La grande boîte de Pandore

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Publié le 25 octobre 2008
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Une étude réalisée par la FSPF indique que les conditionnements de trois mois vont faire perdre aux pharmaciens 60 millions d’euros de marge en 2008. Cette mesure irrite d’autant plus la profession qu’elle supporte la presque totalité des économies réalisées par l’assurance maladie.

Lorsqu’un traitement est prescrit pour une durée d’au moins trois mois […], et qu’un grand conditionnement est disponible pour le médicament concerné, le pharmacien doit délivrer ledit conditionnement. » Les pharmaciens se souviendront longtemps de l’amendement n° 413 présenté par le député Yves Bur, adopté par l’Assemblée nationale le 22 octobre 2007. Censés faire économiser quelque 170 millions d’euros à la Sécurité sociale, les grands conditionnements grèvent lourdement les comptes des pharmaciens, bien que le nombre de médicaments disponibles en boîtage trimestriel reste à ce jour limité (moins de 10,50 % de l’ensemble des médicaments) et que les résultats escomptés par les pouvoirs publics ne soient pas au rendez-vous.

Plus soumise à la demande croissante des clients sous l’effet des franchises médicales qu’à la nouvelle contrainte réglementaire, la délivrance des boîtes trimestrielles a des conséquences de plus en plus douloureuses sur l’économie de l’officine. « L’effet des franchises médicales de 0,50 euro par boîte exerce une pression sur la demande des consommateurs qui commence à se faire sentir », confirme Claude Japhet, président de l’UNPF. Ils ont pris progressivement connaissance de l’existence des grands conditionnements par leur médecin de famille, par les actions de sensibilisation de la Mutualité française en mars dernier et, plus récemment, en septembre, par la revue Que Choisir (lire encadré page 40).

5 millions de perte par mois pour l’officine

Les pharmaciens n’ont pas le choix. « Ils délivrent les grands conditionnements pour ne pas pénaliser leurs patients », explique Philippe Besset, président de la commission Economie de la FSPF. « Leur pénétration évolue fortement au fil des mois et la perte de marge cumulée sur 12 mois croît de manière exponentielle », s’inquiète-t-il. Au dernier pointage réalisé par le syndicat, la perte de marge pour le réseau, en cumul annuel mobile, est passée de 18 millions d’euros en décembre 2007 à 36 millions en juillet 2008. « Tous les mois, le réseau perd 5 millions supplémentaires. A ce rythme, les 60 millions d’euros de marge en moins seront atteints à la fin de l’année », prévoit-il.

Le résultat est toutefois bien en deçà des 170-180 millions d’euros attendus et du rendement espéré par la tutelle. Dans l’absolu, si l’intégralité des petits conditionnements concernés passait en grands modèles, la perte de marge potentielle atteindrait 276 millions. « Ce fiasco ne me surprend pas, commente Philippe Besset. Pour qu’une mesure d’économie sur le médicament fonctionne, elle doit être juste et répartie équitablement entre tous les acteurs de la chaîne du médicament. Or, la presque totalité de l’économie est réalisée sur le dos de la distribution, et tout particulièrement sur le nôtre ! »

Opposée depuis le début à la mise en place des grands conditionnements, l’USPO fustige de son côté les changements induits par leur arrivée sur le marché : « C’est la mesure la plus inégalitaire que la pharmacie ait eu à supporter depuis longtemps ! », ne décolère pas Gilles Bonnefond, président délégué du syndicat. « Arrêtons cette mascarade ! », tempête à son tour Claude Japhet, au vu de la tournure des événements : accentuation de la baisse de marge, contraintes de surstockage, complexité des renouvellements…

Fausse économie pour la Sécurité sociale

Pour les syndicats officinaux, le gouvernement a monté une usine à gaz dont le rendement, au bout du compte, est très médiocre. Gilles Bonnefond estime qu’il ne dépasse pas 7 %. « Le dossier est pourri depuis le début, il prouve, s’il en était encore besoin, que les mesures prises sur le médicament ne marchent pas. Le gouvernement a commis la même erreur qu’avec les génériques pendant les quinze années qui ont précédé l’octroi du droit de substitution au pharmacien, en décidant de confier le développement du marché des grands conditionnements à l’industrie pharmaceutique et aux médecins », regrette le président délégué de l’USPO.

