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Analyse d’ordo : prévention des nausées et vomissements chimio-induits
L’ondansétron et l’aprépitant sont des médicaments d’exception. Ils doivent être prescrits sur une ordonnance spécifique à quatre volets pour être remboursés.
Prescriptions
Centre hospitalier de la Croix Verte
Dr N., oncologue
Nadia V.,
née le 24 mai 1973
1 m 65, 59 kgLe 2 avril 2025
Ordonnance d’exception
Aprépitant 125 mg/80 mg : 125 mg à J1 et 80 mg à J2 et J3 tous les 15 jours.
QSP 7 cyclesOrdonnance d’exception
Ondansétron 8 mg : 1 cp 2 heures avant la chimiothérapie à J1 tous les 15 jours.
QSP 7 cyclesOrdonnance d’affection de longue durée
Prednisone 20 mg : 4 cp à J1.
Métoclopramide 10 mg : 1 cp, 1 à 3 fois par jour, si besoin.
QSP 3 mois.
Ce que je dois savoir
Contexte
On distingue quatre types de nausées et vomissements induits par les traitements anticancéreux (NVITAC) :
- Anticipés : liés à l’anxiété et survenant avant même l’administration de la chimiothérapie ;
- Aigus : se produisant dans les 24 heures après l’administration de la chimiothérapie, c’est-à-dire le premier jour (J1) ;
- Retardés : survenant dans les jours suivant l’administration de la chimiothérapie, avec un pic de fréquence entre le deuxième et le troisième jour (J2 et J3) ;
- Réfractaires : survenant en dépit de la prophylaxie antiémétique.
Le risque de survenue des NVITAC dépend du potentiel émétisant des anticancéreux, mais aussi de facteurs liés au patient (âge < 55 ans, sexe féminin, antécédents de nausées liées à une grossesse ou de NVITAC lors d’une chimiothérapie précédente, anxiété, temps de sommeil inférieur à 7 heures la veille de la chimiothérapie).
Les NVITAC altèrent la qualité de vie et l’état général du patient. Ils peuvent provoquer une dénutrition ainsi que des troubles hydroélectrolytiques potentiellement responsables d’une insuffisance rénale aiguë. Ils sont par ailleurs susceptibles de compromettre le succès de la chimiothérapie, car ils peuvent imposer une diminution des posologies voire un arrêt transitoire de la chimiothérapie.
Quelle prévention ?
Dès le premier cycle de chimiothérapie, la mise en place d’une prophylaxie antiémétique est primordiale pour que la première cure soit bien tolérée et éviter ainsi une appréhension des cures suivantes qui majorerait le risque de NVITAC ultérieurs.
Les protocoles antiémétiques sont déterminés en prenant en compte le niveau de risque de la chimiothérapie et les facteurs individuels*.
Ils peuvent faire appel à différents médicaments, antagonistes des différents neuromédiateurs impliqués (principalement la sérotonine et la substance P et, à moindre degré, la dopamine).
En complément du protocole antiémétique, un traitement de secours peut être prescrit. Celui-ci sera pris à la demande, en cas de survenue de NVITAC réfractaires.
Objectifs
L’objectif visé est d’éviter la survenue de tout vomissement et que les nausées n’entraînent qu’une simple diminution de l’appétit sans modification des apports alimentaires. En cas d’échec, le protocole antiémétique sera intensifié pour la cure suivante.
Médicaments
Aprépitant. Il se fixe sur les récepteurs NK1 de la substance P et exerce une action antagoniste à cette dernière. Les antagonistes NK1 sont efficaces sur les NVITAC aigus et retardés. Ils sont recommandés en cas de chimiothérapies hautement ou modérément émétisantes.
Ondansétron. Il se fixe sur les récepteurs 5HT3 de la sérotonine et exerce une action antagoniste à celle-ci. Les antagonistes 5HT3 sont avant tout efficaces sur les NVITAC aigus. Ils sont recommandés avec les chimiothérapies hautement, modérément ou faiblement émétisantes.
Prednisone. C’est un corticoïde recommandé pour la prévention des NVITAC aigus et retardés des chimiothérapies hautement, modérément ou faiblement émétisantes.
Métoclopramide. C’est un antagoniste dopaminergique utilisé en prophylaxie en cas de chimiothérapie faiblement émétisante ou, comme c’est le cas ici, en traitement de secours pour corriger des NVITAC réfractaires.
Ce que je dis au patient
J’ouvre le dialogue
« Est-ce votre première cure de chimio ? » permet d’ouvrir le dialogue pour savoir si Nadia V. a déjà souffert de NVITAC antérieurement et si elle appréhende sa cure de chimiothérapie.
« Quand commencez-vous la chimio ? » permet de mieux lui expliquer le protocole : J1 correspondant au jour où Mme V. recevra son injection d’anticancéreux à l’hôpital.
J’explique le traitement
Mécanismes d’action
L’aprépitant, l’ondansétron et le métoclopramide bloquent l’action des substances biochimiques libérées sous l’effet de la chimiothérapie par les cellules du tube digestif et impliquées dans le processus de vomissement.
