CRISE DU COVID-19 : LES GROUPEMENTS EN ORDRE DE MARCHE

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Publié le 1 mai 2020
Par Fabienne Colin
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A l’annonce du confinement, les groupements de pharmacie se sont adaptés pour accompagner au mieux leurs adhérents dans cette crise sanitaire. Quelles que soient leur taille et leur structure, tous ont mis à disposition une panoplie d’outils Covid-19, – soit pratiques, soit sociaux, soit financiers -, dans lesquels chaque titulaire a pu piocher. Et majoritairement, les adhérents se montrent reconnaissants de la mobilisation de leur réseau.

Depuis le mardi 17 mars à 12 h, date du début du confinement en France, les officines ont dû faire preuve de “débrouillardise” pour revoir leur organisation, leur parcours client, ainsi que la gestion du personnel et du back-office. Pour les y aider, les groupements ont mis au point quantité de mesures. En commençant par des solutions “pratico-pratiques” pour gérer l’urgence. Clément Créteur, installé depuis janvier 2019, à Marcq-en-Baroeul (59), se souviendra longtemps de l’offre de son groupement Aprium, qui lui a permis de doter son point de vente d’hygiaphones « dès le 18 mars » précise-t-il, impressionné par tant de réactivité. « Ils ont été très bons sur ce point. Ce fut très utile et très bien perçu par nous tous », souligne-t-il. Aprium avait négocié avec des fournisseurs, à qui les officines pouvaient commander. Pour gagner le temps de la livraison d’une semaine, le titulaire de la Pharmacie Créteur est allé lui-même chercher le matériel. Même type de réaction chez iPharm : « le groupement nous a équipé dès le début de vitres en plexi pour le comptoir, et nous avons été livrés en 2 jours, un délai exceptionnel ! Cela nous protège et nous rassure », estiment, dans un communiqué du réseau, Yann Benichou, Philippe et Emmanuelle Cordier, co-titulaires de la Pharmacie de la Terrasse, à Paris.

UN SOUTIEN en ressources humaines.

Alors que certains membres des équipes officinales tombaient malades ou devaient rester chez eux pour s’occuper de leurs bambins, les aides concernant la gestion du personnel ont également été les bienvenues. « Mon groupement, Elsie Santé, nous a accompagnés sur la législation, rappelant notamment le devoir de l’employeur de protéger son personnel. Ils nous ont bien expliqué comment s’y prendre », estime Caroline Depouhon, titulaire de la Pharmacie de la Baulche, à Saint-Georges-sur-Baulche (89). De son côté, Clément Créteur a, par exemple, apprécié le fait que les mesures d’aide de l’Etat et les formulaires soient rassemblés sur le site “Entre Nous”, réservé aux adhérents Aprium. « J’ai utilisé celui pour la garde d’enfant, je n’ai eu qu’à l’imprimer et à le remplir ». Adhérent Pharmabest, François-Xavier Hémery, titulaire de la Pharmacie de l’Iroise, à Brest (29), se réjouit, lui, d’avoir bénéficié « d’une aide juridique pour étudier les différentes possibilités existantes, afin de traiter les questions fiscales et sociales de la crise. Nous avons reçu des informations réalisées avec l’appui du cabinet d’avocat du groupement. Alors qu’une foultitude d’informations nous arrivent de différents canaux, la leur a le mérite de comporter une base juridique sur laquelle on peut vraiment s’appuyer. »

DE PRÉCIEUX CONSEILS en gestion.

A l’heure où le flux de clientèle fut brutalement coupé par le confinement, les titulaires ont reçu, avec une attention toute particulière, les conseils de leur réseau en matière de gestion. « Giropharm nous a tout de suite donné des outils pour préserver notre trésorerie, reporter certaines échéances comme les achats aux laboratoires. La cotisation, par exemple, ne sera pas prélevée pendant quelque temps et le remboursement du montant dû sera étalé sur des mois », témoigne Jean-Luc Hitimana, titulaire de la Pharmacie de la Canche, à Marconnelle (62). Depuis janvier dernier chez Elsie Santé, Caroline Depouhon s’est également sentie épaulée pour le pilotage de son entreprise. « Emmanuel Lataste (président d’Elsie Santé, ndlr) s’occupe de nous fournir toute l’information réglementaire par e-mail. Une autre personne nous suit sur l’aspect économique, pour reporter les échéances de paiement, et notamment celles des laboratoires que nous traitons en direct », confie celle qui enregistrait une baisse du C.A et de sa fréquentation de l’ordre de 12 % au bout d’un mois de confinement.

UN COUP DE POUCE en communication.

