des explications sur les interactions, les effets indésirables… Il faut capitaliser là-dessus, explique Nadia Auzanneau. La fidélisation semble au cœur du maintien du contact humain dans la délivrance de médicaments. »

Sondage « Les Français et leur pharmacie » réalisé en ligne par OpinionWay pour Pharmacien Manager les 27 et 28 février auprès d’un échantillon national représentatif de 1 002 individus de 18 ans et plus.Résultats complets consultables en ligne sur le site WK-pharma.fr, sur le portail de Pharmacien Manager.

Pharmacie on-line

Pas dans les mœurs

Les Français sont globalement en phase avec les pharmaciens, très conservateurs et pas mûrs pour l’Internet », annonce d’emblée Nadia Auzanneau, directrice du département santé d’OpinionWay en commentant les résultats de notre sondage à propos des sites Web de pharmacie. D’un côté, la population veut bien surfer pour des actions pratiques comme s’informer (77 % se disent prêts) ou envoyer une ordonnance dans le but de gagner du temps en officine (67 %). De l’autre, la démarche est beaucoup plus prudente quand il s’agit de s’impliquer davantage. À peine plus de la moitié de nos concitoyens estime être prêts à acheter en ligne des produits habituellement en vente en pharmacie (lire tableau ci-dessus). « Les Français, qui ont souvent une pharmacie à proximité, ne voient pas de bénéfice réel à l’achat en ligne de ces produits », analyse Nadia Auzanneau.

F.C.