Les conclusions du rapport ministériel

Réservé aux abonnés
Publié le 1 février 2003
Mettre en favori

Dominique Laurent, conseillère d’Etat, a remis à Jean-François Mattei un rapport concernant la formation continue des médecins. Il offre des pistes à explorer pour l’élaboration d’une formation continue des pharmaciens.

En préambule du rapport remis à Jean-François Mattei en novembre dernier sur la formation médicale continue (FMC), figure la composition des futures instances d’un conseil national quadripartite où figureraient l’Ordre, les universités, les syndicats et des « personnalités qualifiées ». Outre un comité de coordination, des conseils régionaux délivreraient ou non à chaque médecin un certificat de validation, mettraient en oeuvre la procédure de conciliation et saisiraient, le cas échéant, l’Ordre en cas d’échec.

Côté sanctions, prévues par la loi et pouvant aller jusqu’à l’interdiction d’exercer, le groupe de travail réuni autour de Dominique Laurent s’y est unanimement déclaré défavorable et a préconisé d’envisager un amendement à la loi pour les supprimer. Par contre, tout un dispositif incitatif a été envisagé comme par exemple un crédit d’impôt.

Le mode de financement, également évoqué, est apparu trop épars. Il existe en effet actuellement plusieurs fonds et plusieurs origines au financement de la FMC des médecins libéraux. Le FAF-PM tout d’abord, géré par les syndicats représentatifs, est alimenté par une cotisation obligatoire prélevée auprès de chaque médecin à hauteur de 0,15 % de son revenu annuel dans la limite du plafond de la Sécurité sociale, et représente 4 millions d’euros. La CNAM participe également soit par le financement d’actions de formation, soit par indemnisation des médecins signataires de la convention. Les dépenses de la CNAM en faveur de la formation médicale continue s’élevaient à 17 millions d’euros l’année dernière.

L’Etat participe également au financement de la FMC pour un montant estimé entre 460 000 et 1,22 million d’euros. Le financement de l’industrie – organisation de colloques et séminaires, soutien de l’action des associations de FMC -, non chiffré, serait quant à lui conséquent, le laboratoire Servier ayant même alloué au FAF-PM une contribution de 150 000 euros.

Publicité

Enfin, les médecins bénéficient de déductions fiscales pour les dépenses de formation à condition toutefois d’être conventionnés du secteur I et placés sous le régime de la déclaration contrôlée. Pour pallier cet éparpillement, le rapport Laurent suggère un regroupement des fonds FAF-PM et OGC de la CNAMTS en créant un « fonds national de la formation médicale continue ».

Autre proposition notable : celle d’un label spécifique accordé pour le suivi d’une formation continue. « La création d’un véritable « statut du médecin bien formé en continu » constituerait la meilleure des incitations au suivi d’une telle formation, et l’on peut penser que sa consécration pourrait permettre même la suppression des sanctions dans le cas d’un non-respect de l’obligation, précise le rapport Laurent. Cette « carrière » pourrait revêtir plusieurs aspects tels que : la délivrance d’un label spécifique (qui pourrait comporter plusieurs niveaux successifs et figurerait en complément des titres détenus par le médecin sur les documents qui le désigne aux patients (ordonnance, plaque) – cette mesure suppose une modification réglementaire prise sur proposition de l’ordre de médecins) ; l’accès à des fonctions de formation universitaire ; à des rémunérations forfaitaires supplémentaires générales ou bien particulières ; une prise en charge supplémentaire de cotisations au régime d’assurance vieillesse ; des points permettant des réductions des primes d’assurance. »

Les pharmaciens feront-ils un « copier-coller » ?

La formation continue pour réduire les dépenses de santé ?

Si la CNAM espère faire des économies grâce à la formation médicale continue, elle n’attend manifestement pas grand-chose de celle des pharmaciens. Interrogé sur ce point, le service de presse de la CNAM a en effet répondu « que cette question n’avait jamais été débattue ». Il est vrai que la loi Kouchner, cadre législatif de la formation continue obligatoire, entend d’abord assurer la qualité des soins aux malades et ne se positionne pas en termes d’économie. Et c’est aussi dans ce cadre que Claude Japhet s’est situé lors de son intervention au forum Economie Santé en novembre dernier. « La finalité de la formation continue n’est en aucun cas la maîtrise des dépenses. C’est et cela restera toujours « bien soigner, mieux soigner ». Toutefois, la conséquence de la qualité des soins sera bien sûr le juste coût engendré. En effet, c’est de cette qualité pratiquée par chaque professionnel de santé que dépendra le coût final que la collectivité aura à supporter. »

« Apprendre à écouter ». « Il existe des pathologies où la FMC peut faire faire des économies grâce à la prévention », assure Christine Meyer, vice-présidente de l’Union nationale des organismes de formation, qui cite l’asthme, le diabète de type 2, le tabagisme, le surpoids, l’ostéoporose, l’alcoolisme, les grains de beauté suspects, les vaccinations. « Le conseil et l’écoute peuvent aussi contribuer à diminuer les consultations superflues et le nombre de médicaments remboursés via le développement de l’automédication. Outre l’actualisation des connaissances, il ne faut pas oublier que le pharmacien doit apprendre à écouter et à convaincre et être aussi formé pour cela. »

Les labos planchent aussi

Si la participation des laboratoires à l’organisation de la formation continue ne fait pas l’unanimité, ces derniers entendent bien pourtant y jouer un rôle et pas seulement financier. « C’est sans doute l’industrie qui a le plus fait depuis le plus longtemps pour la formation médicale continue », expliquait Jean-Pierre Lehner, directeur des affaires scientifiques et économiques chez Sanofi-Synthélabo France, lors d’un débat sur le sujet organisé par Les Echos en novembre dernier, regrettant l’amalgame souvent fait entre promotion et formation : « Si on est soupçonné à chaque fois qu’on fait quelque chose en formation, alors précisément on ne fera plus que de la promotion… »

Un groupe de travail du LEEM (ex-SNIP) a mis au point une charte de bonnes pratiques : « Un standard de qualité pour la formation délivrée par les laboratoires mais qui pourrait tout à fait s’appliquer aux autres acteurs », précise Daniel Vasmant, responsable du dossier. Le LEEM, prudent, attend la sortie des décrets pour diffuser ce code de bonnes pratiques. « Une entreprise du médicament qui décide de proposer une formation doit répondre à des critères tels que la mise en place d’un comité d’experts, un programme bien défini, les moyens d’exécution, la transparence et l’évaluation. »

Une rigueur qui devrait rassurer les plus sceptiques.