Musclez vos outils informatiques

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Publié le 10 octobre 2009
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Résistance au changement, force d’inertie, manque de formation, d’information ou de temps… Quelle qu’en soit la raison, la plupart des confrères sous-exploitent leur outil de gestion informatique. Dans ce contexte, nous vous proposons de cerner les applications logicielles vraiment indispensables au bon fonctionnement de l’officine, mais aussi de mettre en place un plan de développement des compétences et de formation à l’informatique progressif.

Selon notre sondage Direct Medica, 34 % des officinaux utilisent leur informatique d’une manière optimale, soit à 70 % des capacités. Les SSII estiment, elles, ce pourcentage des officinaux entre 10 et 20 %. Toujours selon les SSII, seule une petite minorité, férue d’informatique, met à profit 90 à 100 % des possibilités offertes par les logiciels professionnels. Cette même minorité est donc à l’affût de toutes les évolutions logicielles. A contrario, 10 à 20 % des titulaires se limitent à l’utilisation des fonctions tiers payant et gestion des stocks. 3 à 5 % n’utiliseraient pas encore la gestion des stocks et beaucoup ont encore une caisse enregistreuse dissociée du système informatique. « Il est dommage que de trop nombreux titulaires n’aient pas encore pris conscience du fait que leur informatique peut devenir un véritable centre de profit… Mais cette situation est aussi en évolution : un quart d’entre eux s’investissent fortement », observe Jérôme Lapray (Pharmagest).

C’est sans doute pour cette raison que la majorité des SSII ne propose pas de logiciel incluant toutes les fonctions mais une base avec des modules additionnels à acquérir et à maîtriser au gré de l’évolution des besoins et des demandes. Grande fonction par grande fonction, voici, selon les SSII, ce qu’il vous faut absolument maîtriser.

Tiers payant : encore des lacunes à combler

Premier impératif pour tout titulaire : avoir le moins de rejets possibles et une trésorerie optimisée, ce qui implique une bonne maîtrise du tiers payant et de la télétransmission, mais aussi de se faire assister d’une fonction de rapprochement bancaire. Pourtant, Jean-Yves Baranger (ASP-Line) estime que la maîtrise de la fonction tiers payant n’est pas encore acquise par près de la moitié des confrères eu égard à la complexité légale de la gestion du médicament : mutuelles et caisses particulières, plafonnements, remboursements spécifiques, recyclage de dossiers, disparités régionales au niveau des caisses… « Une grande majorité des appels à une hotline concerne le tiers payant et la télétransmission. Certains titulaires ont 3 rejets hebdomadaires, d’autres 50 ! Ceci étant lié à la fois à une méconnaissance des possibilités de l’outil informatique et à un manque de rigueur et de suivi », indique Jean-Yves Baranger.

Chez LSI, on annonce qu’au moins 30 % des clients officinaux se contentent de la gestion du triptyque tiers payant/subrogation/télétransmission, gérant par ailleurs une caisse dissociée de l’ordinateur et passant leurs commandes manuellement via le logiciel (sans assistance automatisée et sans historique). Certains ne vérifient jamais les livraisons. D’autres font une confiance aveugle à leurs représentants, sans velléité de négociation. « L’informatique n’est pour eux qu’une facturière et un terminal de passation de commandes. Le minimum serait donc d’intégrer la fonction caisse et une politique de prix et d’achat impliquant bien entendu la gestion des stocks », résume Edouard Baranès (LSI).

Pour Jérôme Lapray, le degré de maîtrise se mesure à la rapidité d’utilisation de l’outil au comptoir, résultant d’une combinaison entre la rapidité de traitement du logiciel (par exemple le fait de pouvoir coupler vente directe et tiers payant) et une bonne connaissance de toutes les fonctions et raccourcis. « Plus l’éventail des possibilités qui s’offrent à l’opérateur est facile d’accès, plus l’utilisation est performante : accès aisé au DP, affichage automatique instantané des ventes associées, etc. », insiste Jérôme Lapray.

