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La Pharmacie du Théâtre redistribue les rôles
Pour manager, Yves Vandendriessche et Isabelle Blesson misent tout sur la participation de leurs collaborateurs. Et pas n’importe comment : la démarche – brevetée ! – consiste à assurer à la fois la cohésion de son équipe, l’évolution des compétences de chacun et l’augmentation du chiffre d’affaires. Qui dit mieux ?
Réunion d’équipe à la Pharmacie du Théâtre située à Saintes, en Charente-Maritime. Yves Vandendriessche, le cotitulaire, lance une question a priori anodine, mais dont la réponse sera déterminante pour la cohésion future de l’équipe : « Par quelle tâche avez-vous l’impression de ne pas être concerné ? » La comptabilité et le ménage ressortent en premier. Depuis cette réunion, une liste a été établie – approuvée par l’équipe – des tâches que tout le monde est prêt à faire en dehors de son activité de base (remplissage des rayons, mise à jour des tarifs, livraisons…). « Chaque fois que quelqu’un réalise telle ou telle tâche, il appose ses initiales dans un tableau préétabli », détaille Yves Vandendriessche.
L’intérêt de ce type d’initiative est évidemment de ne pas toujours reléguer les tâches ingrates aux mêmes personnes. Mais il s’agit aussi de confronter le quotidien des uns et des autres, pour que chacun se rende compte que son attitude influe sur le travail de ses collaborateurs. « Par exemple, ceux qui dénigrent la comptabilité réalisent que le fait de bien classer les papiers permet de faciliter la tâche de l’autre », constate avec satisfaction le titulaire.
Yves Vandendriessche et son associée Isabelle Blesson ne perdent jamais de vue leur principale préoccupation de managers : bien travailler ensemble. Ils ont même donné un nom à ce « concept » : l’« autonomie/interdépendance ». « Personne ne travaille plus tout seul dans son coin, mais on prend en considération le travail des autres collègues. C’est une façon de travailler tellement géniale qu’on se demande comment on faisait avant ! », témoigne Isabelle Blesson. La démarche est séduisante, mais il a fallu plusieurs années pour la concrétiser.
Rompre le train-train quotidien pour motiver
Incontournable, la première étape de cette méthode de management passe, selon Yves Vandendriessche, par le développement personnel des ressources humaines. « Inutile de vouloir responsabiliser ou former quelqu’un qui n’en voit pas l’utilité. Chaque collaborateur doit savoir pourquoi il vient travailler tous les matins. Chacun doit comprendre les attentes de la clientèle comme celles de ses collègues et de son patron », insiste-t-il. Son credo ? « Faisons-en des têtes bien faites avant d’en faire des têtes bien pleines. »
C’est à l’occasion d’un audit réalisé dans sa précédente officine (Isabelle Blesson y était alors adjointe) qu’Yves a eu un déclic. Il y était fait mention d’un « train-train quotidien ». Pour le casser, il a organisé, en dehors de la pharmacie, un week-end de formation consacré au développement personnel. « C’est incroyable comme les préjugés vis-à-vis des autres ont volé en éclat ! »
Les fondations de l’équipe une fois posées sans ambiguïtés, il a fallu construire un projet d’entreprise solide. Pour ce faire, chaque membre de l’équipe apporte sa pierre à l’édifice. « Nous avons défini ensemble des principes communs à partir de questions simples telles que « Qu’est-ce qui différencie une pharmacie d’un commerce classique ? » », rapporte Yves Vandendriessche.
Dans les faits, les qualificatifs de l’exercice en officine ont été rassemblés dans un « Passeport qualité », un guide de bonne conduite à destination de chaque salarié et du titulaire. Mais l’équipe ne s’en tient pas aux concepts théoriques. Pour les appliquer à la pratique, elle force la discussion et la réflexion jusqu’à arriver à des objectifs consensuels. Par exemple, le service à la clientèle est, entre autres, représenté par la remise de brochures informatives.
Se dépasser soi-même sans être en compétition
Définir un objectif, c’est bien. Pouvoir l’atteindre, c’est mieux. D’où l’idée d’évaluer chaque collaborateur selon des critères encore et toujours définis et acceptés par tous (convivialité, sérieux, écoute, sens du résultat…). Mais pas question d’attribuer des notes ! Pour l’item « Distribution de brochures », une grille permet de cocher une réponse (« Le plus souvent possible », « Systématiquement » ou « Oublie trop souvent »). Les critères sont aussi quantitatifs. « Tout est objectivé. Il faut savoir tirer parti des données informatiques, comme par exemple l’évolution du panier moyen hors ordonnances pour chaque collaborateur, le nombre de clients servis, etc. », indique Yves Vandendriessche.