Les affiches et autres messages prêt-à-l’emploi ont aussi été prisés et relayés. Au tout début, Clément Créteur a imprimé celle clamant « Nous n’avons pas de masques », pour ensuite la retirer « car quand on a reçu des masques pour les professionnels de santé, ils pensaient qu’il n’y en avait pas non plus pour eux », raconte le titulaire Aprium, qui s’adapte au fil du temps. Dans son officine rurale, Jean-Luc Hitimana a aussi profité des communications prêtes à l’emploi de son groupement, centrées sur l’éthique. « Giropharm nous a tout de suite fourni des messages pour orienter les gens, sur le comportement à adopter, les gestes barrières… Je les ai imprimés et placés à l’entrée de l’officine. Cela a permis de contrôler les flux, de calmer la clientèle, d’éviter toute panique ». A Brest, François-Xavier Hémery a transféré dès le 21 mars, les messages Facebook de Pharmabest sur le “Scan Ordonnance”. « Avant le confinement, ce service était anecdotique. Après avoir communiqué sur cette offre, le volume est monté assez rapidement. » De même, “la minute sport” diffusée par le réseau et relayée sur son compte Facebook, a trouvé tout son sens. « C’est un moyen de garder le contact sans se restreindre uniquement à de l’information anxiogène », analyse le Breton. De son côté, adhérente Giphar, Anne Hamel, titulaire de la Pharmacie Saint Nicolas, installée dans une des rues les plus commerçantes de Nantes (44), à quelques pas d’un Monoprix, fait le même constat. « J’ai utilisé les affiches pour, notamment, mettre en avant l’application. » De nouveaux réflexes s’installent.

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CRÉER UNE ÉMULATION interne.

Dans leurs pharmacies au trafic en berne, les titulaires ont plus que jamais été à l’écoute de leurs confrères pour se stimuler les uns les autres. « Giropharm a créé un canal hebdomadaire où l’on peut suivre la fréquentation moyenne des officines, ce qu’elles mettent en place. Le groupement recueille les informations des adhérents et nous les font remonter, pour un partage de bonnes pratiques, qui vient des pharmaciens et sert les pharmaciens », s’enthousiasme Jean-Luc Hitimana, également reconnaissant de la création d’une hotline par téléphone ou adresse e-mail dédiée pour poser des questions au siège. Chez iPharm, Patrick Ryziger, titulaire de la Pharmacie Volontaires à Paris, goûte aussi à cette forme d’aide. « J’aime beaucoup la solidarité entre les titulaires qu’iPharm a mise en place, grâce à un fil WhatsApp. Nous échangeons toute la journée sur diverses questions, car les réponses restent assez floues. En ces temps difficiles, ces échanges m’apportent également de la bonne humeur. » Et il en faut pour tenir sur la durée !

+ 151 %

de visites sur le portail de Pharmactiv (où sont présentes 650 officines) ont été enregistrés durant le 1er mois du confinement.

UNE COMMUNICATION REPENSÉE

Après des premières mesures comme une communication en vitrine sur le click & collect et des outils pour équiper les points de vente dans le respect des règles de distanciation, iPharm a également mis en place, début avril, une communication sur le thème de l’immunité. Plus original, le groupement de méga officines, Pharmabest, a diffusé dès le 24 mars 2020, un programme d’activité physique de 30 minutes, accessible chaque jour à 10 heures sur Facebook et en replay sur YouTube. Au programme : du gainage, des squats, des fentes… Objectifs : booster l’immunité des patients et entretenir une relation avec eux.

UNE STRATÉGIE DIGITALE PAYANTE

Chez Giropharm, « la priorité est d’assurer la continuité des traitements », insiste son président, Franck Vanneste, titulaire dans le Nord. Dans le but de faciliter l’accès aux soins, la coopérative a davantage communiqué sur le scan&collect et le portage à domicile. Elle a également édité une fiche de formation sur le thème « Pendant le confinement, le conseil pharmaceutique continue…même à distance ! ». Par ailleurs, une hotline “pandémie”, destinée à ses adhérents, a été mise en place. Elle contient, notamment, la diffusion d’un flash info “en live”, pour décrypter les mesures de l’Etat, se procurer des affiches, des équipements du point de vente (plexi)… Le réseau pharmacie Lafayette a, lui, mis en place un accompagnement autour de quatre axes majeurs : des informations sur le Covid-19, les négociations des délais de paiement auprès des fournisseurs, les mesures pour préserver sa trésorerie et le déploiement des solutions web. Sur ce dernier point, l’enseigne discount a cherché des prestataires dans toute la France, pour être en mesure de proposer une solution de livraison à domicile à ses quelques 200 officines adhérentes. L’offre est désormais disponible, depuis la mi-avril. Alors qu’Aprium pharmacie s’est servi de sa carte de fidélité pour également promouvoir son service de livraison de médicaments : Aprium Express. Résultat : « Le nombre de scans d’ordonnance a été multiplié par quatre et les livraisons d’ordonnances ont augmenté de 1 000 % », confie Laurent Keiser, directeur général du réseau. La carte de fidélité MyVeryBestCard du groupement de méga officines, Pharmabest, a aussi été mise à contribution pour maintenir le lien, en renseignant les clients sur les horaires d’ouverture, la santé publique et les offres de scan ordonnances et de click&collect. Quant à Hello Pharmacie, une enseigne positionnée sur l’accompagnement du patient, elle a également mis l’accent sur son service de livraison, en multipliant les messages sur les écrans digitaux placés dans les points de vente. « Je conçois la livraison comme un service facilitateur, pour aider les patients à ne pas se déplacer, tout en répondant à leur besoin », précise Marc Mougenot, président d’Hello Pharmacie.