Chez Isipharm, on parle également d’un trio de base incontournable : facturer/commander/livrer. Pour faciliter la maîtrise de ces compétences, les propositions de commandes sont paramétrées en amont par les formateurs et le processus de livraison est optimisé (scannage, ventilation par lieu de stockage, promis, alertes erreurs…). La SSII compte parmi les basiques la gestion de caisse (dont reprise de crédit, avance produits, édition du journal des ventes, des règlements et arrêté de caisse…), la télétransmission et le suivi de paiement (pointage des factures).

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On comprend donc que certaines SSII (Winpharma par exemple) proposent de petites fonctions d’optimisation et d’aide, par exemple une alerte qui s’affiche en rouge en cas d’écart de paiement ou de non-paiement sur une mutuelle ou une caisse (L pour Litige) avec l’affichage automatique d’un message sur la fiche client.

Gestion des stocks : soigner le management et l’organisation

Même souci de simplification des procédures pour la gestion des stocks. Il apparaît que plus le logiciel propose de codes d’optimisation préprogrammés en matière de propositions de commandes répartiteurs et directes, plus le titulaire génère de la rentabilité (flux tendus). Ceci en fonction des rotations (sorties mensuelles, coefficient de pondération intégrant les rotations sur 18 mois et sur le mois en cours, calculateur de ruptures corrigeant le stock à la hausse), des capacités de stockage, du prix des produits… Le logiciel doit aussi être capable d’alerter automatiquement en cas d’erreurs entre le stock virtuel et le stock réel, de repérer l’erreur (erreur humaine, démarque inconnue) afin que le titulaire puisse la corriger et alerter son équipe.

On rappelle chez Caduciel l’importance d’avoir un logiciel « auto-apprenant » qui intègre l’historique des rotations au fil de l’eau et apporte de lui-même les correctifs. Une simplicité qui met la gestion des stocks à la portée du plus grand nombre sans aucune difficulté, puisque tout peut éventuellement se gérer en automatique. Un argument également mis en avant par Pharmagest qui insiste sur la possibilité donnée au titulaire de faire une confiance totale dans l’émission des commandes directes ou répartiteurs à partir des historiques. Les planificateurs de tâches sont donc particulièrement utiles aux utilisateurs basiques : transmission des commandes, éditions des ordonnanciers…

Jean-Yves Baranger attire, lui, l’attention sur les écueils à éviter pour obtenir une gestion de stock satisfaisante : bien étiqueter, entrer tous les produits commandés dans le stock (y compris quand les commandes se font par téléphone et non via Pharma ML), intégrer toutes les sorties, surveiller mensuellement des indicateurs clés (valeur de stock, surstock, rupture de stock et rotations). « La bonne utilisation de l’informatique est avant tout une problématique liée au management et à l’organisationnel », soutient-il.

Pilotage des prix : vital en temps de crise !

Winpharma estime que la gestion des politiques de prix, et notamment la pratique de la marge compensée (baisser les prix sur les grosses rotations et récupérer les points de marge sur les moyennes et faibles rotations), ainsi que la gestion des promotions (comme outil d’aide à la vente et de négociation avec les laboratoires) font partie des outils de gestion à maîtriser rapidement dans un contexte de crise et de recherche de sources de profit. Le calcul de la marge compensée peut être entièrement automatisé (comme chez Winpharma) ou semi-automatisé (comme chez Alliadis) : au pharmacien d’effectuer alors manuellement la compensation.

Chez Pharmagest, comme chez Isipharm ou encore Alliadis, l’intégration des statistiques de prix pratiqués (minimum et maximum constatés et prix médian), à l’échelle nationale ou même locale pour certaines SSII (Pharmagest propose des statistiques sur la zone de chalandise de l’officine incluant une vingtaine d’officines), constitue une base indispensable pour la fixation des prix de vente. Alliadis propose de son côté des statistiques par typologies d’officines (relevés de prix dans les parapharmacies ou les pharmacies concurrentes).