Ce choix était-il judicieux ? A l’origine, les boîtages trimestriels devaient répondre aux attentes des patients se plaignant de ne pouvoir accéder facilement au renouvellement de leurs traitements chroniques du fait du passage obligé chez le médecin. Une façon aussi de désengorger les cabinets médicaux. En fin de compte, et au dire des syndicats, les grands conditionnements ne semblent pas faire l’unanimité chez les patients. « Encombrants en raison de leur taille plus importante, ils prennent trop de place dans les armoires à pharmacie, explique Gilles Bonnefond. De fait, ils sont souvent rangés ailleurs, dans des conditions pas toujours idéales. »

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Les trois syndicats sont plus que dubitatifs sur le caractère économique de cette mesure pour la Sécurité sociale. « Celle-ci finance des médicaments qui sont stockés trois mois dans les armoires à pharmacie et qui ne sont pas forcément consommés », explique Philippe Besset. « Si le patient arrête son traitement de trois mois avant dix semaines, l’assurance maladie perd de l’argent », maintient Gilles Bonnefond. Et Claude Japhet de condamner à son tour le préjudice financier d’un arrêt prématuré du médicament à la fin du premier mois de traitement : « Avec des présentations en boîte de 28 ou 30, à deux jours près, il ne reste plus d’unités de prise à prendre à la fin du mois. Par contre, plus les conditionnements sont grands, plus le risque de gaspillage est élevé ».

Une « pagaille noire » dans l’observance des traitements

Les boîtages de 90, une fausse bonne idée ? Pour en avoir le coeur net, Philippe Besset demande au gouvernement d’entreprendre des études de consommation des grands conditionnements. « Les analyses permettant de mesurer le poids des petits et des grands conditionnements sont difficiles à réaliser car nous ne connaissons pas la part des traitements prescrits pour six mois, ni le nombre de patients qui changent de traitement à l’intérieur des trois mois », souligne de son côté Gilles Bonnefond.

Sur le plan de la santé publique, les grands conditionnements engendrent la confusion chez certains patients. « Le renouvellement de grands conditionnements risque de se transformer rapidement en une pagaille noire chez les personnes polymédiquées et souffrant de polypathologies, et de faire courir le risque d’un début de surconsommation liée à des demandes injustifiées de patients qui ne savent plus où ils ont rangé leurs boîtes ou quelle quantité il leur reste, redoute Claude Japhet. Comment vont-ils gérer correctement leurs traitements s’ils se retrouvent avec des produits conditionnés tantôt en boîte de 14, 28 ou 30, tantôt en boîte trimestrielle de 84 ou 90 ? »

Gilles Bonnefond soutient que « la confusion engendrée conduit à des renouvellements anticipés et exerce une pression permanente sur les patients qui ont peur de manquer ». Ils se perdent dans le renouvellement de leurs ordonnances, au point pour certains clients, principalement des personnes âgées, de demander à revenir au traitement mensuel.

« Ne délivrer qu’après 6 à 12 mois de traitement »

L’espacement des visites et des renouvellements pose un sérieux problème au contrôle pharmaceutique de l’observance thérapeutique. « En cas de mauvaise observance du patient ayant pris une boîte de 30, le pharmacien est informé de la dérive dès le mois suivant, alors qu’avec un renouvellement tous les trois mois la réaction sera tardive et, dans l’intervalle, l’abandon du traitement pourra être lourd de conséquences pour sa santé », expose Claude Japhet. « Le pharmacien ne peut pas assurer un suivi thérapeutique digne de ce nom s’il est averti d’un arrêt de traitement seulement au bout de trois mois », rajoute Gilles Bonnefond.

Pour Philippe Besset, il faudrait réserver les grands conditionnements à des traitements installés de longue date et ne jamais les délivrer en première intention. « La décision de passer à des grands conditionnements devrait intervenir après six mois à douze mois de mise à l’épreuve du traitement », suggère-t-il. Un avis partagé par Gilles Bonnefond : « Prenons l’exemple des statines où les traitements ne sont stabilisés qu’au bout de deux mois. Délivrer un conditionnement trimestriel d’emblée est une prise de risque importante de gaspillage car, dans cette période d’adaptation, tout peut arriver : un ajustement de la posologie conduisant à un changement de dosage du médicament, l’apparition d’effets secondaires justifiant un arrêt du médicament mal toléré, etc. »

« Les conditionnements trimestriels peuvent présenter un avantage pour les patients soignés pour une « monopathologie » avec un ou deux médicaments, complète Claude Japhet. Mais, pour que ça marche, il faut que les traitements prescrits soient homogènes dans leur durée et dans leur cycle de renouvellement et que tous les produits figurant sur l’ordonnance puissent être dispensés en grand conditionnement. »

Les caisses ne sont pas très regardantes… pour le moment

La vente des grands conditionnements se faisant au détriment de l’économie de l’officine, les syndicats n’ont donné aucun mot d’ordre pour favoriser leur développement. « Si nous l’avions fait, l’assurance maladie aurait eu certainement une mauvaise surprise sur ce que cela lui coûte en définitive », ironise Gilles Bonnefond.

