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Ma pharmacie est dans le rouge
Une trésorerie qui baisse un peu plus chaque mois, des fournisseurs qui montrent des signes d’impatience pour se faire régler, le banquier qui se livre à du harcèlement… Si vous vous trouvez dans cette situation, il est grand temps de réagir. D’abord en diagnostiquant les causes.
La conjoncture n’est pas fameuse et, comme beaucoup d’entreprises, les pharmacies n’échappent pas à la crise. C’est pourquoi, plus que jamais, les officinaux se doivent d’être extrêmement vigilants sur leurs indicateurs financiers, spécialement sur la trésorerie, excellent reflet de la santé d’une entreprise. « En général, la trésorerie se dégrade de manière sournoise, jusqu’à dépasser de façon permanente le découvert autorisé », observe Philippe Becker, directeur du département pharmacie chez Fiducial. Dès la première alerte, il faut donc réagir.
Faire un diagnostic précoce des causes
Si la trésorerie est dans le rouge, il faut prendre des mesures pour enrayer la tendance. Mais les actions « clés en main », comme les présentent parfois certains, ne sont jamais des remèdes miracle. C’est pourquoi, avant toute décision, il convient de faire un diagnostic précis des causes qui ont conduit la pharmacie dans le rouge. « On se place en quelque sorte dans un parcours de santé où il faut d’abord repérer les symptômes, puis établir le diagnostic, ensuite prescrire puis bien prendre le traitement », résume Philippe Becker. Et si cet expert-comptable est convaincu que chaque cas doit être abordé de façon particulière, il se risque toutefois à avancer quelques pistes de causes les plus souvent observées. « Le premier élément à incriminer lorsque l’on se retrouve en panne de trésorerie est bien souvent un prix d’achat trop élevé dans un contexte de manque de fonds propres, spécialement chez les primo-accédants. Cette situation se vérifie encore plus actuellement où les acquéreurs ont parié sur des niveaux de croissance de chiffre d’affaires qui ne se réalisent que très rarement », explique Philippe Becker.
Autre facteur de « dégringolade » : un décalage entre le niveau de prélèvement et les capacités financières de l’officine. « Souvent, le niveau de prélèvement est trop important par rapport aux revenus de la pharmacie. On se retrouve donc face à une inadéquation totale entre les besoins du pharmacien et la capacité financière de l’officine », commente Philippe Becker. De même, une mauvaise gestion des stocks et/ou de fausses prévisions sur le montant des charges fiscales et sociales conduisent souvent les officinaux à faire face à des difficultés financières. Enfin, le manque de maîtrise des frais de personnel (effectifs surdimensionnés par rapport aux besoins…) compte souvent parmi les raisons qui expliquent la baisse de trésorerie.
Administrer des remèdes au cas par cas
Une fois bien isolés les éléments qui ont conduit la pharmacie dans le rouge, il est temps de lui administrer des « remèdes ». Là encore les solutions doivent être pensées et déployées au cas par cas. D’autant plus si la pathologie est multiple. Toutefois, lorsque l’on doit faire face à un manque de fonds propres, il s’agit le plus souvent de tenter une renégociation avec son banquier. « Face à des échéances devenues trop lourdes, quand on a surestimé le prix d’achat et les résultats de la pharmacie, il faut souvent réétaler la durée des emprunts et le découvert sur une plus longue période, souvent douze ans, indique Philippe Becker, qui met toutefois en garde : Le découvert n’est pas un mode de gestion, et s’il est par ailleurs possible de demander un nouvel échelonnement de la dette, il faut que l’officine ait été acquise depuis au moins trois ou quatre ans. » Dans le même esprit, la renégociation des prêts personnels est de mise si le salaire que peut s’octroyer le pharmacien ne lui permet plus de boucler son budget familial.
Quant à une gestion des stocks trop hasardeuse, nombreux sont aujourd’hui les outils à disposition des officines. Mais aucun outil ne remplacera une négociation sérieuse avec les fournisseurs. C’est pourquoi, en ces temps où chaque centime compte, bien préparer la visite des fournisseurs en ayant parfaitement analysé ses besoins, ses priorités et ses capacités financières est un préalable indispensable.
Reste la gestion des charges, qui, souvent, demande un peu plus de doigté et l’intervention d’un spécialiste. « En la matière, la bonne posture est l’anticipation. Les experts-comptables ont des outils pour cela. Ils peuvent conseiller leurs clients sur des montages juridiques spécifiques ou d’autres actions afin de faire en sorte que la fiscalité soit plus facile à vivre », assure Philippe Becker.
Revoir sa politique d’embauche
Enfin, l’anticipation est aussi la règle pour éviter de crouler définitivement sous les frais de personnel. « Certaines pharmacies arrivent à trouver de bons ratios de productivité, mais, avec la crise, ces derniers deviennent de moins en moins efficaces. Donc, il convient désormais de s’interroger sur la pertinence d’une embauche, et ce bien en amont afin de déterminer si un temps partiel ou un apprenti ne pourrait pas être une solution judicieuse et moins onéreuse qu’un contrat à durée indéterminée. Avant toute nouvelle embauche, il faut également penser à une réorganisation des postes et des tâches. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas embaucher, mais qu’il faut créer ou remplacer les bons postes », prévient l’expert-comptable.
Mandat ad hoc ou procédure de sauvegarde ?
Si, de façon générale, les officinaux trouvent les moyens de sortir d’une mauvaise passe financière, de plus en plus n’hésitent pas à solliciter une aide auprès du tribunal de commerce via le mandat ad hoc ou la procédure de sauvegarde. « Lorsque l’on souhaite renégocier avec certains fournisseurs ou administrations, le mandat ad hoc est très efficace et discret. Le tribunal de commerce nomme alors un mandataire qui assiste le chef d’entreprise dans ses négociations pour parvenir à une conclusion amiable. C’est une procédure très adaptée lorsque le dirigeant agit très en amont des difficultés, et c’est une procédure ciblée sur un ou deux objectifs de renégociation », explique Marcel Sengelin, président du tribunal de commerce de Lyon. En revanche, lorsqu’il s’agit de rééchelonner l’ensemble des créances, la sauvegarde prend le relais du mandat ad hoc. Comme ce dernier, elle découle d’une démarche volontaire du dirigeant et elle vise une structure qui n’est pas en état de cessation de paiement. « La procédure de sauvegarde permet de geler toutes les créances. Elle ouvre une période d’observation qui va permettre au dirigeant de définir un plan de sauvegarde qui prévoit le rééchelonnement de la dette. Dans ce cadre, le chef d’entreprise est accompagné dans les négociations par un juge-commissaire, dont le rôle est de veiller au déroulement de la procédure et à la protection des intérêts en présence, par un administrateur judiciaire, chargé de surveiller l’exploitation, et par un mandataire judiciaire, représentant les créanciers », précise le président du tribunal de commerce. Reste que, contrairement au mandat ad hoc, la sauvegarde est publique, ce qui parfois fait hésiter les dirigeants. Des hésitations qui souvent conduisent l’entreprise au redressement, faute d’avoir agi dès les premières difficultés. « Une sauvegarde réussie est une sauvegarde bien préparée et sollicitée en amont de la cessation de paiement », insiste Marcel Sengelin, qui précise que toute pharmacie placée sous le régime de la sauvegarde fait l’objet d’une notification à l’Ordre.
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