- Accueil ›
- Business ›
- Economie ›
- Stratégie et Gestion ›
- L’ART DE LA NÉGOCIATION
L’ART DE LA NÉGOCIATION
Tant que les nouvelles missions n’auront pas plus de poids dans la rémunération officinale, le générique restera un pilier de l’économie de la pharmacie. Raison de plus pour bien négocier avec son génériqueur.
LES PHARMACIENS SONT À LONGUEUR DE TEMPS COURTISÉS PAR DES GÉNÉRIQUEURS, qui leur font miroiter un bon prix ! En 2020, la remise commerciale pondérée sur facture est de l’ordre de 27 % à 29 %, ce qui laisse de la place aux coopérations commerciales, puisque l’ensemble de ces rémunérations – remises et prestations de services – ne doivent pas (en théorie !, Ndlr) dépasser le plafond légal de 40 %. Méfiez-vous toujours des pièges à loup ! Ne vous laissez pas aveugler par l’effet d’annonce d’une remise élevée, sans vérifier la concordance entre les éléments du contrat et ceux portés sur la facture lors de son émission. N’acceptez pas des offres de remises ou des unités gratuites sur des produits non remboursables, des cadeaux, des taux d’escomptes déraisonnables, etc. en contrepartie de la coopération commerciale mise en place, ou des pratiques similaires qui viseraient à contourner le plafonnement des remises. Enfin, n’oubliez jamais qu’une négociation commerciale est, avant tout, un moment d’échanges. Consentir à des efforts réciproques est le gage d’un accord équitable (gagnant/gagnant et non gagnant/acceptant) et d’une rentabilité préservée.
Une négo, ça se prépare !
Pour Tal Laury, expert et formateur en négociation, la première étape consiste à récupérer toutes les informations clés : l’historique de ses ventes, le taux de rupture sur certaines molécules qui peut causer un préjudice financier à la pharmacie (nombre et fréquence), la différence entre les remises promises et ce qui a été payé, etc. Toutes ces données sont des arguments appropriés pour faire pencher la balance. « Ne courez pas plusieurs lièvres à la fois, explique Tal Laury. Il faut se fixer un objectif prioritaire : les conditions commerciales, les volumes, la qualité de service, la différentiation… Et une fois que vous savez ce que vous voulez obtenir, la négociation déterminera les conditions limites au-delà desquelles vous avez intérêt à renoncer à cet objectif. »
La bonne attitude.
Fourbir ses armes, c’est préparer et travailler ses arguments, les concrétiser en les étayant par des faits et des chiffres. Dans la seconde étape, qui requiert de lister ses points forts (référencer des nouveautés, augmenter ses volumes, s’engager sur des molécules prioritaires du répertoire…), il faut garder en tête que les atouts de l’un cachent souvent les défaillances de l’autre (taux de rupture élevé, gamme incomplète surtout en molécules à fort potentiel, retards sur les lancements, C.A en baisse…). Or, prendre conscience de ses points faibles, c’est commencer à se préparer à faire des efforts. Ces concessions devront également être répertoriées en trois catégories : “les gratuites” (remontées d’infos au labo, par exemple) peuvent débloquer une situation tendue, “les échanges” ou communément nommés “la politique du donnant/donnant”, entre efforts à consentir et contreparties souhaitées (telles que le référencement de molécules prioritaires ou l’engagement d’augmenter son C.A annuel pour obtenir de meilleures remises…) et “les concessions impossibles”, en fonction des limites fixées par le pharmacien (sur une quantité d’achats, par exemple), qui vont stopper nette la négociation, quitte à la reprendre un autre jour. « Un argument coûte moins cher qu’une concession, rappelle Tal Laury. Toute modification doit être perçue comme un effort de la part du titulaire. » Ainsi, un engagement sur les volumes est une prise de risque et diminue sa capacité de négociation avec un laboratoire directement concurrent. Dans ce bras de fer, qui ne doit pas se restreindre à une simple négociation prix/volume, il ne faut pas dire “oui” trop vite ! « La résistance donne de la valeur à ses concessions », souligne Tal Laury.
Le plan d’attaque des génériqueurs.
Dans un accord gagnant/gagnant, « le génériqueur attend du pharmacien une exclusivité la plus large possible, par rapport au potentiel de chaque gamme de son portefeuille. Nous demandons un maximum de fidélité à notre marque », explique anonymement un génériqueur. Concrètement, « si le portefeuille du laboratoire représente 80 % du répertoire des génériques et que le C.A génériques de la pharmacie est de 100 000 €, pour bénéficier des remises maximales, le génériqueur demandera au pharmacien de réaliser avec lui 90 % de (100 000 € × 80 %), soit un C.A de 72 000 € », illustre-t-il. Les génériqueurs sont également prêts à accorder plus de remises à leurs clients, quand ceux-ci acceptent de jouer les “effets de gammes” en référençant, en marge du générique, les gammes OTC, de parapharmacie ou de dispositifs médicaux non remboursables du laboratoire. Mais, les pratiques commerciales des génériqueurs sont soumises à des règles. Il leur est interdit, par exemple, de consentir à des remises sur des médicaments non remboursables, en fonction des quantités de médicaments remboursables achetées. « Les remises sont décidées à l’année et la politique du laboratoire pour chacune de ses gammes est définie par une convention, avec indication d’un barème de remises en fonction des volumes. Quand un génériqueur propose des services exclusifs et différenciants, c’est pour fidéliser sa clientèle », précise-t-il. Autrement dit, pas la peine d’espérer une remise supplémentaire sur ces services !
BIEN CHOISIR SON PARTENAIRE
La largeur de l’offre et le potentiel des produits du catalogue, la qualité et la confiance des relations avec le laboratoire, le niveau de remise à comparer ligne à ligne avec son panier d’achats, le référencement du laboratoire par son groupement, les offres de services… sont autant de critères à prendre en compte pour référencer son ou ses partenaires. Si chaque critère est important, le pharmacien déterminera sa propre hiérarchie, avant de se livrer à un travail d’analyse, de calcul et de comparaison fastidieux entre les offres des génériqueurs. Le soutien d’un groupement pèse aussi dans la balance. « Un groupement qui opte pour une exclusivité obtient de meilleures conditions commerciales. Toutefois, il devra fédérer ses troupes autour des engagements pris et être un appui et un relais de nos campagnes et de nos services auprès des pharmaciens », assure un responsable grands comptes dans un labo de génériques.
- Pharma espagnole : 9 milliards d’investissements et une réforme en vue
- Réforme de la facture électronique, mode d’emploi
- Mon espace santé : un guide pour maîtriser l’accès et la consultation
- Fraude à la e-CPS : l’alerte discrète mais ferme de l’Agence du numérique en santé
- Pharmacie de Trémuson : une officine bretonne pionnière en RSE et qualité
- Comptoir officinal : optimiser l’espace sans sacrifier la relation patient
- Reishi, shiitaké, maitaké : la poussée des champignons médicinaux
- Budget de la sécu 2026 : quelles mesures concernent les pharmaciens ?
- Cancers féminins : des voies de traitements prometteuses
- Vitamine A Blache 15 000 UI/g : un remplaçant pour Vitamine A Dulcis