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4 raisons de faire des rétrocessions
En dépit des offres des groupements, et plus récemment des centrales d’achat pharmaceutiques, la pratique des rétrocessions rencontre toujours un vif succès auprès des pharmaciens. Qu’est-ce qui les attire ? Témoignages.
1. Obtenir de meilleurs délais.…
Titulaire depuis quelques mois de la pharmacie anglaise à Deauville, Olivier Klein entre dans la saison morte de la station balnéaire. Sa pharmacie, à forte activité saisonnière, réalise une part importante de son chiffre d’affaires en produits de parapharmacie et en médicaments non remboursables. Or, le ralentissement des ventes risque de créer des problèmes d’écoulement de stocks… et de trésorerie. Pour ne pas connaître trop vite des difficultés de trésorerie, il pratique les rétrocessions avec un groupe informel de pharmaciens du Havre et du Calvados. Avantage ? « Les rétrocessions me permettent de gagner plusieurs semaines de délais de paiement dans des périodes critiques. Un règlement à 120 jours plutôt qu’à 45 jours fin de mois est plus précieux que de gagner quelques points de remises », confie-t-il. En contrepartie, l’officinal fait profiter ses confrères des remises qu’il obtient comme client fidèle de deux gros laboratoires de parapharmacie.
2. Mieux négocier les conditions …
Pour le pharmacien normand, la rétrocession présente d’autres atouts. Lorsqu’il était cotitulaire de la pharmacie du Grand Cap, située au centre commercial Auchan-Mont Gaillard (Le Havre), il avait monté un groupement d’intérêt économique (GIE) en compagnie de cinq autres pharmacies de la région pour mieux négocier avec les laboratoires. Cette structure disposait de six administrateurs, toutes personnes morales (SEL) représentées par leurs titulaires, qui avaient adopté une discipline de groupe. « Les six pharmacies donnaient l’exclusivité de leurs achats et de la mise en avant sur les linéaires aux produits des 17 laboratoires partenaires qui avaient passé contrat avec le GIE en 2009 en échange de meilleures remises commerciales. » Respect de la loi Chatel oblige, les remises directes, RFA et autres marges arrière allaient directement au GIE, et non dans la poche des pharmaciens.
Autre exemple de rétrocession réussie, Tuan Nguyen-Khoa, pharmacienne à Maisons-Alfort (94), groupe ses achats de dentifrices Fluocaril, mais aussi de produits conseils et grand public du laboratoire Boehringer avec deux autres pharmacies. Or, l’officinale obtient, avec ces rétrocessions, de meilleures conditions commerciales qu’au travers de son groupement ou de sa centrale d’achat pharmaceutique. « L’offre de la centrale ne concerne pas les produits leaders de la marque, cela ne présente donc pas d’intérêt », explique-t-elle. La rétrocession rapporte des remises intéressantes et son officine dispose de la meilleure capacité d’achat. Elle se charge donc de centraliser les commandes, de passer les ordres d’achats et de refacturer ensuite aux deux autres pharmacies.
3. Générer des profits pour dynamiser…
Les pharmaciens du GIE, monté par Olivier Klein, se réunissaient quatre fois dans l’année pour discuter du référencement des laboratoires, décider de nouvelles actions, faire un point sur la situation financière du groupement. Dans ce GIE, les économies dégagées grâce aux conditions commerciales obtenues étaient alors réinvesties dans des actions marketing, merchandising ou de formation afin de dynamiser les points de vente. Ainsi, le GIE, se souvient Olivier Klein, « employait une esthéticienne qui tournait sur les six pharmacies. La structure commune achetait aussi des sacs en faveur du développement durable. Le GIE avait même débloqué des fonds pour financer un audit interne des six pharmacies et lancé un appel d’offres auprès de sociétés spécialisées dans la signalétique extérieure ». La rétrocession a donc permis aux officines d’aller plus loin qu’une logique d’achats et de mutualiser les coûts à l’extrême.
4. Investir un marché dominant
Parfois, la rétrocession permet de prendre la main sur un marché. C’est le cas d’un pharmacien installé dans les Yvelines, département dans lequel les animaux, et en particulier les chevaux, sont nombreux. Cet officinal, qui tient à garder son anonymat, s’est constitué un rayon vétérinaire très développé. Il est alors parvenu à pratiquer des rétrocessions avec des vétérinaires sur des produits destinés aux animaux de compagnie, sur lesquels ils ont des conditions d’achat bien moins intéressantes quand ils traitent eux-mêmes en direct avec les laboratoires.
À retenirQu’est-ce que la rétrocession ?
Certains pharmaciens se regroupent de façon informelle pour acheter des produits à des tarifs plus intéressants. En pratique, une seule officine passe la commande et refacture aux autres les produits commandés par chacune. Pour celui qui facture, la marge est nulle car il refacture au prix coûtant. Il comptabilise ses « reventes » dans un sous-compte distinct des autres recettes de la pharmacie. Les rétrocessions sont normalement limitées au 19,6 % et au 5,5 % hors médicaments. Elles sont interdites sur le 2,1 %.
Comment traiter les rétrocessions sur le plan comptable ?
« Les rétrocessions sont considérées fiscalement comme une vente mais viennent en diminution des achats de l’officine. Elles sont retraitées dans le chiffre d’affaires à marge zéro », répond Olivier Delétoille, expert-comptable du cabinet ArythmA.
Exemple : Une officine réalise 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires « comptoir » et 60 000 € de rétrocessions au profit d’un confrère. Les rétrocessions correspondent à des achats revendus sans marge. Sans retraitement et selon l’approche comptable, le taux de marge est naturellement tiré à la baisse en raison du poids des rétrocessions vendues à marge zéro.
Dans une analyse de gestion, les rétrocessions doivent donc être diminuées à la fois du chiffre d’affaires et des achats consommés.
À savoirLes points noirs
La création d’un groupement d’intérêt économique (GIE), dans les pratiques de rétrocession, a ses limites. Olivier Klein, titulaire à Deauville, peut en témoigner. « Notre GIE a fini par voler en éclats, car, parfois, les fonds ne peuvent plus être utilisés. Ainsi, nous avions accumulé 270 k€ que nous ne pouvions pas distribuer. » Au quotidien, la gestion des rétrocessions n’est pas toujours facile. « Sur dix laboratoires partenaires, il y en a toujours un ou deux qui n’acceptent pas de livrer chaque point de vente avec le même niveau de remises commerciales. » En outre, les pratiques de rétrocession sont perturbantes pour les laboratoires attachés à une transparence sur l’écoulement de leurs produits et qui souhaitent avoir une bonne visibilité sur les remises octroyées au point de vente. « Les rétrocessions faussent le jeu sur les remises de fin d’année et perturbent les objectifs que le commercial doit réaliser dans son unité géographique d’analyse », précise Olivier Klein.
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