Baume, son coeur fait baume

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Publié le 28 février 2009
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Installée à Thyez, à quelques encablures des stations de ski de Haute-Savoie, Anne Sauteron recherchait pour son référencement de soins dermocosmétiques une crème hivernale protectrice, apaisante et hydratante. Aucune ne répondant à ses critères d’efficacité, elle a élaboré elle-même le Baume des Neiges. Et le commercialise.

A l’approche de ses 40 ans, Anne Sauteron a eu très envie de se lancer un défi. « Installée depuis dix ans dans la même officine, avec une équipe stable, performante, et une clientèle fidèle, j’ai ressenti le besoin de me lancer dans un nouveau projet, de bousculer mon activité… » Restait à définir quel serait ce défi qui ferait souffler un vent de fraîcheur sur sa vie professionnelle. Car le quotidien de cette maman de cinq filles âgées de 12 à 2 ans est déjà trépidant !

Le déclic se produira à l’occasion de vacances à la montagne avec des amis parisiens. « Ils revenaient des pistes avec le visage frigorifié. J’ai voulu leur proposer une crème climatique pour protéger la peau des basses températures. Mais je me suis rendu compte que parmi l’offre de soins dermocosmétiques, pourtant très large, avec des gammes à rallonge, il n’existait que deux produits spécifiques, aux looks très sport et aux textures collantes, peu agréables. »

En décembre 2007, la pharmacienne, dévoreuse de presse féminine et adepte de soins « pointus », imagine une crème antifroid alliant efficacité, plaisir et glamour. Son défi était né !

Cinq mois d’essais pour élaborer le produit idéal

La première étape a consisté pour Anne Sauteron à définir les actifs phares de sa crème « doudoune ». Passionnée de botanique, elle commence par rechercher quelles plantes des Alpes possèdent des vertus isolantes et cicatrisantes. Ses souvenirs d’enfance lui rappellent l’habitude qu’avait sa maman de panser les plaies de ses genoux écorchés avec des fleurs de lys conservées dans de l’eau-de-vie. « Le lys blanc qui pousse dans les alpages est très émollient. Il s’est donc imposé comme le point de départ de la formule. J’ai voulu ajouter d’autres fleurs blanches. L’edelweiss, pour son effet protecteur et antiradicalaire. Le petit houx, pour ses propriétés anti-inflammatoires et antirougeurs. Le tout associé à de l’acide hyaluronique, composant naturel de la peau, afin de maintenir une hydratation optimale. »

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Très motivée, Anne Sauteron s’inscrit au DU de dermocosmétologie de la faculté de Besançon. Reste à mettre la crème en pot et à la commercialiser. « J’ai sous-traité la fabrication à un laboratoire de Genève. Je voulais une crème qui conjugue les valeurs traditionnelles de la montagne et les avancées de la recherche galénique. Dans ce domaine, la Suisse est un gage de qualité. »

Une étroite collaboration commence. Cinq mois d’essais seront nécessaires pour obtenir un produit pilote conforme au cahier des charges. « Je souhaitais une formule sans paraben et sans phénoxyéthanol. Une texture onctueuse, fondante et pénétrante, mais aussi filmogène pour obtenir un effet bouclier protecteur. Un parfum, frais et floral. Et enfin une couleur très blanche pour rappeler la neige et sa pureté. » Une fois le prototype validé et approuvé, la production à grande échelle pouvait démarrer, avec 1 000 unités !

Création de Dermacimes, un nouveau laboratoire !

En parallèle, Anne Sauteron coordonne la partie créative de la crème hivernale protectrice qu’elle confie à une agence de communication. Il s’agit de trouver un nom et une identité visuelle qui évoquent à la fois l’efficacité du produit, avec ses vertus soignantes, ainsi que le plaisir d’un soin cosmétique positionné haut de gamme. « Le parcours créatif est semé d’interrogations et de doutes. Finalement, le nom « Baume des Neiges » s’est imposé. Quant au packaging, il affiche un code très graphique, avec un pot noir et blanc. Ce sont des couleurs que l’on n’a pas l’habitude de voir en pharmacie, donc percutantes. » Apparaît également le nom du laboratoire Dermacimes qui est la société qu’Anne Sauteron a créée afin de développer son projet. La signature du laboratoire est d’ailleurs soulignée de cinq petits points (« Un clin d’oeil à mes cinq filles ! »).

Le difficile apprentissage du métier de commercial

En décembre 2008, la commercialisation démarre avec pour cible les pharmacies des stations de ski de Savoie et Haute-Savoie. « J’ai pris des jours de congés pour faire le tour des pharmacies – une cinquantaine – et présenter le produit. En moyenne, une pharmacie sur deux a été séduite et m’a passé commande. L’accueil est très varié. Certains pharmaciens sont enthousiastes et m’encouragent, d’autres non. Endosser le rôle de commercial est un apprentissage difficile, il ne faut pas se décourager ! » Car, pour rentrer dans ses frais, la pharmacienne doit écouler les 1 000 Baumes des Neiges produits. « Mon projet est un autofinancement. Mon prix de vente aux pharmaciens est de 18,70 euros par pot, éventuellement remisé, et je conseille un prix public entre 29 et 36 euros. Je ferai des profits si une autre ligne de fabrication est lancée, en cas de réassorts, mais ce n’était pas mon objectif premier. »

En attendant le premier bilan des ventes, à la fin de la saison, Anne Sauteron espère élargir la distribution du Baume des Neiges à la Suisse, l’Autriche et l’Italie. « Je réfléchis aussi à la mise sur le marché d’une crème solaire minérale. » Développer une gamme, c’est encore un autre défi !

Envie d’essayer ?

Les avantages

– Rencontrer d’autres confrères et découvrir d’autres points de vente, et donc prendre du recul par rapport à son activité de titulaire.

– Relever un défi et réaliser quelque chose d’original et de stimulant représente toujours une satisfaction personnelle et professionnelle.

Les difficultés

– Développer une formule galénique nécessite d’avoir des disponibilités financières ou un sponsor.

– La durée de fabrication est longue. Cette contrainte est à intégrer dès le départ car elle détermine la phase de lancement du produit et la livraison dans les pharmacies.

– « J’ai découvert un nouveau métier, celui de commercial, un peu éreintant et surtout surprenant. L’accueil dans les pharmacies peut être très chaleureux ou, au contraire, glacial. »

Les conseils d’Anne Sauteron

– « Lancez-vous seulement si votre concept est original : pour se positionner sur le marché pléthorique des cosmétiques, il faut se démarquer. Mon idée de départ était de proposer une crème antifroid avec des composants issus de la flore des montagnes. »

« Respectez la législation pharmaceutique : le développement et la commercialisation à grande échelle d’une crème ne relèvent pas de l’activité officinale. C’est pourquoi j’ai créé la société Dermacimes. »

« Exploitez votre carnet d’adresses : pour trouver mes différents prestataires, je n’ai pas fait d’appel d’offres mais j’ai activé mon réseau relationnel. »

– « Osez ! Tant que le projet n’est qu’une idée, les dissuasions sont nombreuses. Pour le concrétiser, il faut faire preuve d’audace et croire en soi ! »