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« Super-préparateurs » : quelle place pour les adjoints ?
Le brevet professionnel de préparateur en pharmacie est mort, vive le diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques de préparateur/technicien en pharmacie ! Et ce n’est pas fini : une licence pour rendre les préparateurs plus autonomes est en construction. Quelle serait la place du pharmacien adjoint dans une organisation où le préparateur aurait davantage de missions ?
Engagée depuis plus de 20 ans, la réforme du diplôme de préparateur en pharmacie est désormais une réalité. « Les premières promotions d’étudiants titulaires du diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques (Deust) de préparateur/technicien en pharmacie vont sortir dès 2023 », se félicite Daniel Burlet, conseiller de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) chargé des affaires sociales. Lancé dans le cadre d’une expérimentation très vite abandonnée, le Deust de préparateur en pharmacie (bac + 2) a conduit les centres de formation d’apprentis (CFA) et les universités à repenser ensemble la formation sans bouleverser les règles de son alternance. L’arrêté du 17 octobre 2022 finalise cette réforme en supprimant le BP. Mais ce n’est pas fini. Professionnels, universitaires, enseignants en CFA et ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur doivent s’entendre sur la poursuite des études vers une licence (bac + 3). Si le changement est en marche, des questions pratiques sur l’organisation du cursus subsistent. Mais surtout, comment ce préparateur « nouvelle génération » va-t-il trouver sa place dans l’équipe aux côtés des préparateurs déjà diplômés ? Et comment vont se répartir les rôles avec les pharmaciens adjoints ?
Deust ne veut pas dire nouvelles missions
L’ensemble des représentants syndicaux s’accordent à dire que depuis des années, le BP de préparateur n’était plus réellement en adéquation avec le métier. Le quotidien de la majorité des préparateurs n’est plus de réaliser des préparations mais d’exercer un métier centré sur le conseil, la prévention, l’intervention pluriprofessionnelle. Le préparateur passe désormais plus de temps au comptoir que dans le préparatoire.
« Le Deust ne fait qu’acter cette évolution de compétence du préparateur », analyse Philippe Denry, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). « Ce diplôme bac + 2 permet aux étudiants d’acquérir les compétences d’un professionnel de santé avec un diplôme universitaire post-bac », ajoute Daniel Burlet.
« Le préparateur Deust ne sera pas un super-préparateur », démystifie cependant le représentant de la FSPF. Car en pratique, le préparateur titulaire du Deust aura les mêmes missions que celui issu du BP, sous la responsabilité et le contrôle effectif du pharmacien (voir encadré).
De plus, « il n’y aura pas deux catégories de préparateurs : les BP et les Deust. C’est un peu comme quand, pour les pharmaciens, le diplôme a été délivré en six ans et non plus en cinq ans », conclut Daniel Burlet. Preuve en est qu’à ce jour les syndicats confient réfléchir à une revalorisation de la grille pour l’ensemble des préparateurs et non pas seulement pour ceux titulaires du Deust.
Préparateur licencié versus adjoint
La licence, elle, est toujours dans les cartons. En l’absence de consensus au sein de la profession sur ce sujet, la Conférence des doyens des facultés de pharmacie de France – représentante de l’université – avait jeté l’éponge. Mais les partenaires sociaux ont vu dans la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite proposition de loi Rist, une volonté du gouvernement de relancer ces travaux. Avec pour objectif de permettre au préparateur titulaire d’une licence de participer de façon autonome aux nouvelles missions telles que le dépistage, la vaccination et les entretiens d’accompagnement.
« Les nouvelles missions sont confiées au pharmacien. Or nous travaillons en équipe », note Philippe Denry, qui prévient : « L’objectif n’est pas de remplacer le pharmacien adjoint, mais plutôt d’aider les pharmacies sans obligation de salarier un pharmacien adjoint à se lancer dans les nouvelles missions en donnant des attributions supplémentaires aux préparateurs. » Et ainsi embarquer toutes les pharmacies dans les nouvelles missions, comme le demande l’Assurance maladie. « Concernant les entretiens d’accompagnement, on pourrait imaginer que le premier d’entre eux soit réalisé par un pharmacien puis qu’un préparateur prenne le relais dans les cas simples, comme le suivi de patients atteints de pathologies chroniques. Le pharmacien reprendrait la main dans les cas nécessitant plus d’expertise, comme lors d’un changement de traitement, par exemple », esquisse Philippe Denry.
