Sous le soleil exactement…

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Publié le 27 avril 2018
Par Charlotte Nattier
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Dynamique et pérenne, la protection solaire pour adulte récolte les fruits de sa recette du succès : des références moins saisonnières, et surtout des textures qui lui permettent de recruter des consommateurs en provenance des autres circuits.

Après des années de belles progressions, quand les autres circuits perdaient du terrain, la dermocosmétique en officine s’essouffle elle aussi en 2017. Selon Iqvia, le CA du soin visage baisse de -1,4 %. Les hydratants corps sont à -4,4 %, la minceur à -11,2 % … Alors que de nombreux indicateurs virent au rouge, la protection solaire adulte peut se targuer de résultats exceptionnels en 2017. Les produits solaires sont devenus un véritable pilier de l’offre officinale grâce au juste prix de la caution sécuritaire. Même la météo un peu capricieuse l’été dernier (beaucoup de pluie en juillet) n’a pas eu raison des solaires. Pourtant, Vincent Bercovici, directeur marketing, communication et digital du groupe Nuxe rappelle que « la saisonnalité est concentrée sur le printemps et l’été, 57 % des ventes étant réalisées sur mai, juin et juillet. » Selon Iqvia, le CA de la protection adulte s’élève à 8 M€ en progression de 6 %, avec des volumes en hausse, eux, de 3,8 %. Un marché sain et valorisé sous l’impulsion d’un dynamisme des acteurs de la catégorie. Le quatrième marché du soin, derrière l’anti-âge, l’hydratation visage et l’hydratation corps, est aussi celui qui contribue le plus à la croissance du rayon soin de la peau en pleine saison. À noter aussi : en parapharmacies, le dynamisme est encore plus marqué. Les volumes et le CA progressent de plus de 11 %. Le circuit propose une offre plus large qui touche autant la famille qu’une clientèle plus hédoniste, et ce, toute l’année. Disposant de davantage de mètres linéaires, la parapharmacie a tiré son épingle du jeu, profitant des premiers rayons du soleil et de la belle arrière-saison ; contrairement à la pharmacie plus préoccupée par l’espace, et qui se cantonne à une offre très réduite hors saison.

OPÉRATION séduction.

La protection solaire est un marché très bataillé avec cinq acteurs majeurs qui se partagent, selon Ospharm, pas moins de 75 % des parts de marché en valeur et en cumul annuel mobile à fin novembre 2017. En tête de gondole, Avène concentre 35,04 % des ventes, avec un CA en croissance de 13,2 %. Pour Jean-Philippe Latapie, directeur marketing d’Avène France, l’explication est multifactorielle. « Nous avons bâti une forte notoriété via un travail mené de concert avec la caution médicale où le devoir de résultat est indispensable. Depuis deux ans, nous menons un combat environnemental sans équivalent dans l’offre officinale. » Loin derrière, La Roche- Posay totalise 18,83 % de parts de marché, en progression de 8 %, grâce à sa gamme Anthelios soutenue aussi en visite médicale. En troisième position, Bioderma ressort à 11,54 %, en hausse de 3,5 %. Sa gamme de protection solaire jouit d’un excellent rapport qualité-prix qui séduit les consommateurs. Viennent ensuite Vichy et Nuxe qui proposent une offre moins « blanche » et des références plus sensorielles. Des revendications qui font recette puisque, selon Ospharm, ces deux marques progressent respectivement de 8,7 % et 17,5 %. D’ailleurs, Nuxe a même décliné le parfum de sa gamme en eau de toilette. « Cette année, notre Eau Délicieuse Parfumante Nuxe Sun est proposée pour la première fois dans un format nomade 30 ml dès le mois de mai 2018. Un futur best-seller ! », pronostique Vincent Bercovici. La sensorialité fait recette. Ce constat n’a pas échappé aux laboratoires qui ont travaillé à élargir le spectre de protection et à répondre à des problématiques fondées sur le vécu des consommateurs. Ainsi, c’est en exploitant le paradoxe solaire que Filorga fait son entrée sur la catégorie en 2017. La marque spécialiste du vieillissement cutané propose une ligne de protections UVA, UVB et infrarouge sans concession, associées à des actifs anti-âge.

JUSQU’À des indices 100.

