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« Face à l’obésité, le plus dur est de changer les habitudes alimentaires »
Pascal Ferré, professeur des universités (Pierre-et-Marie-Curie), praticien hospitalier, directeur de l’unité U671 INSERM « Pathologies métaboliques et nutritionnelles : diabète et obésité ».
« Le Moniteur » : On parle beaucoup de génétique de l’obésité…
Pascal Ferré : On ne peut nier que des différences interindividuelles existent. Quand on emploie le terme de génétique, cela veut simplement dire qu’il y a des gènes de prédisposition à l’obésité – et presque tout le monde les a. Regardez aux Etats-Unis, il y a 40 % d’obèses, donc cela veut dire que la grande majorité des gens possède ces gènes de prédisposition et ils ne sont révélés que dans un contexte socioculturel alimentaire adéquat. C’est vrai que des aspects génétiques existent mais ces derniers affectent tout le monde – en dehors de cas spécifiques dits monogéniques où un gène a été atteint -, ou alors il faut imaginer que 40 % des Américains sont des déficients génétiques ! Face à l’obésité, la vraie différence se fait sur les apports. On voit bien que c’est parce qu’on a augmenté les apports ces dernières années qu’on grossit. Il n’y a pas eu de bouleversements génétiques. Sur le fond, c’est assez simple, la nourriture est devenue abondante et calorique. Comme l’homme est fait pour manger, alors il mange.
Est-ce que le choix des acides gras de l’alimentation est important dans l’obésité ?
Ce n’est pas ce qui compte le plus. Le pays où il y a le plus de recommandations alimentaires, les Etats-Unis, est celui où il y a le plus d’obèses et le plus de maladies cardiovasculaires ! Revenons à des choses simples. Toutes ces recommandations alimentaires me font sourire, quand je ne les trouve pas choquantes. Les industriels se sont engouffrés dans le marché des alicaments pour des raisons purement économiques car c’est un argument de vente extraordinaire. Arrêtons avec les « il vaut mieux manger 1 g de ceci plutôt que 3 g de cela ». Nous sommes des omnivores, mangeons équilibré.
La teneur de l’alimentation en glucides, lipides et protides influe-t-elle sur l’hyperplasie adipocytaire ?
Il y a les résultats de laboratoire et la réalité du terrain. Nous sommes des omnivores dont les repas comprennent à peu près tous les nutriments. Même dans un hamburger ! C’est la densité calorique de l’alimentation qui compte, le fait qu’on absorbe plus de calories qu’on en dépense.
Il n’y aurait donc pas de fatalité de l’obésité ?
Si vous restreignez un obèse, il maigrit. Le plus dur est de changer les habitudes alimentaires. Il est difficile de se restreindre et de se défaire de l’imprégnation des traditions culturelles et sociales de notre enfance. Je pense qu’il est très dur de lutter contre l’obésité installée et qu’il est préférable d’essayer de la prévenir. On peut soigner les complications de l’obésité comme l’athérosclérose, mais je ne crois pas qu’on puisse soigner l’obésité et l’augmentation de la prise alimentaire à coup de médicaments. Dans notre société, les gens aux faibles moyens se nourrissent de sodas et de hamburgers, peu onéreux. Je suis sidéré du prix des fruits et des légumes. En parallèle, les dépenses énergétiques ont globalement baissé durant le XXe siècle. On est passé d’une civilisation paysanne à une civilisation citadine et industrielle. On fait de moins en moins d’exercice physique. L’organisation de la vie est telle que l’on ne marche plus. Les solutions sont globales, elles passent aussi par l’architecture de nos villes.
Les messages en matière de nutrition sont-ils faciles à faire passer ?
Une politique d’éducation va bien au-delà de l’officine et des professionnels de santé, c’est un problème de société. Nous sommes dans des intérêts contradictoires. Quand vous mangez plus, l’industrie agroalimentaire gagne plus d’argent. Dire « mangez des oméga-3 », « mangez telle chose, cela ira beaucoup mieux », ce n’est pas vrai. Quand on appartient aux classes supérieures, on se préoccupe plus de l’image de son corps. La pratique d’une activité sportive est chère et prend du temps. Plus il y a de messages et moins ça marche, ce n’est pas ce qui fera changer les gens. Je crois plus à des réflexions globales sur la façon dont notre société vit. Cela va du manque d’argent pour acheter des aliments qu’on trouvait autrefois dans les jardins au fait qu’on ne bouge plus assez.
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