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Un bio-entrepreneur éleveur de chimères
Pierre-Emmanuel Marque et ses coéquipiers font partie des lauréats de la promotion 2002 des « Tremplins de la création d’entreprise en santé humaine » organisés par la fondation Aventis-Institut de France. Le prix gagné leur permettra de créer ZimGen, une société anonyme spécialisée dans la recherche et le développement de nouvelles molécules destinées au traitement des thromboses.
A vingt-deux ans, Pierre-Emmanuel Marque, alors en troisième année à la faculté de pharmacie de Toulouse, s’intéresse déjà à la thrombose, ce phénomène de formation d’un caillot dans un vaisseau sanguin qui prive les organes de sang et d’oxygène et qui peut entraîner la mort. « J’ai rencontré à cette époque le professeur Bernard Boneu, une référence en matière d’hémostase, chef du service d’hématologie au centre hospitalier universitaire de Rangueil à Toulouse. Son enseignement et son charisme ont définitivement fixé ma passion pour la coagulation et la pathologie thrombotique », se souvient Pierre-Emmanuel Marque. Selon lui, les pathologies thrombotiques telles que les accidents ischémiques cérébraux et les chocs septiques constituent un problème thérapeutique non résolu. Il décide donc de faire son internat à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, en biologie médicale à l’université de Paris-V, puis prépare une thèse en bio-ingénierie des protéines, qu’il soutiendra cet été.
Parallèlement, Pierre-Emmanuel Marque travaille sur les mécanismes de la coagulation avec le professeur Martine Aiach, pharmacienne, chef du service d’hématologie à l’Hôpital européen Georges-Pompidou à Paris et directeur de recherche à l’INSERM.
Une double compétence en pharmacie et en sciences de la vie
Guidé par l’envie de travailler dans le secteur industriel, il a l’idée, pendant l’année 2000, de mettre en place une plate-forme technologique* dédiée à la recherche et au développement de nouveaux antithrombotiques. L’idée : administrer aux patients touchés par un accident vasculaire aiguë une protéine anticoagulante produite de manière recombinante, qui est une chimère de la protéine C. Pierre-Emmanuel Marque étudie le comportement de cette protéine depuis plus de trois ans. Celle-ci est naturellement présente dans notre sang, mais elle n’agit que dans les microvaisseaux. En injectant la protéine C chimérique dans les gros vaisseaux bouchés, elle pourra dissoudre localement le caillot. Cette protéine est connue depuis les années 80, mais personne n’avait encore eu l’idée de l’utiliser comme traitement contre les thromboses.
C’est sa double compétence en pharmacie et en sciences de la vie qui a permis à Pierre-Emmanuel Marque de mettre en oeuvre son projet. « Mes études en pharmacie m’ont donné l’occasion de connaître le marché dans le secteur de la santé et des médicaments, alors que l’internat en biologie médicale et mes trois années de thèse m’ont apporté des notions indispensables à la compréhension des mécanismes cellulaires et moléculaires de la coagulation et de la thrombose » précise-t-il. Ainsi ses connaissances mercatiques, scientifiques, techniques et médicales constituent une formation adéquate pour générer une nouvelle molécule thérapeutique.
Afin de mettre en place sa plate-forme, le jeune pharmacien de trente-quatre ans a dû trouver et regrouper de nouvelles compétences, ainsi que chercher des financements et traiter avec les investisseurs. Autant de fonctions qui lui ont demandé de mettre à profit ses qualités de pugnacité, de négociateur, d’exigence et de polyvalence. Ainsi, la première étape, et non la moindre, fut de constituer une équipe solide, motivée et compétente. Celle-ci est formée d’experts tels que Bernard Le Bonniec, directeur de recherche à l’INSERM, expert en bio-ingénierie des protéines, Bruno Villoutreix, également directeur de recherche à l’INSERM, spécialiste en bio-informatique structurale, et Xavier Morelli chercheur en cristallographie et RMN biologiques à Marseille. Mais la plus grosse difficulté pour Pierre-Emmanuel Marque fut de trouver des financements et de négocier des partenariats industriels.
Une prime de 31 000 Euro(s) pour son projet
En septembre 2001, il pose sa candidature pour le concours Aventis-Institut de France qui depuis quatre ans récompense les dix meilleurs candidats de moins de 35 ans porteurs de projets innovants dans le secteur des sciences de la vie. Après plusieurs étapes de sélections, basées en partie sur la validité financière et technologique des projets, les équipes lauréates sont rendues publics le 31 janvier 2002, et Pierre-Emmanuel Marque constate avec joie que son équipe en fait partie. Il reçoit donc une prime de 31 000 euros (soit près de 200 000 francs) qui va lui permettre de rassurer d’éventuels nouveaux investisseurs sur la viabilité de son projet. Il obtient également le soutien d’un parrain membre de l’office technique d’études et de coopération internationale (OTECI) qui, pendant un an, apporte son expérience pour formaliser le plan de développement de la future entreprise et mobilise son réseau relationnel à son service.
En outre, Pierre-Emmanuel Marque bénéficie d’une formation sur mesure à l’université Paris-Dauphine qui lui permettra de répondre à ses besoins spécifiques et de rencontrer les neuf autres chercheurs-entrepreneurs vainqueur comme lui du prix Aventis. Ensemble, ils ne manqueront pas de croiser leurs expériences et d’en récolter aides, idées et conseils.
Le projet de Pierre-Emmanuel Marque, fortement soutenu dès le départ par le département « valorisation et transfert technologique » de l’INSERM, dirigé par Françoise Moisand, se concrétisera par la création d’une société anonyme en juin 2002 : ZimGen. Un nom choisi en référence aux précurseurs inactifs des protéines responsables de la coagulation, appelés zymogènes. Objectif de la société : devenir le leader mondial dans le développement de nouvelles stratégies antithrombotiques plus sûres et plus efficaces. Les activités de ZimGen devraient évoluer vers la mise en place d’un traitement préventif pour les patients à risque thrombotique, en développant des composés qui empêchent la formation des caillots dans les vaisseaux, sans altérer le rôle réparateur de la coagulation. En travailleur acharné, Pierre-Emmanuel Marque a déjà commencé à élaborer virtuellement ces produits par conception moléculaire assistée par ordinateurs. Les premiers candidats thérapeutiques devraient être sélectionnés d’ici deux ans.
* Plateforme technologique : lieu où est exercé la recherche-développement de nouveaux médicaments et ensemble des investissements faits dans les outils techniques et les équipements.
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