Sur le terrain, les grands conditionnements restent globalement boudés par les pharmaciens. « Du coup, des conflits larvés peuvent exister localement entre les caisses primaires et les pharmaciens qui ne jouent pas le jeu mais ce type de problème n’est pas encore remonté au niveau de la commission paritaire nationale », assure Philippe Besset.

« Dès la mise en place de la mesure, nous avons prévenu nos interlocuteurs de la Caisse nationale d’assurance maladie que la profession n’accepterait pas d’être sanctionnée en cas de poursuite de la délivrance des conditionnements mensuels », avertit Claude Japhet. Et Gilles Bonnefond de compléter : « Nous n’avons pas envie que des guérillas se déclenchent ici et là entre les caisses locales et les pharmaciens pour une mesure qui n’est pas bonne. » L’USPO a demandé aux caisses primaires de ne pas mettre l’accent sur les ventes de grands conditionnements lors des contrôles de ses agents dans les officines. De fait, à ce jour, les caisses ne cherchent pas vraiment à contrôler la dispensation sous conditionnements trimestriels. Sauf dans les cas de pharmaciens par ailleurs soupçonnés de fraude.

La FSPF souhaite renégocier la marge sur les grands conditionnements dans le cadre d’une refonte totale du mode de rémunération du pharmacien. « On ne peut plus remplacer spécifiquement une mesure par une autre, le changement ne peut s’envisager qu’au travers d’une approche globale de notre rémunération », réclame Philippe Besset, qui dénonce le stratagème du gouvernement : « On sent bien qu’il essaie de créer des niches et de trouver des esquives pour profiter de la structure de notre rémunération. Il en résulte une accumulation de mesures qui nous déstabilisent, alors que les confrères ont plus que jamais besoin d’une visibilité économique. »

Partager la baisse de marge avec les industriels et les grossistes

Demander une remise à plat de la rémunération est un risque « non maîtrisé » que l’USPO ne souhaite pas faire courir à la profession. « C’est faire preuve de naïveté syndicale que de croire que des négociations sont possibles, à un moment où l’Etat cherche toutes les semaines 400 à 500 millions d’euros pour rééquilibrer les comptes, souligne Gilles Bonnefond. Ceux qui demandent à aller à la table des négociations devront avoir l’assurance que leur objectif est de récupérer des économies, pas d’en laisser d’autres. »

Pour sa part, l’USPO demande le gel des classes thérapeutiques concernées par les grands conditionnements et un rééquilibrage des économies de manière à ce qu’elles ne pèsent plus sur le seul réseau de distribution. Claude Japhet souhaite, lui, que l’on substitue au dispositif actuel un mécanisme d’incitation financière, comme pour le générique. « Le pharmacien peut devenir le promoteur de ces médicaments mais cela ne doit pas inciter à consommer plus, l’objectif n’est pas de gagner plus en délivrant plus. »

« Puisqu’on nous demande une fois de plus de faire de gros efforts, nous préférons accompagner des faits sans doute inéluctables plutôt que de les subir plus tard, mais nous avons bien conscience que nous n’allons pas nous faire que des amis », poursuit Catherine Morel, vice-présidente de l’UNPF, pour justifier la proposition de son syndicat de favoriser une pénétration plus importante des grands conditionnements. Les pharmaciens, en expliquant la mesure aux patients, seraient les fers de lance de cette action. Comme ils l’ont fait avec les génériques. Les grands conditionnements qui représentent aujourd’hui 4 % (CA et volume) sur les classes thérapeutiques concernées pourraient au maximum permettre de réaliser 130 millions d’économies. Mais la proposition de l’UNPF a aussi un goût de donnant-donnant. « Nous ne pourrons accepter ce développement qu’à condition d’avoir un engagement pérenne en face et un partage de la baisse de marge [environ 30 %, NdlR] entre l’industrie pharmaceutique, les grossistes-répartiteurs et l’officine », conclut Catherine Morel.

14 fois plus de grands conditionnements vendus en 2 ans

Etude Ospharm sur les grands conditionnemens

La pénétration des grands conditionnements s’accélère. Selon les données recueillies auprès de 1 500 officines par Ospharm, ils représentaient sur les 6 derniers mois (en cumul mobile à août 2008) 5,6 % du volume des anticholestérolémiants (vs 3,8 % sur 12 mois), 14,84 % de leur CA (vs 10,6 %) et 11,1 % (vs 7,8 %) de la marge de ces traitements. La perte de marge s’est aggravée : – 2,8 % sur l’ensemble des anticholestérolémiants !