Tableaux de bord : essentiel pour prendre les bonnes décisions

Autre fonction vitale selon Gildas Leroux, utilisée aujourd’hui par 50 % du parc client Winpharma, le pilotage par tableaux de bord multicritères, budget prévisionnel avec contrôle mensuel et soldes de gestion intermédiaires permettant d’anticiper et d’apporter des correctifs en cours d’exercice.

On souligne aussi chez Pharmagest l’importance d’avoir accès facilement, sans aucune manipulation, à des tableaux de bord simples, à consulter quotidiennement en quelques minutes pour avoir un suivi global de l’activité : « Nous avons développé à cet effet un outil que l’on a appelé « Le décisionnel » et qui permet un accès à tous les principaux paramètres de l’activité sur un seul écran : chiffre d’affaires, marge, suivi d’achat et de stock… », informe Jérôme Lapray.

Gain en rentabilité : maîtriser les détails du logiciel

Contrairement à la plupart des utilisateurs, les utilisateurs confirmés commencent à intervenir directement sur le paramétrage de leurs codes de gestion des stocks (par famille, voire par produit) de manière à avoir un stock qui tourne de plus en plus vite avec le moins de manquants possibles. Le principe retenu : plus mon produit est cher, moins il doit être stocké longtemps.

Pour Pharmagest, le gain en expertise se mesure aussi à la capacité à gérer le détail : on passe d’une macrovision globale (grandes familles de produits, marques) à une microvision (évolution du CA et de la marge sur les gammes, les types de produits, les produits d’appel, les fortes rotations, suivi de l’efficacité des promotions…).

Isipharm considère qu’il faut également intégrer les conditions de paiement, en tendant le plus possible vers un paiement postérieur à la vente des produits, une optimisation du coût de commande (masse salariale mobilisée) et le choix automatisé du meilleur fournisseur.

Les utilisateurs confirmés effectuent aussi des inventaires tournants quotidiens à l’aide d’un PDA après avoir divisé leur officine en petits secteurs géographiques facilement contrôlables. Ils peuvent en outre, sur certains logiciels comme Léo par exemple, sortir des listes de contrôle type sur les faibles, moyennes et grosses rotations. « L’inventaire tournant est une pratique qui permet de réduire les erreurs de stock – et donc les manquants – qui touchent 2 à 5 % du stock en moyenne avec des pointes dans certaines pharmacies à 10, voire 12 % », précise Jean-Yves Baranger.

« Nous devons de notre côté avoir un rôle de conseil en développement en faisant découvrir de nouvelles fonctions aux titulaires pour les faire avancer pas à pas dans la gestion de leur officine », précise Gildas Leroux. L’idéal serait effectivement de mettre en place au sein de l’officine, équipe incluse, un plan de formation afin de maîtriser progressivement les différentes fonctions informatiques avec acquisition, suivi et validation des acquis, lequel pourrait donner lieu à une délégation intelligente de la part du titulaire. Cette démarche doit bien sûr impliquer les managers, qui doivent avoir une démarche rigoureuse en matière de gestion des acquisitions en informatique (formations, transmission, organisation et logistique). Mais elle inclut aussi les SSII dont certaines, comme Isipharm ou Winpharma, mettent aujourd’hui à la disposition des pharmaciens des consultants réalisant des audits.

Pour aller plus loin dans la recherche de sources de profit via l’informatique, Isipharm préconise de former des collaborateurs référents par fonction informatique – en face à face ou à distance et via des modules d’autoformation en ligne (gestion des commandes, des stocks, suivi de paiement…). Ces référents deviendraient alors eux-mêmes formateurs au sein de l’officine. Une chose est sûre, le plan d’amélioration continue des compétences en informatique devrait entrer de plein droit dans la stratégie managériale des titulaires en tant que vecteur de développement économique.

Quelles fonctions expertes intégrer ?

Le comptoir rend évidemment difficile la maîtrise totale de toutes les fonctions informatiques. Certaines, plus complexes, méritent pourtant d’être assimilées et exploitées.