Toutes ces évaluations ne risquent-elles pas de créer des jalousies au sein de l’équipe ? Pour le titulaire, la réponse est sans équivoque : « Les statistiques sont purement individuelles. Nous définissons certes des critères communs, mais chacun doit se les approprier individuellement. Je peux avoir recours à des critères au mérite. Qu’importe, puisque le but est de se dépasser soi-même en permanence et non pas d’être en compétition avec un collègue. Ce qui me permet par exemple d’affirmer qu’il n’y a pas que ceux qui réalisent beaucoup de ventes qui sont performants. »
Dans les faits, chacun possède une fiche de progression comportant une montée en puissance sur trois périodes de six mois : l’interaction dans l’équipe, le comportement face aux clients et les critères d’efficacité. « Tout est échafaudé en commun et tout le monde y trouve son compte et utile à son niveau. Ainsi, il n’y a plus de mauvais éléments », assure Yves Vandendriessche, qui a fait breveter cette méthodologie de travail.
Une augmentation de 3 à 8 % du chiffre d’affaires
« Avec ce système, les râleurs s’excluent d’eux-mêmes. Celui qui ne va pas dans le sens de l’équipe se fait rappeler à l’ordre par ses collègues », poursuit le pharmacien. Pour lui aussi, la démarche est payante. Et pas besoin de bla-bla pour le prouver. « Chiffres à l’appui, j’ai démontré que la mise en place de cette méthode de travail a permis d’augmenter le chiffre d’affaires de l’officine de 3 à 8 % selon les moments (plus ou moins de clients). » Le système se veut en outre flexible. « Quand on n’arrive pas à atteindre les objectifs selon le planning fixé, ce n’est pas dramatique à partir du moment où l’on peut comprendre pourquoi », précise Yves Vandendriessche. Il reconnaît cependant que ce type de management fonctionne aussi parce qu’il prévoit une récompense en fonction des résultats, tous les six mois. Primes individuelles en fonction du salaire ? Prime collective répartie égalitairement ? Ou plan d’épargne entreprise ? Là encore, la décision finale ne peut être que consensuelle et dépend de l’avis de tous.
« Dans tous les cas, mes collaborateurs ont conscience que je ne peux donner qu’à partir du moment où l’officine dégage une marge suffisante. Je n’hésite pas à parler chiffres en toute transparence et à faire, si besoin, des leçons d’économie. Tout le monde connaît les perspectives de l’entreprise pour 2008. Car si on ne se fixe pas de but précis, comment peut-on y arriver ? », s’interroge Yves Vandendriessche.
Le titulaire affirme avoir une obsession : créer des emplois. « Je cherche avant tout à fonder des heures de travail. C’est mon propre critère d’évaluation. » Mission réussie puisque la pharmacie vient de recruter un nouveau collaborateur.
Envie d’essayer ?
Les plus
– Ce mode de management développe l’esprit d’équipe.
– Il prend en considération le travail des autres.
– Donne à chaque membre de l’équipe un sens à sa tâche pour mieux l’accomplir.
– Permet à chacun d’être efficace sans susciter de jalousie.
– Les mauvais éléments s’excluent d’eux-mêmes.
– Développe la notion d’objectifs au sein de l’équipe.
– Augmente la marge et le chiffre d’affaires de l’officine.
Les moins
– L’omniprésence du titulaire est indispensable pour pouvoir évaluer correctement ses collaborateurs.
– Les résultats ne sont pas immédiats.
Les conseils d’Yves Vandendriessche
– « Des réunions d’équipe mensuelles et des entretiens d’évaluation réguliers sont indispensables. »
– « Il faut être totalement transparent au niveau des résultats économiques de l’officine. En pharmacie, on n’ose pas suffisamment parler chiffre à ses salariés… »
– « L’évaluation des collaborateurs doit passer par des critères indubitables. Il faut pouvoir juger quelqu’un à partir de résultats chiffrés et précis. »
– « Il ne faut pas hésiter à utiliser toutes les ressources statistiques de l’informatique pour créer des critères d’évaluation pointus. »
– « Pour éviter les conflits, il ne faut avancer que sur des bases consensuelles. »
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