TROIS ÉTAPES POUR AUDITER SON OFFICINE

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Publié le 28 mars 2015
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Passer au crible une qualité de service placée au centre des préoccupations officinales, tel est le rôle dévolu aux « clients mystères ? ». Si la méthode gagne des adeptes, elle doit être pensée et exploitée comme un véritable outil de management.

Les visites mystère s’inscrivent dans la perspective de faire progresser la relation client à l’officine au même titre que le panier moyen ou le CA. L’enjeu est donc essentiel en termes de fidélisation et de ventes additionnelles. « La visite mystère permet d’analyser la prestation servie via des critères prédéfinis, ce qui n’empêche pas de prendre en compte en parallèle le ressenti de l’enquêteur », explique Olivier Coasne, directeur commercial de RecoTC. L’éventail des sujets susceptibles d’être passés en revue est large : environnement extérieur et intérieur de l’officine, affichage des prix et promotions, accueil et prise en charge du client jusqu’à la prise de congé… « La démarche peut concerner une problématique ciblée ou être envisagée comme un baromètre au long cours », précise Jessica Chemali, consultante et directrice d’études Offre Pack client mystère. Mais « elle mesurera les résultats d’une action ou d’une stratégie alors que la réalisation d’un état des lieux, donnant lieu à un plan d’actions, passera plutôt par un questionnaire de satisfaction ? », préconise Gaëlle Menin-Urien, consultante chez Cegos.

Choisir un prestataire et une formule

La plupart des groupements envoient des clients mystère chez leurs adhérents, de manière systématique ou à leur demande. C’est aussi une pratique courante pour les laboratoires dans le cadre du suivi de leur politique merchandising et du conseil produit en officine. Qu’en est-il du côté des indépendants ? A hauteur de 1 000 euros au minimum, « le coût de la mise en place, qui équivaut à celui d’une dizaine de visites, est un frein », note Aurélien Daussy, dirigeant de Qualivox.

Des alternatives existent : la prestation peut ainsi s’inscrire dans le cadre d’un coaching, comme chez Socco Consult, qui met à disposition de ses clients un référentiel clés en main. L’Offre Pack client mystère propose des formules à coût réduit grâce à un référentiel préétabli. La gamme va du pack 10 visites (688 € HT) au pack 72 visites (3 513, 60 €). Certaines CCI proposent des visites mystère à leurs adhérents dans le cadre des démarches qualité, avec des aides au financement possibles.

Déterminer un scénario et une fréquence

L’adhésion préalable de l’équipe à la démarche est indispensable. « Il faut bien lui faire comprendre que le but n’est pas de les fliquer ou de les piéger mais d’améliorer l’organisation de travail », arguë Christian Martin, dirigeant de Socco Consult, qui recommande de les faire participer à la mise en place de la grille d’évaluation. Hors cas particuliers (lire l’interview d’Isabelle Adenot page ci-contre), les visites mystère doivent s’inscrire dans une récurrence pour en tirer parti sur le plan managérial. Une fois par an, par trimestre ou par mois ? « La périodicité sera fonction de ce qui est mesuré », répond Gaëlle Menin-Urien. Elle dépendra aussi du profil et de la taille de l’officine. « Il faut toutefois laisser le temps entre chaque visite de débriefer, d’élaborer des solutions, de les mettre en place et d’en constater les effets », avertit Christian Martin.

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Comme la fréquence, le référentiel d’évaluation doit répondre aux besoins et aux objectifs spécifiques de l’officine, et donc résulter d’une concertation approfondie entre le pharmacien et son prestataire. « Pour être pertinente, une grille doit comprendre au moins 80 points de contrôle et les questions doivent être fermées afin d’éviter toute ambiguïté dans les réponses », indique Christian Martin.

Quant au scénario, il doit correspondre à une situation fréquemment rencontrée sur le terrain. Ce cadre pourra être modulé en fonction des priorités au fil du temps. Des groupements comme Giropharm et Pharmactiv ont ainsi progressivement recentré leur évaluation sur la relation client pure et le conseil, et complexifié leurs scénarios. « Nous sommes passés d’un conseil lié à l’expression de symptômes à un conseil tourné vers le bon usage d’un médicament spontanément demandé, en lien avec une pathologie non exprimée du client mystère », témoigne ainsi Ophélie Soret, chargée de mission qualité chez Giropharm.

Débriefer et valoriser les évolutions

« A l’issue d’une visite mystère, le pharmacien se voit restituer les résultats obtenus vis-à-vis de l’ensemble des critères et un récit détaillé de la visite dont il pourra déduire les points positifs sur lesquels capitaliser et les pistes d’amélioration », explique Olivier Coasne. Le périmètre de la prestation peut aussi inclure des préconisations, voire un plan d’actions.

Dans tous les cas, « le débriefing et la recherche de solutions avec l’équipe sont incontournables », insiste Christian Martin. Chez Pharmactiv, « le pharmacien n’est pas informé a posteriori de la date à laquelle a eu lieu la visite, ni des noms des membres de l’équipe interrogés, pour rester dans le cadre d’une démarche d’amélioration continue collective », précise Diane Cantan, responsable marketing. RecoTC a pour sa part mis en place un « débrief à chaud, qui sera bientôt proposé directement au pharmacien. Il consiste à débriefer la prestation tout de suite après la visite et la saisie de la grille d’évaluation, avec la mise en place immédiate d’actions correctives », fait savoir Olivier Coasne.

Outil d’émulation, « la visite mystère peut donner lieu à des challenges ou au versement de primes liées aux progrès constatés », observe Jessica Chemali. Pour Gaëlle Menin-Urien, cependant, « il faut privilégier les gratifications collectives, et le simple fait de communiquer sur des bons résultats auprès de ses collaborateurs et de les féliciter peut être suffisant ». Le groupement Pharmactiv a choisi par exemple de décerner des diplômes aux officines les mieux notées, diplômes qui peuvent être affichés tantôt côté back-office, tantôt côté… comptoir.