Bien entendu, il existe une utilisation « experte » des fondamentaux, comme le rappelle Jérôme Lapray (Pharmagest). La gestion des achats devient alors un mix savant entre les fournisseurs (laboratoires directs, un à trois répartiteurs, un à deux short-liners, une centrale d’achats, un groupement informel, etc.), les quantités achetées, les vitesses de rotation moyenne, les délais de paiement, les remises diverses ou encore les contrats de coopération. La notion de « meilleur circuit de réapprovisionnement » est cependant incluse dans les fondamentaux pour certaines SSII comme Alliadis qui en propose une gestion automatique, y compris lors des achats par marchés. « La demande sur ce type de prestation est de plus en plus fréquente compte tenu de la tendance au regroupement d’officines de manière informelle (des amis, des époux, les membres d’une même famille) ou formelle : on dénombre environ 3 000 SEL en France aujourd’hui », indique Jérôme Lapray.

Chez ASP-Line, on ajoute au nombre de ces fonctions expertes les bilans par famille ou par laboratoire impliquant une gestion fine des marges, et donc une intégration et un suivi ponctuel de toutes les remises arrière.

Des fonctions performantes sous-exploitées

La constitution et l’utilisation des tableaux de bord multicritères personnalisés peuvent elles aussi relever de l’expertise. Certains titulaires suivent les paramètres de gestion par famille de produits (solaires, minceur, anti-âge…), par collaborateur, par taux de TVA, par promotion, par saison, etc. Quelques fonctions particulièrement pointues relèvent encore de l’exception. Parmi elles, la gestion merchandising assistée par ordinateur, laquelle peut devenir un paramètre de négociation (montants des achats et marge/mètre linéaire occupé).

Certains logiciels (Pharmaland, Périphar) proposent aussi une gestion merchandising reposant sur le paramétrage d’une véritable pharmacie virtuelle : chaque linéaire est renseigné quant à sa composition (produit par produit) grâce à un PDA, et le pharmacien peut suivre l’évolution des ventes en fonction des emplacements. Cette fonction est très peu utilisée aujourd’hui en officine en raison de l’importance du travail de paramétrage initial et du travail d’actualisation en continu (gondoles promotionnelles, saisonnières…), mais elle permet un affinage considérable de l’implantation et donc une majoration de l’impact visuel et des achats spontanés ou de remémoration.

La gestion managériale (suivi de performance des équipes : CA, marge, substitution, investissement dans les campagnes promotionnelles…), est encore victime de son image « invasive ». Elle fait aussi partie des fonctions logicielles très avancées.

Autre fonction « experte » : un contrôleur de délivrance des ordonnances (contrôle automatique sur 5 à 10 % des délivrances) chez Winpharma.

Constat des SSII : toutes ces fonctions sont le plus souvent explorées par des titulaires de SEL ou d’officine de plus de 8 postes informatiques (plus de 2 millions d’euros).

Sondage directmedica

Sondage réalisé par téléphone les 21 et 22 septembre 2009 sur un échantillon représentatif de 100 pharmacies en fonction de leur répartition géographique et de leur chiffre d’affaires.

Mon logiciel me va…

Etes-vous satisfait de votre logiciel informatique actuel ?

… mon matériel aussi

Etes-vous satisfait de votre matériel informatique actuel ?

… de même que la maintenance

Etes-vous satisfait de la maintenance proposée par votre SSII ?

… mais moins la formation

Etes-vous satisfait de la formation proposée par votre SSII ?

ça évolue bien…

Etes-vous satisfait des évolutions logicielles proposées par votre SSII ?

… mais je reste comme je suis

Comptez-vous réinvestir dans votre système informatique cette année ?

… pour :

Comptez-vous réinvestir dans votre système informatique cette année ?

70 % d’« experts » ?!

Avez-vous le sentiment d’utiliser les capacités de votre système informatique à…

50 % de compétents…

Vous sentez-vous compétent en informatique ?

… et autant d’aspirants à la formation

Souhaiteriez-vous suivre des formations régulières d’actualisation en informatique ?

Vive la gestion de stock !

Quelles fonctions logicielles vous semblent les plus utiles ?