LA MARGE GROSSISTE ET LA TVA À 7 % EN PRATIQUE
Nouveau barème de marge des répartiteurs, baisses de prix, chambardement sur les TFR, imprécisions sur les hausses de TVA à appliquer… L’année 2012 commence sur les chapeaux de roues par une grande valse des vignettes.
En ce début d’année, les modifications de prix liées aux nouvelles modalités de calcul de la marge du grossiste, les baisses de prix sur près de 200 médicaments, le chambardement sur les TFR et le relèvement du taux de TVA réduit de 5,5 % à 7 % sur certaines catégories de produits mobilisent l’attention des pharmaciens sur les prix publics et sèment le trouble.
Nouvelle marge grossiste et nouveaux prix publics
Depuis le 1er janvier, les laboratoires n’ont plus le droit d’apposer des anciennes vignettes sur leurs spécialités mais sont autorisés à écouler leurs stocks de 2011. Le délai d’écoulement des produits aux anciens prix est fixé dans l’arrêté de marge des grossistes au 31 mars 2012, tant pour le répartiteur que pour le pharmacien. « Les problèmes liés à cette date unique pourront faire l’objet de discussions entre le grossiste et son client », précise Emmanuel Déchin, secrétaire général de la CSRP (Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique). Il faut espérer aussi que la CNAM (Caisse nationale de l’assurance-maladie) se montre tolérante pour minimiser les risques de rejets. « Nous attendons que le ministère de la santé nous donne les règles du jeu », répond la CNAM.
Il faut aussi noter que des TFR sont retirés sur 17 groupes génériques et que les montants des TFR de 305 autres groupes sont modifiés depuis le 1er janvier, avec obligation pour les fabricants de livrer des unités avec des vignettes conformes à cette date. Bis repetita à compter du 1er février, avec la mise en place de nouveaux TFR.
Pour les fabricants, « cette opération de revignetage affecte toute la gamme des médicaments remboursables, rappelle Claude Bougé, directeur général adjoint du Leem. C’est une contrainte à la fois industrielle et une charge financière lourde de près d’une centaine de millions d’euros. Nous n’avons pas toujours la liberté de gérer à moindre frais cette modification des prix concomitante avec des baisses de prix industriels portant sur une masse importante de spécialités à des dates qui s’échelonnent. »
Toutefois, pour leur faciliter la tâche, un cadre a été défini en accord avec la CNAM, le Comité économique des produits de santé et la direction de la Sécurité sociale. « Priorité est donnée aux changements de prix publics des produits dont le prix fabricant baisse et aux produits sous TFR de telle sorte que l’officine et le patient ne soient pas perturbés par la coexistence de prix multiples, indique Claude Bougé. Il n’est pas recevable de commencer par revigneter des spécialités dont le prix public va varier de quelques centimes d’euros. »
Ainsi, l’accord prévoit que les produits devant passer sous TFR le 1er février prochain ne soient pas soumis à deux revignettages à un mois d’intervalle et que la vignette définitive arrive à la date du passage au TFR. « Sur ces bases, les changements de prix se déroulent de façon satisfaisante », assure Claude Bougé, qui précise qu’un premier bilan sur les difficultés rencontrées par les laboratoires et l’état de leurs stocks sera dressé le 16 janvier prochain.
TVA à 7 %: encore des zones d’ombre
La profession est encore dans l’expectative concernant l’application au 1er janvier de la hausse de la TVA de 5,5 % à 7 %. Le changement de taux concerne les médicaments non remboursables de vente libre, les préparations magistrales dès lors que la préparation n’est pas remboursable, les produits officinaux. Dans la pratique, il convient d’affecter le coefficient de 1,015 au prix actuel pour intégrer la hausse de TVA.
En revanche, le taux de 5,5 % est maintenu pour les appareillages pour handicapés, pour diabétiques, pour incontinents et stomisés digestifs ou urinaires, pour les équipements spéciaux (audioprothèse) et autres articles médicaux tels que les bas de contention. L’Union des pharmaciens de la région parisienne a interrogé les services du ministère des Finances pour savoir si les compléments alimentaires à visées médicales doivent passer ou non à 7 %. Certains considèrent, en effet, qu’il s’agit d’aliments et non de produits médicaux et, dans ce cas, le taux de TVA reste à 5,5 %. Son avis est attendu. « Dans la circulaire adressée à nos adhérents, nous avons donné comme consigne de continuer d’appliquer un taux à 5,5 % », précise Guillaume de Durat, secrétaire général du Synadiet (Syndicat des fabricants de produits naturels, diététiques et compléments alimentaires). De même, selon l’Alliance 7 (Fédération des produits de l’épicerie et de la diététique), les laits infantiles restent soumis à une TVA à 5,5 %.
Mis en consultation publique jusqu’au 13 janvier, le projet d’instruction fiscale, notamment sur l’article 278 quater du Code général des impôts concernant les médicaments, devrait lever les dernières incertitudes. « Un texte de loi trop vague peut déclencher une nouvelle instruction, surtout si l’Etat a besoin de recettes fiscales », met en garde Guillaume de Durat.
Pascal Brossard, président de l’AFIPA, déplore cette hausse injustifiée de TVA sur les médicaments d’automédication : « Le prix moyen du médicament OTC n’a augmenté que de 4,05 % en dix ans et n’a cessé de baisser en coût relatif ». Ne se prononçant pas sur la politique de prix de ses adhérents, il convient que les pharmaciens perdent 1,5 point de marge sur les achats effectués depuis le 1er janvier, pour lesquels la TVA de 7 % devient exigible, dès lors qu’ils ne touchent pas à leurs prix publics pour des raisons commerciales. « Cette hausse de TVA traduit l’incompréhension de l’Etat, qui juge l’automédication comme un recours anarchique à l’armoire à pharmacie et non pas comme une réponse thérapeutique moderne aux maux bénins », analyse Claude Bougé.
Les conséquences de la nouvelle marge grossiste pour les pharmaciens
Les médicaments dont le PFHT est inférieur à 3,02 € (homéopathie, médicaments à prescription médicale facultative, spécialités génériques sous TFR ou non) vont voir leur prix public TTC augmenter. Les prix des spécialités de PFHT compris entre 3,02 et 132,32 € vont baisser (et au-delà augmenter). La marge des grossistes étant moindre dans cette tranche, les pharmaciens vont donc perdre de la marge sur les achats en direct de génériques (au PFHT net remisé)… mais en gagner sur de nombreux produits à prescription médicale facultative à PFHT faible majoritairement vendus en direct par les laboratoires.
Autre conséquence : les TFR bas vont augmenter et les TFR haut vont baisser. Selon la FSPF, l’aménagement de la marge du grossiste aura un impact peu significatif sur la marge globale du réseau officinal. Cependant, il induira, à n’en pas douter, des différences entre les officines qu’il conviendra d’évaluer.
- Pharma espagnole : 9 milliards d’investissements et une réforme en vue
- Réforme de la facture électronique, mode d’emploi
- Mon espace santé : un guide pour maîtriser l’accès et la consultation
- Fraude à la e-CPS : l’alerte discrète mais ferme de l’Agence du numérique en santé
- Pharmacie de Trémuson : une officine bretonne pionnière en RSE et qualité
- Comptoir officinal : optimiser l’espace sans sacrifier la relation patient
- Reishi, shiitaké, maitaké : la poussée des champignons médicinaux
- Budget de la sécu 2026 : quelles mesures concernent les pharmaciens ?
- Cancers féminins : des voies de traitements prometteuses
- Vitamine A Blache 15 000 UI/g : un remplaçant pour Vitamine A Dulcis