Clients : Les cracks de l’arnaque
L’officine n’échappe pas aux arnaques. Les techniques sont variées et parfois même spécifiques à l’officine. Revue de détails et parades.
Au comptoir, les arnaqueurs ne manquent pas d’imagination pour vous extorquer des produits de dermocosmétique, du lait pour bébé et même des médicaments dûment vignetés ! Vol pur et simple en rayon, demande de remboursement d’un produit volé ou acheté ailleurs, demande de troc… les cas de figure sont nombreux, mais le pourcentage d’arnaqueurs reste, heureusement, assez rare à en croire vos expériences.
« Toutes les officines sont confrontées un jour où l’autre à ce type de comportement, remarque Bertrand Fournajoux titulaire à Montpellier, Mais les cas restent exceptionnels. Parfois, les clients qui rapportent des produits qui ne leur conviennent pas sont tout à fait de bonne foi et lorsqu’on leur fait remarquer qu’ils ne l’ont pas acheté dans notre officine, ils avouent ne plus se souvenir, mais être clients réguliers. »
La demande de remboursement, et plus particulièrement celle d’un produit de parapharmacie, est l’une des requêtes les plus fréquentes. « Un jour un vieux monsieur distingué s’est présenté au comptoir muni d’un lot de deux produits minceur. Il nous a assuré que la personne qui lui avait vendu lui avait expliqué que si ça ne marchait pas, il pouvait ramener les boîtes. Comme nous sommes trois et que nous travaillons deux par deux, il manquait effectivement l’une de mes collaboratrices. J’étais pratiquement certaine qu’elle n’avait pu lui proposer un tel échange, mais n’ayant pas de preuve, je lui ai proposé de repasser le lendemain, jour où elle travaillait. Il a alors rétorqué qu’il était de passage et reprenait l’avion le soir même… J’ai donc obtempéré à contrecoeur. Après son départ, j’ai regardé le stock et me suis aperçu que nous n’avions jamais vendu le fameux pack », raconte Françoise, titulaire dans les Hauts-de-Seine. Dans le domaine, certains confrères ont pu constater une pratique très ingénieuse : le client supposé vient se faire rembourser ou échanger un produit soi-disant acheté dans l’officine. Mais en réalité, cette personne se présente au comptoir avec un produit qu’elle vient juste de subtiliser dans vos rayons.
« Flag » et suspicion.
Reste encore à prendre le ou la cliente sur le fait. Pas simple non plus de réagir lorsque c’est un autre client, témoin du vol qui vous en fait le récit. « Cela nous est arrivé une fois, déclare ce titulaire qui préfère garder l’anonymat. Nous n’avons pas pu, comme cela est le cas lorsque nous prenons le voleur sur le fait, demander à la cliente mise en cause de vider son sac, mais depuis, lorsqu’elle entre dans l’officine, car elle vient encore régulièrement, nous la surveillons de près. »
Peu banal l’expérience de Bernard Durand titulaire à Paris à qui l’on a demandé de remplacer un médicament prescrit par un produit de parapharmacie sans débourser un centime en arguant du fait que le prix était le même ! Les clients indélicats qui oublient leur carte Vitale et à qui vous ne comptez que le tiers payant et dont vous attendez, en vain, le retour sont aussi relativement nombreux. « C’est surtout pour les vaccins, note ce titulaire. Des clients réguliers qui nous doivent cinq ou sept euros, préfèrent ne plus revenir que de payer leur dette ! », ajoute-t-il.
La falsification d’ordonnances est aussi monnaie courante. Les anxiolytiques arrivent en tête. Les clients « accros » modifient eux-mêmes la prescription, le 1/j devenant 2/j. Et, certains clients n’hésitent pas à se présenter au comptoir muni d’une ordonnance pour un médicament qu’il dise avoir acheté avant de se le faire prescrire. Ils demandent alors le remboursement du ticket modérateur d’une boîte de médicament sortie d’une autre pharmacie.
La parade.
Confronté au troc de produits à plusieurs reprises, en particulier pour les produits de parapharmacie exposés dans l’espace public, Bernard Durand a finalement mis en place un étiquetage spécifique. « Non seulement mes étiquettes de prix sur chaque produit comportent le nom de l’officine, mais nous notons les numéros de lots et les dates de péremption des produits en rayon, ce qui nous permet déjà de vérifier que le produit ramené vient bien de chez nous, explique-t-il. Utiliser systématiquement le ticket de caisse pourrait aussi être dissuasif. »
Pour ce titulaire, ce type d’arnaque est sans doute plus fréquent qu’on ne le pense et la meilleure prévention reste la fermeté en cas de flagrant délit. « J’ai communiqué très clairement auprès de mes collaborateurs et nous avons une parade pour refuser les échanges douteux. Nous nous retranchons derrière la législation qui nous interdit, en particulier en diététique, de reprendre un produit qui a échappé à notre surveillance. » Un moyen de dissuader les demandes récurrentes de la part des clients coutumiers du fait.
D’autres risques sont inhérents au mode de paiement : centimes ou francs mélangés aux euros, faux billets, chèques volés, ne sont pas légion mais ils sont susceptibles d’arriver jusqu’à votre caisse. Pour les billets de 50 euros, le détecteur de faux billet apparaît comme l’arme la plus probante.
Reste la possibilité d’installer une vidéosurveillance. Peu efficace s’il s’agit de dédier un salarié à la surveillance de l’écran, elle a cependant quelques vertus dissuasives surtout lorsque les caméras sont bien visibles dans les rayons. Quelques clients pourtant apprécient peu ce type de matériel, le trouvant déplacé dans une pharmacie.
Côté assurance, peu de recours sont possibles puisqu’en principe, le vol à l’étalage, le vol en rayon ou plus généralement la disparition inexpliquée de produits ne sont pas compris dans les contrats d’assurance. Alors ouvrez l’oeil.
Vos droits en cas de flagrant délit
– Les recours, hors de la plainte au commissariat en ville ou à la gendarmerie à la campagne, sont quasi inexistants et dépendent exclusivement du bon vouloir du client pris sur le fait ou suspecté.
– Sans son assentiment, il vous est absolument interdit de fouiller le sac d’un client, de lui demander ses papiers d’identité ou même de le retenir dans l’officine contre son gré si vous appelez la police.
– En revanche, rien ne vous empêche de lui demander d’ouvrir son sac, au risque d’essuyer un refus contre lequel vous ne pourrez rien. À vous ensuite, d’estimer, selon le comportement de la personne, les risques encourus notamment vis-à-vis d’éventuelles violences.
– Si vous portez plainte, – mais le jeu en vaut-il la chandelle? – une vérification sera systématiquement faite pour savoir si la personne incriminée a déjà fait l’objet de poursuites. Elle sera systématiquement entendue par les officiers de police ou les gendarmes qui peuvent alors procéder à une perquisition s’il la juge nécessaire
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