- Accueil ›
- Business ›
- Numérique ›
- Digitalisation ›
- Applis made in pharmacie
Applis made in pharmacie
L’omniprésence des nouvelles technologies (smartphones, tablettes, objets connectés…) pousse des confrères à concevoir eux-mêmes des applis qui amènent de nouveaux services et facilitent leur exercice ainsi que la vie des patients. Rencontre avec des pharmaciens très appliqués.
une appli plutôt qu’un drive. Laurent Lagneau, titulaire de la pharmacie des Oiseaux à Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire), cherchait un moyen de faire gagner du temps à ses clients pressés. Cet amateur de nouvelles technologies, aidé d’un proche dans le métier, a développé, en guise de nouveau service – gratuit – l’application Pharma-Drive. En quelques clics, le temps pour le patient de prendre une photo, de la télécharger et d’appuyer sur la touche « envoi », l’ordonnance parvient directement sur un écran d’ordinateur à l’officine. Un SMS prévient le patient lorsqu’elle est prête. Il peut ainsi venir la récupérer sans attendre. « Préparer une ordonnance demande un travail intellectuel qui est le cœur de notre métier. Cela prend du temps », résume Laurent Lagneau dont le prédécesseur avait installé un drive. « Un tel outil est adapté à notre travail à la condition que l’ordonnance soit reçue en amont. Dans l’alimentaire, les commandes sont préparées à l’avance », rappelle-t-il. Il lui a fallu près d’un an, de l’idée à la publication de l’appli sur Apple Store et Google Play. Et passer le cap de toutes les contraintes techniques et réglementaires… Depuis le printemps dernier, les patients qui n’ont pas le temps d’entrer dans l’officine peuvent se faire délivrer les médicaments au drive de l’officine, redevenu plus que jamais d’actualité.
Comme la dispensation se fait obligatoirement à une personne physique, avec l’original de l’ordonnance, le Conseil de l’ordre, très rigoureux sur cet aspect, n’a pas trouvé à redire. « L’ère de la mobilité amène des mutations et une modernisation de notre profession. Avant, on pouvait scanner son ordonnance et l’envoyer par mail ou par fax pour que le pharmacien la prépare », rappelle Alain Delgutte, président de la section A, au Conseil national de l’ordre des pharmaciens. Sous réserve que les arrêtés du Code de la santé publique réglementant le stockage des données de santé soient strictement observés. « Il faut être particulièrement vigilant sur la certification de l’hébergeur », ajoute-t-il.
L’appli Pharmao proposée fin 2015, sur ce principe du click and collect, n’a pas été conçue par un pharmacien, mais par un éditeur de logiciels biterrois avec des pharmaciens qui l’ont aidé pendant la gestation, à en améliorer le contenu. Puis l’appli s’est enrichie de services à vocation plus marchande. Notamment, l’ajout d’une « promotion du mois », qui apparaît au moment d’envoyer l’ordonnance. « En même temps, le client peut ajouter un produit à son panier et le réserver, car il n’y pas de paiement en ligne » détaille Nicolas Schweizer, le développeur. Cette option permettrait, selon le retour de quelques pharmaciens qui disposent de l’application, de doper de 20 % les ventes du produit ainsi promu.
Le temps, c’est de l’argent et l’argent c’est du temps
A l’heure où la population française est équipée à 70 % de smartphones, David Sainati, directeur de Medappcare fait le constat que « les pharmaciens ont désormais conscience que ce secteur est en pleine expansion. Ils sont de plus en plus enclins à se servir d’une tablette pour leurs entretiens thérapeutiques par exemple, mais ceux qui développent eux-mêmes des applis pour se faciliter la vie sont rares, ils ont d’autres chats à fouetter. » Les pharmaciens développeurs sont très peu nombreux, en effet. Etre passionné par les nouvelles technologies, s’y connaître, ne suffit pas. Il faut disposer de temps et d’assez d’énergie. Et, aussi simple à utiliser soit-elle, développer une appli a un coût. « Il faut résoudre des tas de contraintes techniques, ce qui est déjà en soi un gros travail », confie Laurent Lagneau. Ces applis doivent pouvoir s’adapter à tous les types d’écrans et à l’ergonomie spécifique de chaque smartphone.
De même, il faut prévoir les mises à jour du programme de l’appli pour éviter les problèmes de compatibilité et les bugs quand les systèmes d’exploitation évoluent (passage de l’Iphone 6 à l’Iphone 7, par exemple). Selon Nicolas Schweizer, « une application simple revient à 3 000 € pour les systèmes d’exploitation iOS et Android, et monte facilement à 10 000 €, et bien plus pour une appli de haut niveau ». Plus il y a de fonctionnalités (profil utilisateur, géolocalisation, envoi de photo, d’ordonnance, utilisation de capteur…), plus c’est cher. L’éditeur indique aussi que « le seul design de l’appli entraîne un surcoût de 2 000 à 3 000 €, en fonction de la complexité du projet. » S’ajoute à cela que le moindre site internet exige une inscription à la CNIL, la transmission de données de santé réclamant une sécurisation qui a aussi un coût. « L’utilisation de données sensibles complique le développement des applis. Un hébergeur agréé de données de santé (HADS) revient à environ 150 euros par mois », confirme Nicolas Schweizer.
Quant au pharmacien Sylvain Bertrand, il a développé Health in pocket. Cette appli simple permet de traduire en quinze langues et en un seul clic, un terme de santé (symptôme, matériel, anatomie, médicament, etc.). Elle lui a coûté 6 000 € et 2 000 € de mises à jour (ajout de langues, par exemple). A quoi s’ajoutent 100 € par an pour être téléchargeable sur l’Apple Store et 15 € sur Google Play. Le pharmacien n’est pas encore rentré dans ses frais. « Communiquer demande un gros budget. Dans ce genre de projet, il faut réfléchir à l’objectif : purement marketing pour se faire connaître ou à visée mercantile. Dans tous les cas, il faut un business model – l’appli est-elle payante ou gratuite ? – pour savoir comment on se rémunère derrière. »
À RETENIR
CES APPLIS SANTÉ ONT ÉTÉ DÉVELOPPÉES PAR ET/OU AVEC DES PHARMACIENS :
Ces applis santé ont été développées par et/ou avec des pharmaciens :
• Pharma-Drive est une appli qui permet de venir récupérer directement ses médicaments dans l’officine de son choix, sans passer par l’étape de la file d’attente.
• Pharmao permet de commander ses médicaments depuis son domicile et passer les récupérer quand ils sont prêts. L’appli communique également des infos santé et des offres promotionnelles envoyées directement sur le smartphone lorsque le patient est dans l’officine.
• Health-in-Pocket aide le patient à dialoguer avec un médecin ou un pharmacien en cas de problème de santé dans un pays étranger. L’appli est payante.
- Pharma espagnole : 9 milliards d’investissements et une réforme en vue
- Réforme de la facture électronique, mode d’emploi
- Mon espace santé : un guide pour maîtriser l’accès et la consultation
- Fraude à la e-CPS : l’alerte discrète mais ferme de l’Agence du numérique en santé
- Pharmacie de Trémuson : une officine bretonne pionnière en RSE et qualité
- Comptoir officinal : optimiser l’espace sans sacrifier la relation patient
- Reishi, shiitaké, maitaké : la poussée des champignons médicinaux
- Budget de la sécu 2026 : quelles mesures concernent les pharmaciens ?
- Cancers féminins : des voies de traitements prometteuses
- Vitamine A Blache 15 000 UI/g : un remplaçant pour Vitamine A Dulcis

