Flux financiers : Suivre sa trésorerie à la trace

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Publié le 25 septembre 2004
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Il est vivement conseillé de demander à son expert-comptable le tableau des flux financiers de l’exercice écoulé. Son analyse est riche d’enseignements sur la santé des comptes, même s’il n’est pas classé dans les documents comptables obligatoires.

Le pharmacien d’officine prête une attention toute particulière à la lecture des comptes annuels composés de trois documents indissociables et obligatoires : le bilan, le compte de résultat et l’annexe. Le bilan donne la photographie du patrimoine de l’entreprise à un instant donné : les actifs et les passifs. Le compte de résultat, plus facile d’accès, retrace tous les produits et toutes les charges de l’officine et mesure la performance économique sur une période. Enfin, l’annexe comporte, en théorie, les informations nécessaires à la compréhension des comptes et met en évidence tout fait significatif ayant influencé le patrimoine, la situation financière et le résultat de l’officine. Mais il existe un autre document de gestion, non obligatoire celui-là, et pourtant riche d’enseignements sur les mécanismes de l’entreprise : il s’agit du tableau des flux financiers.

« Lorsque le pharmacien établit son plan de financement, au moment de son installation, le tableau des flux financiers prévisionnels est, après le compte de résultat, le document le plus essentiel, estime Olivier Delétoille, expert-comptable (cabinet Arythma), puisqu’il permettra de s’assurer que le projet passera ou ne passera pas en termes de trésorerie sur la durée des emprunts sollicités. »

Les flux essentiels.

Ainsi, sur une année, l’évolution du patrimoine d’un bilan à l’autre peut s’analyser en flux de différentes natures. Le flux fondamental à prendre en compte est l’EBE (excédent brut d’exploitation). « En théorie, il devrait se retrouver en trésorerie si l’activité ne se traduisait pas par des modifications dans le besoin en fonds de roulement, c’est-à-dire dans les décalages sur encaissements liés à l’exploitation et aux autres flux », précise Olivier Delétoille. De plus, « en une année d’activité, le pharmacien est parfois conduit à investir (en matériel, en agencements…) et à souscrire éventuellement un emprunt. Par ailleurs, il doit rembourser ses anciens emprunts. Enfin, il est naturel que le titulaire, lorsqu’il exploite en entreprise individuelle par exemple, opère des prélèvements dans la pharmacie pour vivre. »

Chercher les bénéfices.

Olivier Delétoille fait remarquer qu’en définitive, le bilan et le compte de résultat ne répondent pas à une question fondamentale : où est passé le bénéfice d’une année d’exploitation ? « Seul le tableau des flux financiers apporte une réponse précise à cette interrogation », affirme-t-il. Pour mieux comprendre la circulation de ces flux, le cabinet Arythma a retenu l’exemple d’un tableau des flux financiers des deux premières années d’un jeune pharmacien nouvellement installé. Les comptes de résultat et les situations financières successives (au démarrage et à la clôture des deux premiers exercices) sont présentés ci-dessus et ci-contre.

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La lecture de ces deux tableaux doit interpeller le pharmacien au niveau des deux lignes du résultat net comptable et de la trésorerie comptable, et de leurs évolutions respectives au cours de l’exercice 2004 par rapport à 2003. Olivier Delétoille pose une question importante : « Comment expliquer qu’avec un résultat de 64 mEuro(s) et 74 mEuro(s) pour les deux premières années d’exploitation, la trésorerie ne soit plus respectivement que de 20 mEuro(s)et 23 mEuro(s) en fin de période ? » Et de donner la clé du problème : « Le tableau des flux financiers va résoudre précisément cette énigme. »

Les informations à la source.

Au démarrage, la trésorerie disponible de 40 mEuro(s) est constituée par la différence des financements à long terme (emprunt sollicité pour 850 mEuro(s) et apports de l’exploitant pour 250 mEuro(s)) et les investissements s’élevant à 1 060 mEuro(s) (fonds de commerce pour 950 mEuro(s), les matériels et agencements pour 50 mEuro(s) et les frais d’établissement pour 60 mEuro(s)). Le financement du BFR (besoin en fonds de roulement) « immobilise » 20 mEuro(s) la première année en 2003 et l’accroissement du BFR «immobilise » à nouveau 5 mEuro(s) (25 mEuro(s) – 20 mEuro(s)) en 2004.

Les deux premières années d’exploitation de l’officine permettent de dégager du « cash » que l’on retrouve au niveau de l’EBE. L’EBE est utilisé en priorité au remboursement de l’emprunt (les annuités, intérêts et capital, sont déboursées annuellement). Les investissements de 5 mEuro(s) en 2004 sont autofinancés par l’officine (c’est-à-dire qu’il n’y a pas eu de recours à l’emprunt).

Le titulaire prélève respectivement 34 mEuro(s) en 2003 et 29 mEuro(s) en 2004 « pour vivre » (attention, il convient de s’assurer qu’au-delà de ces prélèvements, les autres revenus et l’impôt sur le revenu sont correctement appréhendés pour se forger une idée précise des revenus nets du ménage !).

Il est aussi intéressant de mesurer ici la différence entre le niveau des résultats comptables dégagés (65 mEuro(s) et 74 mEuro(s)) et de les comparer aux prélèvements que le titulaire peut s’autoriser (34 mEuro(s) et 29 mEuro(s)). Le décalage montre bien que le résultat comptable (et imposable !) n’est pas le résultat que l’on peut réellement prélever.

A retenir

– Le fonds de roulement (FR), c’est l’excédent des capitaux permanents (capitaux propres et dettes à caractères financiers) sur les immobilisations (biens stables : immeuble, agencements, matériels…). Il est structurellement positif. La valeur du FR représente donc l’excédent de capitaux qui reste à la disposition du pharmacien pour faire face aux besoins en trésorerie nés de l’exercice de son activité quotidienne.

FR = capitaux permanents – emplois permanents.

– Le BFR : le besoin en fonds de roulement correspond au solde de décalage de paiement. Il s’obtient en faisant la différence entre l’actif circulant (dont les décalages de paiement défavorables) et les décalages de paiement favorables du passif. Ce solde est très souvent négatif. BFR = besoins de financement d’exploitation – ressources d’exploitation.

– La trésorerie, à la clôture du bilan dépend directement du niveau du FR et du BFR. Trésorerie = FR – BFR.