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Livraison à domicile : quand l’Ordre montre les dents
La plateforme de livraison à domicile de médicaments et de produits de parapharmacie Livmed’s, utilisée par 2 300 pharmacies à ce jour, qui compte Sanofi dans son capital, fait l’objet d’un recours judiciaire. Explications.
La start-up Livmed’s, lancée en février 2020 par Talel Hakimi et deux associés, promet de livrer les médicaments et produits de parapharmacie aux patients, en 30 minutes, grâce à son réseau de pharmacies et à ses livreurs. En fin d’année 2022, Sanofi annonce apporter 1 million d’euros à la société via son entité Santé Grand Public. L’entreprise qui veut être partenaire de la digitalisation des pharmaciens voire le « Google de la pharmacie » fait aujourd’hui face à l’Ordre des pharmaciens.
« Nous avons porté plainte contre cette société pour, entre autres, exercice illégal de la pharmacie », indique un représentant du Conseil central de l’Ordre des pharmaciens. « Si vous consultez l’application, vous constaterez que le patient paie non pas à la pharmacie mais à Livmed’s. Ce flux est également problématique », ajoute l’ordinal. Selon Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), l’Ordre reprocherait également à la plateforme « le transfert d’ordonnances et la commande pour le compte d’un tiers. »
« Le conseil central de l’Ordre des pharmaciens nous reproche une activité de vente ou de courtage en médicaments. Ce que nous démentons. Nous avons fait établir un rapport d’expertise et un constat d’huissier qui montrent qu’à chaque étape de notre fonctionnement, nous respectons le monopole officinal, qui comprend les activités de vente – notamment en ligne – et de dispensation de médicaments, dans les conditions fixées par l’article L. 4211-1 du code de la santé publique », se défend Talel Hakimi.
Parallèlement, plusieurs pharmacies travaillant avec la société en région Paca ont eu la visite de leur agence régionale de santé (ARS). Talel Hakimi ne conteste pas ce point. « Nous sortons grandis de ce rapport de visite chez nos clients qui précise que notre société peut être sollicitée à des fins de livraison », se félicite-t-il. « Ce point de vue est très optimiste. Le rapport a été envoyé au Conseil régional de l’Ordre qui jugera de l’opportunité de poursuivre nos confrères », énonce prudemment le représentant de l’Ordre.
Du côté du représentant des étudiants en pharmacie, la start-up ne séduit pas non plus. « Les livreurs sont sur le même modèle qu’Uber. Ils sont sous payés. Ce n’est pas un progrès », estime Maxime Delannoy, président de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf). Une appréciation incompréhensible pour Talel Hakimi. « Nous employons des livreurs en CDI dès que l’activité locale le permet. On confond ma société avec d’autres dont le business model est contestable. L’investissement de Sanofi et des autres actionnaires n’a eu lieu qu’après un audit juridique méticuleux. Je suis en outre attaché au maillage territorial en garantissant que la pharmacie du coin de la rue, choisie par le patient, lui livre ses médicaments. Pourtant ici (lors du salon PharmagoraPlus qui s’est déroulé les 11 et 12 mars à Paris, NdlR), certains représentants de la profession m’évitent », déplore-t-il.
Du côté de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Valérian Ponsinet, membre du bureau, n’est pas opposé à ce nouvel entrant. « Nous les avons rencontrés avec Philippe Besset, le président du syndicat. Leur solution parait bien pensée : toutes les pharmacies sont référencées, le patient paie la livraison. Mais comme nous le leur avons rappelé, en tant que pharmaciens, nous prenons soin de ne pas communiquer; or la communication de Livmed’s est assez agressive. Elle peut donc faire peur », explique-t-il.
Après une première audience le 2 mars, la réponse au référé sera prononcée mi-avril.
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