Quand la pandémie de grippe sera là

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Publié le 23 octobre 2004
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Les experts sont unanimes. Une pandémie de grippe arrivera ! Reste à savoir quand. Trois pandémies ont déjà fait des ravages au cours du XXe siècle : celle de 1918 (grippe espagnole), celle de 1957 (grippe asiatique) et celle de 1968 (grippe de Hong Kong), provoquant plusieurs millions de morts. Nous avons vécu trente six ans de répit depuis la dernière et le plus long intervalle connu entre deux pandémies est de 39 ans… Les récentes épidémies de SRAS et de grippe aviaire ont ravivé les craintes.

Pour faire face à ce risque, l’Organisation mondiale de la santé et tous les gouvernements se mobilisent. En France, un plan gouvernemental de lutte contre la pandémie grippale d’origine aviaire est établi. « L’objectif a été d’identifier différentes situations, d’anticiper les moyens nécessaires et de prévoir la mise en place d’un dispositif de prise en charge selon les phases de transmission et d’amplitude de la pandémie, en concordance avec les recommandations de l’OMS », explique Paule Deutsch, de la Direction générale de la santé. La première étape consiste à éviter le passage de l’animal à l’homme et l’introduction de l’épizootie en France. Les professionnels de santé et la population seront informés dès que plusieurs cas d’infection humaine – sans transmission interhumaine – seront observés.

212 000 morts en France !

Si des cas de transmission interhumaine sont confirmés par l’OMS, il faudra tout faire pour ralentir l’extension de la contamination par une restriction des voyages et éventuellement la possibilité de mise en quarantaine ou d’isolement. En cas de confirmation de la pandémie, la priorité sera d’éviter la panique et d’organiser la prise en charge afin de maintenir l’activité du pays. L’orientation des malades sera assurée par les centres 15 et les médecins généralistes pour éviter que les structures de soins ne soient trop rapidement débordées. En effet, l’ampleur possible d’une pandémie en France pourrait être considérable. En l’absence d’intervention, l’Institut de veille sanitaire estime le nombre de cas entre 9 et 21 millions, entraînant 455 000 à 1,1 million d’hospitalisations et 91 000 à 212 000 morts.

« La difficulté majeure sera de fabriquer un vaccin adapté au virus de la pandémie rapidement et en nombre suffisant », souligne Paule Deutsch. Sa mise au point nécessiterait quatre à six mois après caractérisation de la souche. L’allégement des processus de validation et de contrôle devra être envisagé. La vaccination sera destinée en priorité aux professionnels de santé nécessaires au maintien de l’organisation des soins ainsi qu’aux décideurs, pompiers, personnels des Pompes funèbres… Le ministère de la Santé a décidé de constituer un stock de 13 millions de doses d’antiviraux (oseltamivir principalement et zanamivir).

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Développer un « vaccin universel ».

Des règles de priorité d’utilisation seront également définies. « Les pharmaciens seront impliqués, en particulier dans la distribution des antiviraux », précise Paule Deutsch. Quant aux masques de protection, la production actuelle est de 32 millions par an et les besoins atteindront 280 millions en trois mois, uniquement pour les professionnels de santé !

« Les structures sanitaires seront vite dépassées car la diffusion du virus devrait être rapide et la mortalité élevée » met en garde le Dr Rémy Teyssou, d’Aventis Pasteur. « En cas d’émergence d’un virus d’un sous-type nouveau, à potentiel pandémique, la population humaine ne posséderait aucune immunité préexistante. L’enjeu ultime consiste à développer un « vaccin universel » capable d’induire une immunité protectrice vis-à-vis de n’importe quel sous-type viral, mais cela relève aujourd’hui de la recherche fondamentale » conclut Sylvie Van der Werf, directrice du Centre national de référence sur la grippe et les maladies respiratoires de l’Institut Pasteur de Paris.

Note : Le plan prévu en cas de pandémie de grippe aviaire est consultable sur le site du ministère de la Santé (http://www.sante.gouv.fr, « pandémie » dans le moteur de recherche).

A SAVOIR

recommandations de l’OMS

– Renforcer la couverture vaccinale des populations en période interpandémique afin d’ajuster les capacités de production des vaccins.

– Améliorer la surveillance virologique et épidémiologique pour détecter précocement les souches pandémiques.

– Favoriser la vaccination des sujets contacts (éleveurs, vétérinaires) pour réduire la probabilité de coïnfection.

– Mieux comprendre les répercussions sanitaires et économiques de la grippe.

– Accélérer la préparation pour faire face à une pandémie.