Fin de vie : les pharmaciens délivreront la substance létale

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Fin de vie : les pharmaciens délivreront la substance létale

Publié le 23 mai 2025 | modifié le 26 mai 2025
Par Christelle Pangrazzi
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Les députés ont adopté l’article 8 de la proposition de loi sur la fin de vie, entérinant le rôle des pharmaciens hospitaliers et d’officine dans la préparation et la délivrance de la substance létale. Un dispositif inédit, qui repose sur un circuit fermé entre la PUI et l’officine, sans clause de conscience.

Le vote est passé relativement inaperçu, malgré son impact majeur pour la profession officinale. Vendredi 23 mai 2025, en séance publique, l’Assemblée nationale a validé le circuit de préparation et de délivrance de la substance létale utilisée dans le cadre de l’aide à mourir. Ce processus, précisé à l’article 8 de la proposition de loi, mobilise à la fois les pharmacies à usage intérieur (PUI) et les pharmacies d’officine.

Un circuit encadré entre PUI et officine

Le texte prévoit que, sur prescription du médecin ayant accédé à la demande d’aide à mourir, la PUI réalise une préparation magistrale létale, qu’elle transmet ensuite à la pharmacie d’officine désignée pour la délivrance. Ce transfert s’effectue en lien avec le professionnel de santé – médecin ou infirmier – chargé d’accompagner la personne.

Seules les PUI inscrites sur une liste officielle arrêtée par le ministère de la Santé pourront effectuer cette préparation. La délivrance est alors assurée par l’officine ou, lorsque le patient est hébergé dans un établissement disposant de sa propre PUI, par cette dernière.

Le calendrier d’administration de la substance létale détermine les délais d’exécution : le texte impose que les préparations soient réalisées et délivrées « dans un délai permettant l’administration à la date fixée ».

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Autre précision logistique : la récupération intégrale du produit létal non utilisé, y compris les emballages, devra être assurée par le professionnel de santé qui accompagnera le patient. Ces éléments devront ensuite être rapportés à l’officine, puis réacheminés vers l’hôpital, a détaillé Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles.

Pas de clause de conscience pour les pharmaciens

Le dispositif entérine une participation directe des pharmaciens sans qu’aucune clause de conscience ne leur soit reconnue. Plusieurs députés, parmi lesquels Thibault Bazin (LR) ou Dominique Potier (PS), ont tenté de faire supprimer l’article 8, au motif que cette absence de clause posait une difficulté éthique. En vain.

Le rapporteur général, Olivier Falorni (Modem), a défendu le texte, rappelant que ni les syndicats d’officinaux ni le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens n’avaient formellement réclamé cette disposition lors des auditions parlementaires. À l’inverse, le Synprefh, qui représente les pharmaciens hospitaliers, a réitéré sa demande en ce sens, sans obtenir gain de cause.

Pour justifier ce refus, le Conseil d’État a considéré, dans son avis de juin 2024, que la participation pharmaceutique à la préparation et à la délivrance de la substance létale intervenait « après la décision médicale » et ne pouvait être considérée comme une atteinte à la liberté de conscience. Le Conseil constitutionnel avait formulé une position similaire lors des débats sur les contraceptifs et les IVG, a rappelé la ministre.

Un nouveau débat est attendu à l’article 14 de la proposition de loi, consacré spécifiquement à la clause de conscience. Mais sauf revirement, les pharmaciens resteront tenus de remplir leur mission, quelle que soit leur opinion personnelle sur l’aide à mourir.

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