Deux Havrais donnent l’exemple

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Publié le 19 janvier 2008
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Au Havre, le regroupement en plein centre-ville de la pharmacie de Jean-Paul Robin avec celle de Martine Clerc, voisine de 100 mètres, dans un troisième local, a beaucoup fait parlé de lui. Il s’agit d’une première en Seine-Maritime.

On a parlé de notre regroupement jusqu’en Bretagne ! », se souvient Jean-Paul Robin. Contesté par les uns (syndicats locaux et confrères de proximité), appuyés par d’autres (Ordre, préfecture), ce regroupement a souri à ces deux pharmaciens audacieux. A la naissance du projet, en 2003, le cadre juridique n’était pas aussi sécurisé que maintenant. Et notamment depuis le gel des licences de cinq ans adopté dans le PLFSS 2008. En plus, à l’époque, les regroupements ne pouvaient pas concerner plus de deux officines alors que le projet initial prévoyait de fusionner trois pharmacies du centre-ville. « Nous étions cinq officines sur moins d’un kilomètre de distance, raconte Martine Clerc. Le projet initial était d’en regrouper deux, de fermer mon officine puis de rejoindre la nouvelle structure. »

Mais quand l’autorisation préfectorale tombe en 2004, le troisième titulaire se rétracte. Ce contretemps diffère d’un an la réalisation du projet. Car l’envie de Martine et de Jean-Paul de se regrouper est plus forte que tout. Ils sont venus à bout de la complexité de l’opération qui aurait pu annihiler leurs intentions. C’est dans les moments difficiles que les conseils de professionnels avisés sont déterminants : « Le groupement Alrhéas nous a apporté son éclairage sur la vision de l’association, le cabinet Leduc son expertise comptable sur la faisabilité financière de l’opération et l’agence Espace sa connaissance du marché pour la mise en relation des pharmaciens candidats, sans oublier Fidal Rouen pour la rédaction des actes », remercie Jean-Paul Robin.

« Nous avions très à coeur de réaliser ce projet qui apparaissait idyllique au départ compte tenu des enjeux, mais la suite s’est vite compliquée car il a fallu se battre. Cela a eu le mérite de lisser les problèmes de l’association », réalise Martine. Preuve que lorsqu’il y a communauté d’esprit et d’objectif, les personnes finissent toujours par s’entendre. « L’association, c’est comme un mariage, il ne faut pas trop se fréquenter avant, car trop se connaître n’est pas toujours un avantage », estime Jean-Paul.

La pharmacie de Jean-Paul était exploitée en SELARL et réalisait avant fusion 1,3 MÛ tandis que Martine exerçait en nom propre dans une pharmacie de 700 kÛ. Chacun a apporté à la SELARL son fonds valorisé à 85 % du CA TTC et est entré à 50 % dans le capital de la société. Ce qui a conduit Martine à verser à son associé une soulte égale à la différence d’apport.

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Perdre un peu pour mieux rebondir

Un regroupement se prépare avec minutie, entre le suivi des travaux sur le nouveau local, le choix des partenaires (banque, répartiteurs, système informatique…), la reprise du personnel, les démarches administratives ou judiciaires (pour la résiliation du bail de Jean-Paul), etc. « Nous avions des réunions qui s’enchaînaient tous les 15 à 30 jours », précise-t-il.

Le regroupement a fait perdre d’emblée 5 % de clientèle à la nouvelle pharmacie. Fort de ses 400 m2, le nouvel emplacement offre un espace plus adapté au développement de spécialisations et de services. « L’officine a récupéré les jeunes mamans du quartier », apprécie Martine. Aujourd’hui, Jean-Paul estime le gain de clientèle à 30 % pour une rentabilité au-dessus de la norme. Avec un CA consolidé de 2,4 MÛ, l’officine est largement au-dessus du seuil d’« unité économiquement viable ».

Ce pari gagné a fait ensuite des émules. Depuis, il y a eu plusieurs autres regroupements sur Le Havre mais par rachat de fermetures.

Les conseils de Jean-Paul

– S’entourer de spécialistes et bien suivre leurs conseils.

-Avoir une volonté de tous les instants.

-Ne pas chercher systématiquement à s’associer avec un confrère que l’on connaît bien ou avec un ami de faculté.

-Avoir la même vision de l’avenir, les mêmes objectifs.

-Se regrouper à 50/50 entre associés.