L’AME ne prend plus en charge le SMR faible

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Publié le 14 février 2015
Par Loan Tranthimy
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Depuis le 6 février, les médicaments au service médical rendu (SMR) classé faible, remboursés généralement à 15 % par l’assurance maladie, ne sont plus pris en charge pour les patients majeurs bénéficiaires de l’aide médicale de l’Etat (AME).

Paru le 5 février au Journal officiel, le décret signé le 3 février qui supprime la prise en charge pour les étrangers en situation irrégulière des médicaments à SMR faible n’est pas une réelle surprise. L’Etat est contraint de limiter ses dépenses relatives à l’aide médicale qui ont fortement augmenté depuis 2013. Selon Marisol Touraine, auditionnée en juin 2014, au lieu des 558 millions d’euros prévus pour le dispositif, 744 millions d’euros ont été finalement dépensés au titre de l’AME. Une hausse liée principalement à « la forte poussée du nombre de bénéficiaires », explique la ministre de la Santé.

La publication de ce texte a fait vivement réagir les pharmaciens sur le site du Moniteur et sur les réseaux sociaux. « Je sers en moyenne quatre à cinq personnes qui bénéficient de l’AME et qui n’ont pas l’habitude de payer les médicaments. Je vais devoir expliquer et, s’ils ne peuvent pas payer, ils n’auront pas le médicament. L’application de cette mesure a été rapide. Mon éditeur n’était pas au courant et il attend encore le feu vert de l’assurance maladie pour changer le paramétrage de mon logiciel afin de distinguer les bénéficiaires majeurs et mineurs non concernés par cette mesure », témoigne le 06 février un titulaire installé à Paris. Pour ce pharmacien, « les médicaments à SMR faible sont cependant des médicaments de confort. Il n’y a pas de risque pour la santé si la personne ne l’achète pas. Mais cela peut causer un réel inconfort par exemple pour les produits contre la colopathie comme Carbosymag ».

Médecins du monde craint une stigmatisation

Pour Jean-Luc Fournival, président de l’UNPF, le rôle social du pharmacien va entrer en jeu. Il va devoir faire un effort pour expliquer ce que signifie le service médical rendu. « L’effet d’annonce est mauvais et choquant, d’autant plus que l’application en officine est difficile. On aurait pu faire des économies autrement. »

De son côté, l’association Médecins du monde dénonce la stigmatisation de cette population précaire. « Sur les 50 000 personnes qui consultent dans nos centres, 98 % vivent sous le seuil de pauvreté et 80 % qui auraient potentiellement droit à cette aide ne le demandent pas », déclare Jean-François Corty, directeur des opérations France de Médecins du monde. Pour cette organisation, la mesure pose aussi la question de la légitimation du remboursement des médicaments à SMR faible : « Pourquoi la Sécurité sociale le rembourse si ce n’est pas efficace ? On commence par supprimer cette prise en charge pour les sans papiers. Et après pour tout le monde ? En tout cas, c’est consternant. »

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Information du patient : le pictogramme modifié

Comme annoncé dans Le Moniteur du 17 janvier (n° 3063), l’affichage du service médical rendu (SMR) figurera bien sur les boîtes à compter du 1er juillet 2015. Soumise à concertation, la dernière version du projet de décret comporte notamment une modification de couleur des pictogrammes réclamée par les syndicats de pharmaciens. Ainsi, le fond orange correspondra à un SMR insuffisant (noir auparavant), le bleu à un SMR faible (rouge auparavant), le rouge à un SMR modéré (bleu auparavant) et le vert à un SMR important. Par ailleurs, si un médicament a plusieurs SMR, seul le plus élevé serait indiqué.