« Mais attention, signale Joël Grébil, représentant de l’Union nationale des syndicats autonomes (Unsa), c’est le métier de préparateur qui doit être repensé dans son ensemble. »
Sous le contrôle du pharmacien
La ligne rouge est la présence du pharmacien à l’officine. Ni l’Ordre des pharmaciens ni les syndicats ne veulent la dépasser. « Dans le cadre de la proposition de loi Rist, un amendement déposé par un député du Val-d’Oise allait dans ce sens. Il visait à faire en sorte qu’en cas d’absence de courte durée – inférieure à trois heures – dans une journée sans excéder trois occasions par semaine un préparateur puisse être préposé au remplacement du pharmacien dans l’accueil de la clientèle et la délivrance des ordonnances, rapporte Bruno Maleine, président de la section A de l’Ordre des pharmaciens. Cette idée est contraire à tout ce que nous défendons. »
Toutefois, côté FSPF, Philippe Denry admet réfléchir à une remise à plat de la notion de contrôle effectif pour les préparateurs licenciés. Il suggère de « la remplacer par un contrôle a posteriori de l’ensemble des délivrances en fin de journée, voire uniquement des délivrances complexes par exemple. Le pharmacien adjoint sera alors en support uniquement sur les prescriptions nécessitant son expertise ». « Il s’agit d’un vieux serpent de mer. Cette notion est floue et souvent mal comprise par les pharmaciens et les préparateurs », apprécie Daniel Burlet. S’il admet que des aménagements pourraient être possibles, un point est aussi non négociable pour l’USPO : « Il est indispensable de maintenir le pharmacien en responsabilité. Cette responsabilité fait partie du métier de pharmacien. » Et d’ajouter : « Le préparateur licencié ne sera pas un pharmacien de seconde classe. Un préparateur et un pharmacien adjoint n’ont pas les mêmes missions. Un préparateur ne pourra jamais remplacer un pharmacien et il exercera sous son contrôle. »
Même sentiment du côté des étudiants en pharmacie. « En tant qu’étudiant, le préparateur est pour nous un relais de savoir. Il est essentiel à notre formation. Nous avons besoin des uns et des autres », déclare Servanne Lalinec, chargée des perspectives professionnelles de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf).
En revanche, Joël Grébil concède à demi-mot : « Eventuellement, un préparateur titulaire d’une licence avec plus d’autonomie pourrait représenter un risque vis-à-vis de l’emploi des adjoints dans certaines typologies de pharmacies, qui marqueraient leur préférence, notamment en raison du coût salarial. En revanche, il faut ne pas prêter de mauvaises intentions aux employeurs, les fiches de poste du préparateur et du pharmacien sont bien distinctes. Chacun a ses missions », conclut fermement le représentant syndical.
Les premiers préparateurs titulaires du Deust seront diplômés en juin 2023. Leurs missions sont identiques à celles des préparateurs titulaires du BP.
Une licence pour les préparateurs est en construction. Elle devrait leur permettre d’assister le pharmacien dans ses nouvelles missions (dépistage, vaccination, entretiens d’accompagnement, etc.), contribuant ainsi à répondre à la demande de l’Assurance maladie de les développer.
Ordre et syndicats s’accordent pour rappeler que le préparateur titulaire d’une licence, plus autonome, restera sous la responsabilité d’un pharmacien.
La loi Rist pour ancrer les compétences, et même plus
Ce changement de diplôme de préparateur implique une modification du Code de la santé publique, car en l’état actuel des textes, seuls les titulaires du BP peuvent assister le pharmacien et délivrer des médicaments sous son contrôle effectif. La proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite proposition de loi Rist (députée Renaissance du Loiret), adoptée au Sénat le 14 février et actuellement en commission mixte paritaire, prévoit cette modification pour les futurs titulaires du Deust préparateur/technicien.
« Il ne faut pas stresser la profession, les titulaires de Deust auront le droit de délivrer des médicaments sous le contrôle effectif du pharmacien, ce n’est qu’une question de temps », rassure Philippe Denry, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Cependant, les sénateurs ont amendé le texte pour permettre aux préparateurs, qu’ils soient titulaires du BP ou du Deust, de vacciner contre la grippe saisonnière, le Covid-19 et la variole du singe. « Pendant la pandémie, les préparateurs ont largement vacciné, il est donc normal de leur reconnaître cette compétence pour laquelle ils ont été formés », se félicite Daniel Burlet.
Publié dans Porphyre n° 595 (février 2023)
« La licence pour les préparateurs est compromise »
À retenir
Les premiers préparateurs titulaires du Deust seront diplômés en juin 2023. Leurs missions sont identiques à celles des préparateurs titulaires du BP.
Une licence pour les préparateurs est en construction. Elle devrait leur permettre d’assister le pharmacien dans ses nouvelles missions (dépistage, vaccination, entretiens d’accompagnement, etc.), contribuant ainsi à répondre à la demande de l’Assurance maladie de les développer.
Ordre et syndicats s’accordent pour rappeler que le préparateur titulaire d’une licence, plus autonome, restera sous la responsabilité d’un pharmacien.
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