Un marché toujours en croissance, mais…

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Publié le 9 décembre 2023
Par Yves Rivoal
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Le marché des génériques devrait afficher en 2023 une croissance de près de 8 % en valeur, alimentée essentiellement par les nouvelles entrées au Répertoire en 2022. Cependant, les tensions et ruptures d’approvisionnement freinent le développement de la substitution et impactent de facto la marge des officines.

 

CONTRIBUTEURS

David Syr (Gers Data)

« Sur les neuf premiers mois de l’année, le marché des médicaments génériques est en croissance de 7,8 %, à 3,2 milliards d’euros contre 3 milliards l’année dernière sur la même période. 70 % de cette croissance est portée par les nouveaux génériques comme l’abiraterone, le fingolimod ou le lacosamide commercialisés depuis 2022, confie Davir Syr, directeur général adjoint de Gers Data. Il en ressort également que le taux de substitution plafonne à 84 %. Il y a par conséquent, sur ce segment, un réel potentiel d’optimisation et de rentabilité à aller chercher. Le médicament générique reste en effet l’un des premiers contributeurs à la marge des pharmacies, encore plus aujourd’hui qu’hier. La marge peut atteindre 40 % alors qu’elle n’est que de quelques points sur les médicaments princeps. Les pharmaciens auraient donc tout intérêt à rechercher toutes les substitutions possibles. » 

David Syr entrevoit toutefois les limites de l’exercice. « Avec les baisses de prix sur les médicaments matures imposées pour financer l’arrivée sur le marché les médicaments innovants, nous sommes arrivés au bout du modèle de l’“entreprise générique”, estime-t-il. Les tensions et ruptures d’approvisionnement, qui concernent aujourd’hui entre 1 400 et 1 500 médicaments, portent le plus souvent sur des génériques matures comme l’amoxicilline. Ces ruptures sont la résultante d’une consommation mondiale accrue et d’un problème de rentabilité lié à l’inflation sur toute la chaîne du médicament. »

Imaginer un nouveau modèle

Pour que les laboratoires soient en capacité demain de produire les médicaments du quotidien, et en même temps de développer les traitements innovants qui permettront de mieux prendre en charge les pathologies lourdes invalidantes, il va falloir, selon David Syr, imaginer un nouveau modèle économique. « En sachant que la solution ne sera pas simple à trouver car le prix n’est pas le seul facteur à entrer en ligne de compte, rappelle-t-il. L’explosion de la consommation mondiale de médicaments dans des pays comme la Chine et l’Inde ou sur un continent comme l’Afrique explique aussi une bonne partie des pénuries. Pour répondre à l’augmentation de la demande, l’industrie pharmaceutique va alors devoir augmenter ses capacités de production. Or, on ne construit pas une nouvelle usine en deux jours. Le marché devrait donc mettre plusieurs années avant de pouvoir s’ajuster. » 

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Pour toutes ces raisons, David Syr s’attend à une année 2024 compliquée pour le marché des génériques. « Il y a très peu de chances que les tendances observées en 2022 et 2023 s’inversent l’année prochaine, pronostique-t-il. Les pharmaciens vont devoir s’habituer à vivre dans un contexte de disponibilité des médicaments génériques plus tendu et apprendre à évaluer l’incidence que ces tensions auront sur leur marge du fait d’un approvisionnement chez différents génériqueurs. »