Une chose est sûre : en officines, il n’y a pas de place pour la faible protection. Selon Ospharm, les indices inférieurs à 15 baissent de 24,63 % en valeur. Ce qui réduit quasiment à néant cette segmentation. « Nous notons une vraie montée en puissance des SPF 50 et +. C’est notamment le cas de notre Spray Nuxe Sun Visage & Corps SPF50, lancé en mars 2017, qui a déjà intégré le Top 3 de nos écrans solaires en valeur à fin 2017 », confie Vincent Bercovici. Les indices supérieurs à 50 sont en croissance de 10,91 % en valeur selon Ospharm. Les laboratoires vont même plus loin en proposant des dispositifs médicaux de protection solaire qui vont jusqu’à des indices 100 pour répondre à des besoins pathologiques précis (c.f. encadré tendance).

Réputée blanche et difficile à étaler, la haute protection solaire dermocosmétique s’est beaucoup améliorée pour proposer de très hauts indices de protection avec un spectre élargi (UVA, B et infrarouge), mais aussi des galéniques plus fluides et cosmétiques. Pourtant, en 2017, ce sont les crèmes qui ont fait recette ! Selon Iqvia, leur CA bondit de 14 %, quand les volumes progressent, eux, de 10 %. Les initiatives des laboratoires ont fortement valorisé la sous-catégorie à l’image de Filorga avec ses solaires anti-âge. Proposer des soins protecteurs et embellisseurs, c’est aussi la direction prise par Lierac avec sa nouvelle gamme Sunissime – qui remplace Sunific – aux nombreuses allégations : anti-âge, ultralarge spectre… Lierac fut la première marque en pharmacie à revendiquer une protection contre l’ensemble du spectre, c’est à dire UV, infrarouge lumière visible et protection contre le photo-vieillissement. En plus des filtres UVA et B, un extrait de renouée connu pour ses vertus anti-oxydantes et un extrait de mélanine fractionnée synthétisée à partir de tyrosine végétale, absorbent la lumière visible comme un bouclier pour protéger l’ADN des cellules. « On assiste également de plus en plus à une spécialisation des galéniques par type de peau », ajoute Vincent Bercovici.

Seule ombre au tableau, les huiles essentielles. La galénique qui faisait jusqu’à présent salle comble, quels que soient la catégorie ou le circuit de distribution, perd des parts de marché. Le CA et les volumes ont baissé 15 % selon Iqvia. Après l’effervescence, cette galénique retrouve sa vitesse de croisière.

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LA PROTECTION mais pas que…

La protection dermocosmétique n’a plus rien à envier aux autres circuits, ni par ses galéniques, ni par ses ingrédients. La haute, voire très haute protection, est désormais la règle. Les méfaits du soleil établis sont de mieux en mieux pris en charge avec une couverture du spectre de plus en plus efficiente. Si une femme sur trois se protège encore mal ou ne se protège pas du tout du soleil, c’est en partie parce qu’elle ne trouve pas de texture de protection solaire qui lui plaise. Exit donc les galéniques blanchâtres qui laissent des marques. Cette année, les laboratoires ont œuvré pour proposer de vraies innovations d’usage : textures faciles à appliquer, adaptation aux peaux et yeux sensibles ou encore aux sports extrêmes. Il y en a pour tous les goûts. Vichy propose depuis mars les deux premières Eaux de protection solaire SPF 30. Leurs formules biphasées – une phase huileuse (48 % ) et une phase aqueuse (52 % ) – mettent en exergue les propriétés de son eau thermale naturellement reminéralisante. Deux versions sont proposées. Hydratante abrite de l’acide hyaluronique fragmenté pour renforcer l’action de la glycérine. Son pendant, Hâle sublimé, contient du bêta-carotène d’origine végétale qui renforce la protection et unifie le teint. Ces deux eaux sont assorties d’un parfum de fleur d’oranger et de pêche et d’effluves de tiaré, vanille et bois de santal. SVR, qui s’est lancé l’année dernière sur la catégorie, ne désinvestit pas en proposant en 2018 une texture inédite : le Gel ultra-mat SPF 50+ de sa gamme Sun Secure est un baume-en-gel transparent ultra-fondant. Le laboratoire a réussi le challenge de formuler un produit sans alcool qui permet une application express. Cerise sur le gâteau, il sent bon l’exotisme. Ce produit devrait séduire les sportifs et les adeptes des produits résistants qui ne laissent pas de trace.

