QUI RÉCONCILIE LE DOCTEUR ET LE VENDEUR
FACE À DES TITULAIRES SOUHAITANT FAIRE ÉVOLUER LEUR STRATÉGIE VERS LE SERVICE AUX PATIENTS, LES AGENCEURS FONT BOUGER LES CODES POUR INTÉGRER LES ESPACES DE CONFIDENTIALITÉ SANS SACRIFIER LE MÈTRE LINÉAIRE.
La prise de conscience ne date pas d’hier, mais elle s’est accélérée avec la pandémie. Les pharmaciens comprennent qu’ils seront de plus en plus amenés à pratiquer du préventif et de l’accompagnement patient. Et que cette nouvelle orientation servicielle doit faire partie intégrante de l’agencement de leur pharmacie. » Le constat formulé par David Van Acker, directeur général de Mobil M, est partagé par tous les agenceurs spécialisés en pharmacie qui voient les attentes de leurs clients évoluer. « Plus aucun projet ne se conçoit sans l’aménagement de salles de confidentialité, assure Patrick Laurency, attaché commercial pour la région Nord-Ouest de Boursin Agencement. Et ces espaces, qui étaient auparavant relégués dans une zone froide ou en back-office, dans le bureau du titulaire, figurent désormais en bonne place dans les priorités. » La plupart des cahiers des charges soumis aux agenceurs intègrent désormais a minima deux cabines réservées à l’orthopédie et au suivi des patients, y compris dans les petites officines. « Mais dans les dossiers de transfert ou d’agrandissement, de plus en plus de pharmaciens nous demandent d’en ajouter une troisième pour la vaccination et les tests antigéniques, précise Patrick Laurency. Un titulaire vient même de nous réclamer d’en inclure une quatrième pour le suivi oncologique. » La surface accordée à ces nouveaux espaces, qui doivent respecter les normes d’accès pour les personnes à mobilité réduite (PMR), est toujours optimisée. « Nous essayons de concevoir des salles les plus petites possibles, afin de ne pas empiéter sur le linéaire. Tout l’enjeu étant de les rendre pratiques pour l’équipe officinale et confortables pour le client », résume Eloïne Cosson, designer d’espace chez JCD Agencement. Les surfaces varient en fonction des usages, comme l’explique Alain Viaud, président de CAP Agencement. « Pour une cabine que l’on consacrera à la télémédecine, 6 ou 7 m2 suffisent, alors que pour un espace destiné aux entretiens pharmaceutiques, il faut plutôt prévoir 7 ou 8 m2. Et encore un peu plus pour la cabine d’essayage orthopédique qui va aussi servir à stocker le matériel. »
Des espaces indépendants
Leur positionnement ne doit rien au hasard. « S’il n’y a pas de règle, chaque pharmacie étant différente, la cabine d’orthopédie est le plus souvent intégrée à l’univers de la contention et du maintien à domicile (MAD), note Alain Viaud. Les salles pour les entretiens pharmaceutiques ou les soins cosmétiques sont, elles, accessibles au milieu de l’espace de vente, l’espace de télémédecine ou de vaccination étant, lui, positionné à proximité de la ligne de comptoirs. » L’idée d’aménager des cabines pour la vaccination et les tests avec une entrée indépendante à l’extérieur commence aussi à faire son chemin. « C’est ce que l’on propose lorsque l’environnement et l’architecture le permettent car, sur le plan sanitaire, cela offre l’avantage de différencier les flux de patients potentiellement infectés, souligne Alain Viaud. Et si c’est réalisable, la plupart des pharmaciens nous donnent leur feu vert. » Toujours dans une optique sanitaire, TH Kohl a récemment enregistré une demande originale. « Le pharmacien souhaitait installer des comptoirs-cabines, chaque poste étant isolé par un sas de verre, pour que son équipe puisse pratiquer des tests et délivrer avec une confidentialité maximum, le patient se sentant, lui, protégé de son voisin », précise Franck Nicolle, directeur commercial régional nouvelle-Aquitaine et Occitanie de TH Kohl.
Arbitrages et sacrifices
L’intégration de ces nouveaux services sur le point de vente se traduit le plus souvent par des arbitrages difficiles pour les pharmaciens. « Aucun titulaire ne vous dira qu’il est prêt à sacrifier des univers pour laisser de la place à ces nouveaux services. Nous essayons donc toujours de concevoir une solution qui permette de préserver les mètres linéaires », assure Franck Nicolle. « Les pharmaciens choisissent donc d’abord de rogner des mètres carrés en back-office, une solution d’automatisation étant alors envisagée », note David Van Acker. Le salut passe aussi souvent par l’optimisation de l’espace sur le point de vente, comme l’explique Alain Viaud. « Dans beaucoup d’officines, l’aménagement se traduit par de la perte de place. En travaillant sur les flux de circulation et en rationnalisant l’ensemble des univers, on arrive à exploiter chaque mètre carré. » Lorsque cela ne suffit pas, il faut faire des concessions, qui sont conditionnées par la typologie de l’officine et de sa zone de chalandise. « Dans une petite pharmacie de quartier proche d’une officine de centre commercial de 300 m2, le titulaire ne cherchera pas à se battre sur la parapharmacie, souligne Patrick Laurency. De fait, il se résoudra parfois à minimiser certains linéaires de cosmétique pour mettre en avant les services. » Toujours pour économiser l’espace, certains agenceurs diminuent la surface d’exposition du MAD, un écran digital se chargeant de présenter tous les produits du catalogue. « Nous exposons également sur les murs des cabines des produits en lien avec leur thématique, note Franck Nicolle. Pour une salle de vaccination et de tests antigéniques seront proposés des masques, du gel hydroalcoolique ou des autotests. » Les agenceurs jouent également sur l’emprise au sol des gondoles afin de gagner de précieux mètres carrés. « Auparavant, il s’agissait de mobilier qui se développait sur 60 ou 70 cm. Désormais, on prévoit plutôt des meubles de 40 cm », confirme Patrick Laurency. Ces espaces sont en général identifiables grâce à une communication et un code couleur spécifiques. « Pour faciliter la compréhension depuis l’entrée, la fonction de la salle est clairement indiquée au-dessus de la porte et au moyen d’un petit pictogramme, une piqûre indiquant par exemple que l’on est bien devant la salle de vaccination », illustre Eloïne Cosson. On l’aura compris, l’intégration de la dimension services conduit à faire évoluer les codes de l’agencement en pharmacie. « Et pour qu’elle soit réussie, il faut absolument la coupler avec une étude merchandising car, pour valoriser ces nouveaux espaces, le pharmacien doit repenser ses priorités et son offre », conclut Patrick Laurency.
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