Même phénomène avec les antidiabétiques. Les grands conditionnements ont représenté 5,6 % en cumul mobile sur six mois, à août 2008, soit 8,3 % de leur CA et 8 % de la marge. En revanche, la perte de marge sur l’ensemble des antidiabétiques est un peu moindre sur ces 6 mois (- 1 %) que sur un an (- 1,2 %).

Une perte de marge de 60 millions

Etude Ospharm sur les grands conditionnements

Dans l’ostéoporose, la part des grands conditionnements continue de croître sensiblement sur les six derniers mois malgré une pénétration déjà très forte sur un an : ils représentaient, en cumul mobile à août 2008, 8,9 % des volumes, 32,5 % du CA et 23 % de la marge.

Les traitements contre l’hypertension ne font pas exception à la règle, les grands conditionnements y continuent leur progression : sur 6 mois, à août 2008, ils représentaient cette fois-ci 4,3 % des volumes (en cumul mobile), 14 % du CA et 9,8 % de la marge. La perte de marge sur les anti-HTA est en revanche ici plus modérée que sur un an : – 0,7 %.

Actonel fut le premier produit à sortir en conditionnement trimestriel (12 cp). Un avant-goût du taux de pénétration que pourront atteindre les autres gros boîtages !

Etude Ospharm sur les grands conditionnements

Le Loxen est un exemple de spécialité très vendue dont le passage en boîtes de trois mois (180 cp) lui fait sauter une tranche de marge.

Au contraire, Orocal est une spécialité qui reste dans la première tranche de marge malgré l’apparition de conditionnement de 180 comprimés.

7 600 euros de marge en moins !

Selon KPMG, la multiplication des grands conditionnements se traduit par une baisse de la marge de 22,47 % par rapport aux boîtes de un mois. Explications.

KPMG a chiffré l’impact qu’auront les grands conditionnements pour chaque officine. Pour une officine de 1,4 MÛ de CA (dont 1,23 MÛ en médicaments remboursables), la perte de CA est estimée à 9 000 Euro(s) et la perte de marge à 7 600 Euro(s). Il s’ensuit une chute du taux de marge sur le vigneté de 0,42 point. Avec une pharmacie plus importante (CA de 2,2 MÛ) mais dont l’activité est en proportion moins dépendante du médicament remboursable (CA de 1,8 MÛ), les pertes estimées sont de 13 000 Euro(s) sur le CA et de 11 100 Euro(s) sur la marge.

En regardant de plus près, KPMG constate que la baisse du prix d’achat pharmacien est comprise pour la grande majorité des produits entre 0 % et 2 % et atteint au maximum 10 à 15 %. Les grands conditionnements sont moins pénalisants avec les génériques qu’avec les princeps. Sur les 20 génériques étudiés, « l’incidence des grands conditionnements sur le chiffre d’affaires et la marge de l’officine est plus faible », rapporte Yannick Piljean, expert-comptable chez KPMG Ouest et auteur de l’étude.

Passage fréquent à une tranche supérieure de MDL

Pour les princeps concernés, la perte de CA et de marge est conditionnée par leur prix d’achat et le franchissement éventuel d’une tranche de MDL moins rémunératrice pour le pharmacien. 20 d’entre eux, dont le PFHT est inférieur à 22,90 Euro(s), passent dans la tranche supérieure en grand conditionnement. « Ce changement entraîne pour le pharmacien une modification de sa rémunération de 26,10 % à 10 % de taux de marge, en plus de l’abandon de 0,53 Euro(s) par boîte perdue (1 fois au lieu de 3), calcule Yannick Piljean. Pour ces 20 produits, les pertes de CA et de marge dépassent respectivement 12 % et 40 %. Par contre, pour les 30 princeps qui restent rémunérés dans la même tranche de MDL qu’antérieurement, la perte de CA et de marge se situe entre 10 % et 13 % en règle générale. »

« Les grands conditionnements, au-delà de la perte de marge, peuvent entraîner une baisse partielle de fréquentation, avec ses conséquences sur les ventes de produits conseil », conclut Yannick Piljean. Un mauvais coup double qui risque d’amplifier les pertes !