Filorga poursuit en mars sa routine Bronzage sublime en lançant une huile solaire anti-âge SPF 30. Au cœur de sa formule, le Tan-stimulator complex renforce l’activation UV-dépendante de la tyrosinase pour un hâle plus rapide. En plus, de l’huile d’argan, riche en oméga 6,9 et vitamine E, nourrit et booste la régénération cellulaire. De l’acide hyaluronique nouvelle génération et spécialement formulé pour les galéniques huiles complète le cocktail. Le photo-vieillissement, c’est aussi la carte jouée par Eucerin en 2018. « Nous lançons deux nouvelles formules corps dans notre gamme solaire anti-âge Photoaging Control qui aide à prévenir et réduire les signes du vieillissement et qui, grâce à sa technologie anti-tâche après lavage, limite le jaunissement des vêtements », se félicite Isabelle Schang, directrice marketing Eucerin. De son côté, la Roche-Posay propose son innovation yeux sensibles et anti-picotements au sein de sa gamme Anthelios. La Crème Ultra est évidemment sans parfum, et propose une solution ultra-minimaliste avec le juste nombre d’ingrédients pour une haute tolérance. Au cœur de la formule, le Mexoryl, la molécule star des solaires de L’Oréal. Grâce à cette nouvelle architecture, la texture forme à la surface de l’épiderme un maillage effet seconde peau qui ne migre pas dans les yeux, évitant ainsi les picotements et les irritations. Le charme devrait donc continuer d’opérer…

80 millions d’euros de CHIFFRE D’AFFAIRES

ÉVOLUTION en valeur

+ 6 % Le secteur de la protection solaire adulte est boosté par le dynamisme des laboratoires. Ces derniers jouent la carte de l’innovation en lançant de nouvelles textures, des eaux de protection solaire, des huiles solaires anti-âge…

Source : Iqvia, en cumul annuel mobile à fin décembre 2017.

5,1 millions d’unités VENDUES

ÉVOLUTION en volume

+ 3,8 % Malgré une météo capricieuse l’été dernier, les solaires ont continué de se développer en officines. Avec une saisonnalité toujours importante puisque plus de la moitié des ventes ont été réalisées sur le printemps et l’été.

Source : Iqvia, en cumul annuel mobile à fin décembre 2017.

PAS DE COMPROMIS SUR L’APPLICATION. En 2018, les labos ont investi dans des galéniques inédites pour un plaisir d’application loin des clichés des protections blanchâtres. Eaux de protection solaire Vichy, Gel ultra-mat SPF 50 + SVR, Lait liposomal SPF30 Daylong… Anthelios SPF50+ (La Roche-Posay) se veut ultra-léger avec une brume invisible.

La TENDANCE

Les médecins ont besoin de produits encore plus exigeants, même s’ils sont moins grand public, rappelle Jean-Philippe Latapie, directeur marketing France d’Avène. Depuis l’arrivée de nouveaux acteurs, le potentiel des dispositifs médicaux de protection solaire est grandissant. » En 2015, l’espagnol ISDIN tire le premier en affichant un SPF 100+ sur deux de ses lancements. Le premier, Eryfotona AK SPF 100+, intègre une formulation recommandée pour la prévention et le traitement adjuvant des kératoses actiniques et autres formes de cancer cutanée, hors mélanome. Le second, FotoUltra SolarAllergy SPF 100+, prévient et soulage les symptômes associés à l’allergie solaire et aux photodermatoses. Galderma surfe sur cette tendance avec Actinia, une lotion très haute protection pour les patients sous immunosuppresseur. Avène lui emboîte le pas avec Sensimed, un produit qui prévient la kératose actinique grâce à un actif offrant un maillage parfait des filtres.

LE SOLEIL PLAISIR AUSSI. Le bronzage plaisir est aussi au programme des innovations des laboratoires. Filorga poursuit sa routine Bronzage sublime en lançant une Huile solaire anti-âge SPF 30. Chez Eucerin, on ne tâche pas ses vêtements avec la Lotion Sun protection photoaging control SPF30 ou 50+.

CHIFFRES CLÉS EN PARTENARIAT AVEC OSPHARM* ET IQVIA

*Ospharm Datastat comprend un panel de 5500 pharmacies. Ospharm traite et restitue l’ensemble des flux de ventes de ses adhérents en temps réel.

