Martinique : la hausse du chiffre d’affaires des officines ne suffit pas à maintenir leur rentabilité

© Cocotiers et sable fin en Martinique - Pixabay

Martinique : la hausse du chiffre d’affaires des officines ne suffit pas à maintenir leur rentabilité

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Publié le 3 novembre 2017
Par Francois Pouzaud
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Abstraction faite du cadre enchanteur, du soleil, du sable blanc et des cocotiers, l’exercice de la pharmacie en Martinique n’a rien de paradisiaque. Le charme de l’île ne protège pas de la baisse de rentabilité, ne masque pas la pénurie d’adjoints ou la faible valorisation des officines.

Suite aux passages des ouragans Irma et Maria, le Premier ministre, Edouard Philippe, sera en visite sur l’île de la Martinique samedi 4 novembre. Dans un communiqué en date du 3 novembre, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) n’a pas manqué de l’alerter « sur la situation sanitaire catastrophique » (démographie médicale faible, effectifs en tension, tant en ville qu’à l’hôpital, manque d’équipements dans les services…). Du côté des pharmaciens, comme en métropole, les 144 officines martiniquaises sont confrontées à une stagnation des volumes et un effritement constant de leur rentabilité. Cette dernière est aujourd’hui clairement inférieure à celle observée au niveau national, ce qui a eu tendance à tirer les prix de cession vers le bas. Le prix moyen 2016 se situe à 70 % du CA HT (6,09 fois l’EBE retraité). Ces faibles valorisations sont également influencées par un nombre grandissant de pharmaciens souhaitant prendre leur retraite avant la réforme du métier (passage aux honoraires, nouvelles missions…) et la vente de pharmacies en difficulté (5 transactions de gré à gré et 3 adjudications judiciaires).

Une marge brute à 32,8 %
Le chiffre d’affaires HT moyen des officines s’établissait en 2016 à un peu plus de 1,6 M€ en progression de 4,55 % (contre + 0,26 % en 2015). « Cette hausse semble en partie due à l’impact de la mise en place des honoraires de dispensation, et au coefficient de  majoration de 1,323 appliqué sur le prix des médicaments remboursables qui constituent 85 % du CA global », indique Frédéric Bonniol, du cabinet Synaaps (groupement CGP). Cette majoration légale est censée compenser le surcoût du prix d’achat auprès des grossistes (qui supportent les coûts d’approvisionnement et de stockage spécifiques liés à l’éloignement) et le surcoût de ce que l’on appelle « la vie chère ».

Exception faite pour la parapharmacie. Du fait d’une concurrence rude entre officines, les prix pratiqués sont souvent inférieurs à ceux en métropole, ceci malgré les surcoûts d’approvisionnements. Au final, la marge brute moyenne se situe aux alentours de 32,8 %, soit 1 point au-dessus de celle constatée en France. Mais cet avantage n’est pas suffisant pour compenser les surcoûts liés aux frais fixes de fonctionnement (7,25 % du CA en moyenne, soit 2 points de plus qu’au niveau national) et les surcoûts liés au personnel qui gagne en général un peu plus qu’en France. La relative rareté de personnel qualifié (notamment d’adjoints) tire les coefficients vers le haut (700 pour un pharmacien). A contrario, un dispositif de minoration des cotisations patronales existe ainsi qu’une majoration du CICE (9 %). Dans la balance, les frais de personnel, charges comprises et CICE déduit, représentent près de 11 % du CA, soit environ 0,25 point de plus qu’en métropole.

Par ailleurs, la politique d’investissement est affaiblie par des taux bancaires des emprunts plus élevés, voisins de 3 % hors assurances, des frais de gestion et de tenue de compte également plus chers. Tout cela concourt à raboter davantage le taux d’EBE, en moyenne de 11,49 % du CA HT contre 12,52 % au niveau national. Cependant, pour des repreneurs dynamiques, des gains de productivité sont encore possibles. « Les regroupements en cours et à venir ainsi que le vieillissement de la population devraient donner un nouveau souffle à la pharmacie martiniquaise pour la prochaine décennie », conclut Frédéric Bonniol.

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