La pharmacie supporte 82 % de la baisse de prix

L’analyse de la FSPF des gains et pertes de marge sur la vente de l’antihypertenseur Hytacand en boîte de 90 à la place de trois boîtes de 30 est édifiante. Les six acteurs concernés ne sont pas tous logés à la même enseigne. L’industrie pharmaceutique sort indemne du passage au grand conditionnement puisqu’elle ne subit aucun préjudice financier de la baisse de 7,30 Euro(s) du prix TTC de la boîte de 90 de cette spécialité. Deux acteurs sont gagnants : la Sécurité sociale récupère 65 % de la baisse de prix public (soit 4,75 Euro(s)) et la complémentaire 35 % (soit 2,56 Euro(s)). Claude Japhet, président de l’UNPF, considère que l’industrie est gagnante dès lors qu’elle vend un médicament qui ne sera pas entièrement consommé.

Les trois perdants sont la pharmacie, qui participe pour 82 % à la baisse du prix public et perd donc 5,97 Euro(s) (plus que n’en récupère la Sécurité sociale !), le grossiste, pour 16 %, et l’Etat pour 2 % (par le biais de la baisse de TVA). Les trois syndicats de pharmaciens demandent donc à ce que la baisse globale de prix TTC soit répartie plus équitablement entre les 6 acteurs.

« Que Choisir » met les pharmaciens en boîte

« A raison de 50 centimes par boîte, les franchises coûtent cher », particulièrement pour les patients chroniques, constate Que Choisir dans son numéro de septembre. La revue exhorte donc les consom-mateurs « à exiger des boîtes de trois mois », assurant que l’économie générée peut atteindre 10 Euro(s) par mois pour certains médicaments. Aussi invite-t-il le lecteur à consulter la liste des 350 spécialités disponibles mise en ligne sur son site.

Une nouvelle fois, Que Choisir ne fait pas de cadeaux aux pharmaciens qu’il fait passer pour d’affreux mercantiles qui se gardent bien de délivrer des grosses boîtes ou de mentionner leur existence parce qu’ils n’y ont pas intérêt économiquement. Il dénonce leur « blocage », expliquant qu’ils touchent un forfait pour chaque boîte vendue et que leur marge peut diminuer quand le prix du médicament augmente.

« Vous avez réalisé des efforts significatifs »

5 questions au Dr Monique Weber, responsable du département des produits de santé à la CNAMTS.

Comment ont évolué les remboursements de grands conditionnements en 2008 ?

Dans les classes où la délivrance de conditionnements trimestriels est autorisée, la part de ces grands conditionnements est passée de 5 à 16 % en un an. Elle atteint même 45 % parmi les antiostéoporotiques, pour lesquels la taille raisonnable des boîtes (12 comprimés) favorise la délivrance des conditionnements trimestriels. La progression est également sensible dans d’autres classes : la part des grands conditionnements a dépassé 18 % pour les antidiabétiques oraux et les hypolipémiants.

Les pharmaciens rechignent-ils à délivrer des grands conditionnements ?

En 2008, ils ont réalisé des efforts significatifs. Les grands conditionnements contribuent à une meilleure maîtrise des dépenses et, pour le patient, c’est à la fois plus économique et plus pratique. En outre, la continuité du traitement est mieux assurée, en évitant au patient de retourner chaque mois à l’officine avec le risque de manquer de médicaments au moment d’un renouvellement.

Quelle est l’attitude des caisses à l’égard des « mauvais élèves » ?

C’est un sujet sur lequel nous échangeons régulièrement avec les représentants des pharmaciens. La CNAM s’assure, de manière générale, du respect par les pharmaciens de la réglementation et notamment des modalités de délivrance des traitements. Les grands conditionnements en font partie au même titre que les règles afférentes aux durées de traitement. En cas d’abus, les pharmaciens s’exposent à des sanctions.

Dans le cadre d’une initiation de traitement, le fait de délivrer 30 jours au lieu de 90 jours d’emblée déroge-t-il à la règle du conditionnement le plus économique dans la mesure où il y a toujours un risque d’arrêt ou de modification de traitement ?

La règle des grands conditionnements est faite pour les traitements installés et continus. En cas d’initiation de traitement, il est préférable d’opter pour une délivrance plus courte, qui permet de vérifier les éventuels effets indésirables ou d’ajuster la posologie.

Les médecins prescrivent-ils des grands conditionnements ? Et la CNAM informe-t-elle les assurés de leur existence ?

En cas de traitement au long cours, le médecin peut prescrire, s’il le juge utile, des traitements renouvelables jusqu’à 1 an. Lorsque le traitement est prescrit pour au moins trois mois, le pharmacien délivre le grand conditionnement dès lors que celui-ci existe. L’Assurance maladie s’attache à informer les assurés de l’existence de grands conditionnements pour certains traitements, via son site Ameli.fr notamment.

Propos recueillis par François Pouzaud