Les experts

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Publié le 12 septembre 2009
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Pour Serge Brandinelli, délégation, spécialisation et convivialité forment les trois piliers d’un mode de management gagnant-gagnant. Pour y parvenir, il utilise tous les moyens à sa disposition, dont la formation et l’intéressement. L’équipe de la Pharmacie Bléone Sud a ainsi acquis une réputation d’expertise auprès de la population dignoise.

Avec une vingtaine de salariés, dont dix préparateurs et trois adjoints, déléguer s’est naturellement imposé à Serge Brandinelli. Règle numéro un pour le titulaire : attribuer à chacun un secteur en fonction de ses motivations. « Chaque année, les entretiens individuels me permettent de mieux cerner les souhaits », explique-t-il. Ainsi, Jean-Louis Chabaud, préparateur ayant le statut de cadre, gère à lui seul l’orthopédie et le MAD. Telle préparatrice s’occupe de l’aromathérapie, une autre de l’homéopathie… Les secteurs développés par l’officine sont variés : nutrithérapie, bio, diététique sportive…

Mais la spécialisation et la responsabilisation ne concernent pas seulement le comptoir. Une collaboratrice est par exemple chargée du planning et de la réalisation des vitrines, une autre de la comptabilité, une autre encore, préparatrice, du merchandising… « Le pharmacien doit montrer son savoir-faire dans tous les domaines de la santé. On s’adresse de fait à des personnes malades mais on doit également aider les gens à rester bien portants. » Ce n’est donc pas un hasard si la majorité du chiffre d’affaires de la pharmacie est réalisée par des ventes hors ordonnances.

Formation et intéressement pour tout le monde

Serge Brandinelli ne plaisante pas avec la qualité du conseil. « Je veux une pharmacie de spécialistes », résume-t-il. Chacun suit donc, dans son domaine de compétences, les formations mises en place par Pharmavie (auquel la pharmacie adhère). L’équipe, titulaire compris, a également appris à faire preuve d’humilité. « Pour chaque demande, chacun doit connaître ses limites et faire appel au spécialiste concerné si besoin. »

C’est Sylvie Alessandri, ex-vendeuse de la pharmacie, qui a en charge, depuis sept ans, la mission stratégique des achats. L’art de la négociation ne s’inventant pas, elle possède un BTS de force de vente, a suivi les conseils de Pharmavie et, surtout, ceux du titulaire. « Je n’impose pas de budget : Sylvie gère en fonction des besoins et des offres commerciales proposées », confie Serge Brandinelli. Et si elle se trompe ? « Il ne réprimande jamais mais explique la cause de mes erreurs. De toute façon, je travaille en étroite collaboration avec les responsables de chaque secteur », explique Sylvie.

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Cette volonté de travailler ensemble se traduit aussi par un système d’intéressement commun qui peut représenter un treizième mois. « On se fixe régulièrement des objectifs sur un rayon particulier, une opération commerciale ou les produits OTC par exemple. S’ils sont atteints, une prime globale est partagée, les montants étant définis en fonction des postes de chacun. Il est logique que les personnes à la vente soient bien récompensées, mais la responsable du merchandising doit aussi bénéficier du fruit de ses collègues au comptoir. » Résultat de cette démarche participative : l’ambiance est plus que conviviale, ce qui n’échappe à aucun observateur externe. Car si chacun a un rôle bien défini, personne ne joue sa partition en solo. « On est tous dans le même bateau ! Et tout le monde doit ramer dans le même sens », insiste Serge Brandinelli.