La prednisone est un dérivé de la cortisone. Il convient d’expliquer à Mme V. que ce médicament n’est pas prescrit ici pour son action anti-inflammatoire, mais pour potentialiser l’effet des antiémétiques.
Effets indésirables
L’aprépitant peut habituellement induire de la constipation, de la fatigue et des céphalées.
L’ondansétron peut fréquemment provoquer des manifestations de vasodilatation du type céphalées, bouffées de chaleur, hypotension orthostatique.
Le corticoïde, qui n’est prescrit que sur une seule journée, sera vraisemblablement peu impliqué dans la survenue d’effets indésirables, si ce n’est une éventuelle excitation, dont les effets sur le sommeil seront atténués par une prise le matin.
Le métoclopramide peut induire de la somnolence et des effets neurologiques comme des mouvements anormaux de la face (grimaces, torticolis…), voire un syndrome extrapyramidal (hypertonie, tremblements, mouvements involontaires) et, plus exceptionnellement, un syndrome malin des neuroleptiques (hyperthermie maligne potentiellement létale).
Utilisation des médicaments
Il faut avant tout s’assurer de la bonne compréhension du plan de prise par la patiente. Nadia V. doit savoir faire la différence entre les médicaments préventifs (ondansétron, aprépitant, prednisone) et le métoclopramide, qui est ici un traitement de secours.
Les médicaments préventifs doivent être pris systématiquement le matin avant l’injection de chimiothérapie (à J1) et, en ce qui concerne l’aprépitant, continué à J2 et J3, même s’il n’y a pas eu de vomissements. L’ondansétron sera pris 2 heures avant la séance de chimiothérapie et la prednisone de préférence pendant le petit déjeuner, afin de limiter les troubles digestifs.
Il est important de bien expliquer à Mme V. qu’il y a dans la boîte de l’aprépitant deux dosages différents : la gélule rose, dosée à 125 mg, est celle à prendre le jour de la chimiothérapie, 1 heure avant la séance. Les gélules blanches, dosées à 80 mg, seront prises le lendemain et le surlendemain, avec ou sans nourriture.
Le métoclopramide ne sera pris que si des vomissements surviennent en dépit de la prise des autres médicaments. Il convient de rappeler à Mme V. de bien respecter un intervalle d’au moins 6 heures entre deux administrations (même en cas de vomissements après la prise) pour éviter des troubles neurologiques graves.
J’accompagne
Le traitement
Surveillance de l’efficacité. Si Mme V. est amenée à prendre le métoclopramide, il faut qu’elle le signale au médecin, en vue d’une éventuelle réévaluation du traitement prophylactique pour les cycles suivants.
Gestion des effets indésirables. Les céphalées peuvent être soulagées par du paracétamol. Conseiller à Mme V. de se lever prudemment en deux temps, afin de limiter les manifestations d’hypotension orthostatique. Alerter sur les dangers liés à la conduite automobile en cas de somnolence avec le métoclopramide et déconseiller la consommation d’alcool. Enrichir l’alimentation en fibres pour limiter la constipation (en prenant soin de bien laver et peler les fruits et légumes afin de diminuer le risque infectieux dans ce contexte oncologique).
Mesures hygiénodiététiques
Fractionner les repas (en 6 à 8 collations par jour) et manger sans attendre d’avoir le ventre vide (ce qui peut majorer les nausées).
Essayer de rester le buste bien droit au moins 30 minutes après un repas pour favoriser la vidange gastrique.
Éviter les plats gras ou épicés et les fritures, lourds à digérer. Proscrire les aliments fortement odorants (chou, oignon, ail…). Privilégier les repas froids, qui limitent les odeurs et sont souvent mieux tolérés.
Maintenir une hydratation suffisante, non seulement pour prévenir une déshydratation en cas de vomissements, mais aussi pour prévenir la constipation induite par les médicaments. Boire par petits volumes régulièrement répartis dans la journée, de préférence en dehors des repas, et éviter l’ingestion de gros volumes car ils ont un effet émétisant. Utiliser éventuellement une paille dans un verre ou un récipient fermé, pour favoriser la prise de petites gorgées et limiter les odeurs.
Vente associée
Si nécessaire, un laxatif osmotique (plus efficace que les laxatifs de lest dans un contexte oncologique) peut être proposé à Mme V. afin de lutter contre la constipation.
* Selon les recommandations du référentiel 2017 de l’Association francophone des soins oncologiques de support (Afsos), ainsi que celles du consensus de la Société européenne d’oncologie médicale (Esmo) et de l’Association multinationale des soins de support du cancer (Mascc), décembre 2023.
La patiente demande :
« Pourquoi certains des médicaments que le médecin m’a prescrits sont sur une ordonnance spéciale bleue ? »
Ces ordonnances s’utilisent pour des médicaments, produits ou prestations dont seules certaines indications ouvrent droit au remboursement. Leur prescription fait l’objet d’un contrôle régulier par les autorités de santé. Le 4e volet de l’ordonnance est gardé à l’officine pendant trois ans. Le premier volet, qui vous est rendu, est à présenter comme une ordonnance classique.
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