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UNE NOUVELLE MARGE POUR LA RÉPARTITION
Négociée discrètement depuis quelques mois, la nouvelle marge des grossistes-répartiteurs n’est plus dégressive mais linéaire. Appliquée dès janvier 2012, elle devrait faire gagner 25 millions d’euros à l’assurance maladie et générer 60 millions d’euros de pertes pour la répartition et presque autant pour l’officine.
Actuellement dans le circuit des signatures ministérielles, l’arrêté de marge modifiant la marge des grossistes-répartiteurs devrait être publié avant la fin de l’année pour une entrée en application le 1er janvier 2012. Plus linéaire (la dégressivité de la marge dégressive lissée est divisée par deux), cette nouvelle marge – négociée dans le dos des syndicats officinaux – est de 6,68 % du prix fabricant hors taxes (PFHT) de 0 à 450 € et de 0 % au-delà, avec une rémunération minimale de 0,30 € et maximale de 30 € par boîte. Le coefficient est nul au-delà de 450 €.
Les grossistes ont la plus faible marge d’Europe
« Ce système est plus simple et tient compte des coûts fixes, à travers une marge minimale, ainsi que des coûts de distribution plus élevés des produits chers, à travers un relèvement du plafond, et de la dynamique du marché à travers une marge linéaire », commente Emmanuel Déchin, secrétaire général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). Ce modèle est plus lisible que le précédent et correspond, sur le principe, à ce que la CSRP demandait. Toutefois, sur le plan comptable, la CSRP fait la fine bouche. « Cette réforme est une occasion manquée, elle a amélioré les conditions de travail mais baissé les salaires », déplore Claude Castells, président de la CSRP, qui réclamait la stabilisation de la plus faible marge des répartiteurs européens.
Selon les estimations de la CSRP, les répartiteurs vont perdre 40 millions d’euros, et même 60 millions à fin 2012. La répartition va gagner jusqu’à un PFHT de 3 € et au-delà de 133 € (+ 190 millions d’euros de marge), soit sur la moitié des unités vendues et qui correspond à 8 % de son chiffre d’affaires. En revanche, les répartiteurs enregistreront une perte de 230 M€ dans la fourchette de 3 à 133 €, où se concentre l’essentiel du marché. Leur nouveau mode de rémunération se traduit donc par une baisse de marge de 40 M€ et une économie de 25 M€ pour l’assurance maladie. « En cinq ans, la répartition a perdu l’équivalent de son résultat d’exploitation. Si nous n’avions pas réalisé des gains de productivité, la profession serait aujourd’hui à zéro de résultat », alerte Claude Castells, tout en réaffirmant la volonté des adhérents de la CSRP de distribuer tous les produits.
Le réseau officinal perdrait 25 millions en deux ans
Quant aux conséquences financières de la nouvelle marge des grossistes sur l’officine, Emmanuel Déchin part du principe que les pharmaciens récupèrent la marge grossiste quand ils privilégient l’achat en direct : « Au pire des cas, ce sera neutre et, au mieux, ce sera positif pour eux. » Selon lui, dans la tranche de 3 à 133 €, la perte de marge pour l’officine serait de 25 M€ et, dans les tranches des extrémités, le gain serait de 55 M€, soit un excédent pour le réseau de 30 M€. Un calcul que contestent les pharmaciens. « Nous allons perdre 25 millions d’euros la première année et 25 millions supplémentaires la deuxième !, s’exclame Gilles Bonnefond, président de l’USPO. L’artifice est de faire croire qu’avec le direct le pharmacien va récupérer l’intégralité de la marge grossiste, c’est-à-dire 96 millions. Il est clair que les laboratoires ne transféreront pas la totalité de ce montant. » Pour Michel Caillaud, président de l’UNPF, « la perte des grossistes va nuire aux remises faites aux officines et il y aura également la baisse de marge des génériques. Au total, j’estime la baisse de marge pour l’officine entre 45 et 50 millions ». Il craint également des ruptures de stocks ou des gels avant et après la mise en œuvre de la nouvelle marge. « Je ne me fais pas d’illusions : la pharmacie ne gagnera pas, déclare de son côté Philippe Gaertner, président de la FSPF. Les répartiteurs ont accepté d’avoir une perte de 25 millions – les économies réalisées par l’assurance maladie –, mais en aucun cas nous n’accepterons une répercussion sur l’officine, car ce sont eux qui ont demandé une modification de leur marge. La FSPF veillera qu’il y ait une neutralité de ces changements pour l’officine. »
Autre problème soulevé par les syndicats : l’augmentation de certains prix. Une boîte de Doliprane va ainsi passer 1,80 € (prix public) à 2 €. « Les patients vont s’imaginer que c’est le pharmacien qui augmente les prix… », résume Gilles Bonnefond.
L’ESSENTIEL
• Les grossistes-répartiteurs ont négocié une nouvelle marge.? Elle devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2012.
• La nouvelle marge est de 6,68 % du PFHT, avec une rémunération minimale de 30 centimes et maximale de 30 euros.
• Selon la CSRP, la répartition devrait perdre 40 millions d’euros, voire 60 à la fin 2012.
• Selon l’USPO et l’UNPF, les pertes de l’officine atteindraient environ 50 millions d’euros.
Un amendement pour les ruptures de stock
Le gouvernement a déposé un sous-amendement au projet de loi de réforme sur le médicament. Il se rapproche de la proposition de la CSRP pour régler le problème des doubles prix pratiqués par les industriels, selon que leurs produits sont destinés à l’export ou au marché intérieur. Outre l’obligation de déclarer la destination des produits quand ils sont achetés puis revendus (c’est le cas des grossistes), une distribution spécifique serait mise en place pour certains produits dont le répartiteur ne serait plus propriétaire. Ainsi, les laboratoires garderaient la maîtrise de leurs produits tandis que le répartiteur ayant passé convention avec eux s’engagerait à respecter un cahier des charges et leurs obligations de service public. Une liste serait établie et concernerait en majorité les médicaments chers sous quotas.
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