Le titulaire soigne aussi le confort de travail. Ainsi, il épargne à son personnel au comptoir les tâches pouvant parasiter la prise en charge de la clientèle. Trois personnes sont chargées uniquement du déballage et du rangement des commandes. Tous les jours, elles arrivent deux heures avant l’ouverture. A 8 h 30, le personnel au comptoir est 100 % disponible pour les clients. « Je considère qu’un préparateur ne doit pas passer du temps à mettre ses produits en rayon au détriment de la pertinence du conseil. J’ai certainement plus de personnel qu’il n’en faut, mais mieux vaut proposer un maximum de services pointus que d’embaucher des personnes polyvalentes qui ne peuvent pas forcément être efficaces dans tous les domaines. »

Une association du personnel a été créée

De l’utopie ? Pas vraiment. Chez ce titulaire, tout est fait pour favoriser les échanges et éviter la compétition. Le personnel se retrouve à la pause déjeuner, un tableau de liaison est présent au premier étage. « Le soir, nous restons ensemble une demi-heure après la fermeture pour pouvoir faire le point et discuter. » Et on se dit tout en toute transparence. Le titulaire communique ses chiffres au jour le jour. Chacun peut connaître les résultats et l’évolution selon les tranches de TVA sur un mois, une année, etc. « Les informations sont globales : personne n’a accès à ses propres chiffres ni à ceux des autres. Je ne veux surtout pas créer de compétition », précise toutefois le titulaire.

Des liens amicaux se tissent d’autant plus qu’une association du personnel s’occupe d’organiser des événements festifs. Composée de bénévoles, elle fonctionne comme une amicale. Places de cinéma à prix réduit, ventes de billets de tombola pour l’arbre de Noël des enfants du personnel, sorties à Marinland… Sponsorisée par certains laboratoires, l’association est aussi alimentée en toute transparence par le titulaire. « Ce qui nous a permis de partir tous ensemble un week-end au spa Caudalie. »

Des collaborateurs très motivés et fidèles

Si Serge Brandinelli délègue autant, ce n’est pas pour aller jouer au golf ! Non, le titulaire s’implique dans la vie locale et les réseaux ville-hôpital. « Notre monopole se réduisant, nous devons ajouter des compétences élargies dans notre activité multiservice. » Il est ainsi membre du conseil d’administration du centre hospitalier de Digne-les-Bains et président du syndicat interhospitalier départemental. Il adhère également au comité départemental d’éducation en santé et il est le fondateur d’un réseau local ville-hôpital pour le sida et la toxicomanie. Le titulaire n’a-t-il pas le sentiment de perdre les rênes de son entreprise ? « Cela fait peur parfois !, reconnaît-il. Cependant, je suis au jour le jour tous les tableaux de bord de l’officine et je n’hésite pas à recadrer si besoin. Mais, en contrepartie, j’ai des collaborateurs très motivés. » Et fidèles ! Serge Brandinelli annonce d’ailleurs avec un grand sourire qu’il vient de remettre la médaille du travail à l’un de ses collaborateurs qui fête ses 20 ans d’ancienneté.

Envie d’essayer ?

Les avantages

– La délégation et la responsabilisation permettent de motiver le personnel.

– L’intéressement partagé évite les jalousies.

– Le management participatif met les « brebis galeuses » à l’écart.

– Etre attentif au confort de travail de ses salariés et les former régulièrement assure en retour une amélioration du conseil et du chiffre d’affaires.

– La spécialisation fidélise la clientèle.

– Cultiver une ambiance amicale soude l’équipe et limite le turnover.

Les difficultés

– La délégation demande une surveillance permanente.

– En finançant la formation du personnel, le titulaire prend toujours le risque de voir partir ses collaborateurs avec leur spécialisation en poche.

Les conseils de Serge Brandinelli

« Faites comprendre à votre équipe que chacun est autonome mais qu’il ne travaille pas seulement pour lui. Tout le monde doit ramer dans le même sens et pour la même cause ! »

« Mieux vaut déléguer les commandes à une seule personne car laisser chaque responsable de rayon s’occuper de son secteur crée des rivalités et favorise le « chacun pour soi », alors que c’est l’intérêt global de l’officine qui importe. »

– « N’hésitez pas à embaucher du personnel en back-office pour permettre aux personnes qui sont au comptoir de se consacrer totalement au conseil. »