ToP 3* des produits

1 Spray SPF50+ Avène 5,8 %

2 Spray SPF50+ Enfant Avène 4,3 %

3 Spray SPF50+ Anthelios La Roche-Posay 2,4 %

78 % des produits solaires vendus en GMS sont des laits et des lotions. En cumul annuel mobile à fin février 2018. Source : IRI

* Le top 3 des produits est calculé en valeur, en cumul annuel mobile à fin novembre 2017, selon Ospharm.

Concurrence

Pas de quoi rougir…

Si l’expertise pharmaceutique et la caution sécuritaire ne font pas toujours le poids face au rapport qualité-prix proposé par la grande distribution, ce n’est pas le cas lorsqu’on parle de protection solaire.

S’il y a un segment sur lequel l’officine est bien armée face à la grande distribution, c’est celui de la protection solaire. Les pharmaciens et les laboratoires ont travaillé une offre et un prix défiant cette concurrence. Résultat : le différentiel de prix y est moins important que sur d’autres catégories. D’ailleurs, les industriels de la GMS ne s’y trompent pas puisqu’ils n’hésitent pas à s’inspirer fortement de la croix verte. C’est le cas de nivea, avec son offre protect & sensitive, formulée pour la photoprotection des peaux sensibles ou encore de Mixa qui a fait de cette condition de peau son cheval de bataille. « La protection solaire est le marché le plus “météo dépendant” sur lequel nous travaillons, et sur lequel le poids de l’innovation dans les ventes est le plus important », précise Fiona Merveille, chef de groupe chez nivea. En effet, selon iri, le marché de la photoprotection est estimé à 94 M€ en CaM à fin février 2018, en petite croissance de 0,5 %.

« La croissance des solaires est portée essentiellement par la bonne santé de la pharmacie qui représente la moitié du marché, confie Laure-Anne Schmeer, directrice marketing Mixa. Ce circuit est expert, il inspire confiance aux consommateurs soucieux d’apporter la meilleure des protections contre les méfaits du soleil, d’où l’importance de notre mission aujourd’hui ; celle de rendre accessible l’expertise dermatologique à toutes les peaux sensibles. Cela inclut également la meilleure protection solaire possible. » Elle ajoute : « On note aujourd’hui deux tendances très disparates. D’une part, le développement de la très haute protection porté par l’innocuité. Les consommateurs sont de plus en plus conscients des méfaits du soleil à long terme et ont tendance à se protéger plus systématiquement avec de hauts indices. Cette année, nous lançons donc quatre nouveaux produits dans une gamme dédiée aux peaux sensibles et réactives. D’autre part, on observe aussi un fort attrait pour les produits qui optimisent le bronzage et le hâle. » Le soleil plaisir, c’est aussi la direction prise par Garnier cette année avec deux eaux protectrices en spray indices 20 et 30. invisibles et hydratantes, elles sont enrichies d’aloe vera, l’actif qui a la cote quand on parle de soleil et de réparation. En 2018, Mixa rénove sa gamme solaire avec un packaging plus épuré qui soutient son expertise, et qui est inspiré de la pharmacie. Un circuit qui a vu naître la marque en 1924…

DES SOLUTIONS PLUS MÉDICALES. Initiée par ISDIN et sa protection SPF100, les laboratoires s’engouffrent dans la brèche de la protection liée à des pathologies. C’est le cas d’Avène avec sa nouveauté Sensimed et de Galderma avec Actinia.

Communication

Sensibiliser pour prévenir

La communication des laboratoires va réellement dans le sens de la sensibilisation du grand public aux méfaits du soleil. À l’image de La roche-posay qui s’engage dans la lutte contre les cancers de la peau en initiant des campagnes de dépistage précoce. Depuis 2016, le laboratoire se renforce en communiquant autour de son innovation : My UV patch, le premier patch connecté qui capte l’intensité des UV sur la peau pour avertir via une application smartphone si la protection n’est pas optimale. Avène poursuit son combat pour le respect des fonds marins en organisant un Beach tour en juillet et août sur les plages françaises (Marseille, arcachon, Biarritz…). « Nos produits viennent à la rencontre du consommateur là où il en a besoin : chez lui, dans la pharmacie ou sur son lieu de vacances », souligne Jean-philippe Latapie, directeur marketing France d’avène. Une campagne d’affichage JC Decaux soutiendra cette initiative. « Le point de vente est également très important, la visibilité est travaillée notamment via des trousses, des coffrets promotionnels et des présentoirs, afin d’émerger du rayon », ajoute isabelle schang, directrice marketing d’Eucerin.