Comment choisir son grossiste
Les remises commerciales proposées par les grossistes se réduisant, elles influent de moins en moins dans l’adoption d’un répartiteur. C’est le service qui s’impose désormais comme élément différenciant. Des titulaires témoignent.
La marge de manœuvre sur la remise négociée avec un répartiteur devient ténue. D’après une enquête Celtipharm pour la chambre syndiacle de répartition pharmaceutique, seulement 10 % des pharmaciens choisissent une grossiste pour les remises commerciales qu’il leur accorde. La taille de l’officine et une capacité d’achat importante demeurent des paramètres déterminants pour extirper à son fournisseur plus de remises. « Avec 60 000 ou 80 000 € d’achats mensuels, vous pouvez difficilement peser sur les négociations, par contre dès que le seuil de 350 000 € est dépassé, c’est différent », remarque Thierry Camuzeaux, directeur général de DPO. Néanmoins, il relève des écarts de 0,8 à 1 point de remise entre officines pour un même CA. Comme quoi, le talent de négociation et la relation construite avec son répartiteur jouent aussi beaucoup. Sandrine Dazin, titulaire à Saint-Amand-les-Eaux, a été sollicitée par son grossiste secondaire qui lui a fait miroiter de meilleures remises si elle le prend comme répartiteur principal et achète ses génériques chez lui. On peut toujours faire jouer la concurrence entre deux grossistes… Mais, en général, la fidélité est récompensée.
La transparence sinon rien !
Sur les délais de paiement, là aussi, la fenêtre de tir est étroite depuis l’instauration des dispositions de la LME (les délais de paiement ne peuvent excéder 60 jours à compter de la date de facture ou 45 jours à compter de la fin du mois de livraison). Sandrine Dazin paie son grossiste à 45 jours fin de décade, qui est une formule un peu plus souple. Ponctuellement, le répartiteur peut accepter avec un bon client de moduler les prélèvements automatiques pour l’aider à surmonter une période difficile. Véritable critère de sélection : la transparence sur les remises commerciales. L’opacité étant en ce domaine source de litiges. « L’offre doit être claire en termes de remises et de catalogue de prix sur les produits « non réglementés » », insiste Jean-Luc Delmas, consultant et expert en distribution. « Entre les factures intermédiaires et les remises qui diffèrent selon le type de produits, il est difficile de vérifier que les avantages annoncés sont respectés », constate Noël Amouroux, pharmacien installé à Toulouse. « En cas de doute, on peut charger un organisme spécialisé dans l’externalisation de la gestion du tiers payant de contrôler les remises », signale le titulaire. Mais cet audit payant n’est rentable que pour de très grosses affaires.
Prime à la proximité
Dans tous les cas, le choix du grossiste doit reposer sur des critères de qualité : fiabilité des approvisionnements, largeur de la collection, ponctualité des livraisons, rapidité d’information sur les manquants et dates de retour, etc. Aujourd’hui, la fiabilité et la ponctualité des livraisons restent des critères forts de sélection, à l’épreuve du temps. Selon l’enquête Celtipharm, 96 % des pharmaciens veulent pouvoir garantir à leurs clients une mise à disposition optimale des produits. La fréquence des livraisons ne compte plus vraiment depuis que les pharmaciens se sont adaptés à deux livraisons quotidiennes de leur grossiste principal. De même, la collection de médicaments ne pèse plus dans la balance, ne serait-ce qu’en raison des obligations de service public qui pèsent sur tous les répartiteurs. La différence ? Elle se joue sur l’approvisionnement d’autres produits (parapharmacie, accessoires…) ou de médicaments rares à faible rotation. La proximité de l’officine avec le répartiteur influe bien sûr sur la décision du pharmacien. Dans les raisons qui amènent les officinaux à commander chez un grossiste plutôt qu’auprès d’un autre circuit (direct, plateforme de groupement, short-liner…), ce critère, selon Celptipharm, arrive en tête avec 33 % des suffrages. « La proximité de l’agence est utile pour les urgences qui nécessitent de s’approvisionner directement au chaland », explique Noël Amouroux.
Des petits plus qui changent tout
Ne nous leurrons pas, la vraie valeur ajoutée d’un répartiteur se joue actuellement sur le service. Selon Jean-Luc Delmas, le pharmacien doit juger la réactivité du grossiste à apporter une réponse précise et rapide par rapport à un besoin spécifique et non prévisible. Un besoin qui peut concerner la livraison d’un produit particulier ou l’accompagnement du titulaire dans les décisions de gestion. Ainsi la qualité de l’accueil téléphonique et la réactivité du responsable de clientèle priment. Ce sont, ni plus ni moins, les premiers critères mis en avant par Noël Amouroux, Sandrine Dazin et Matthieu Hueber. « Je marche à l’affect dans les relations avec mon répartiteur », livre ce pharmacien de Chambéry, qui éprouve le besoin d’avoir une relation suivie et des rencontres régulières avec son attaché de clientèle. L’assistance téléphonique par un interlocuteur compétent est essentielle aux yeux des titulaires. Une des standardistes a joué un mauvais tour à Sandrine Dazin à propos d’un complément alimentaire pour la grossesse qu’elle avait commandé à la demande d’une cliente. « Le produit rentré correspondait à l’ancienne formule mais la standardiste ne m’avait pas prévenu de l’existence d’une nouvelle formulation et a refusé de me reprendre le produit au motif qu’il ne se faisait plus », raconte-t-elle. Et de reconnaître que les reprises sont de plus en plus dures à obtenir… Ou sont accordées moyennant l’application d’une décote après sept jours de détention…
Au final, le choix d’un répartiteur dépend de plus en plus des « petits plus » qu’il peut apporter : livraison de l’officine en début de tournée, offre des formations, archivage électronique des factures, relevé de prix et veille concurrentielle, études géomarketing, aide au merchandising… Sans oublier l’assistance juridique. Qu’on se le dise, les grossistes se diversifient pour aider l’officine à progresser. Si certains services restent liés au niveau des commandes, d’autres sont accessibles à tous. Menez l’enquête !
Nouvelle donneLe courtage
Le courtage de médicaments devient une réalité. La naissance de ce nouveau métier dans la chaîne pharmaceutique est passée quasiment inaperçue… Il n’empêche, l’ordonnance n° 2012-1427 du 19 décembre 2012 instaure un cadre règlementaire à cette activité, tous les courtiers devant se faire référencer auprès de l’ANSM à compter du 1er avril dernier. Qui dit courtage dit négociation pour le compte de pharmaciens auprès des laboratoires voire des grossistes. Ce qui est nouveau ? Le courtage est ouvert aux non pharmaciens. Ces derniers peuvent se livrer au référencement et à la négociation, mais pas aux achats. Pour l’heure, les SRA sont concernées, mais on pourrait voir arriver des consultants, véritables intermédiaires entre officinaux et laboratoires ou répartiteurs. Les remises seront-elles revues à la hausse ? A suivre…
M.L.
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