La communauté de biens peut faire mal

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Publié le 27 février 2021
Par Francois Pouzaud
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Lorsqu’un pharmacien est marié sous le régime de la communauté de biens, il a besoin du consentement de son conjoint pour acheter, vendre, contracter un prêt… Ce régime matrimonial est risqué et contraignant si la solidité du couple n’est pas excellente.

Les fonds de commerce dépendant de la communauté sont soumis à la cogestion des deux époux. En effet, un certain nombre d’actes sont assujettis à la règle du double consentement, sous peine de nullité. Cette règle est expressément prévue par le Code du commerce dans l’hypothèse où un des époux participe à l’activité professionnelle de son conjoint. Par exemple, les époux ne peuvent l’un sans l’autre aliéner le fonds de commerce commun : l’un des deux peut donc faire obstacle à l’achat ou à la vente de l’officine comme à la cession du droit au bail des locaux où habite la famille, même s’ils sont annexés aux locaux commerciaux. En revanche, la résiliation d’un bail commercial sur les locaux dans lesquels un époux exerce son activité professionnelle ne nécessite pas l’accord du conjoint.

De la même façon, un associé marié en régime de communauté doit obtenir l’accord de son conjoint pour céder ses parts. A défaut, ce dernier peut intenter une action en nullité de la vente des parts pendant un délai de deux ans.

Le périmètre de la cogestion dépend tout à la fois de la nature des biens et de celle de l’acte dont ils sont l’objet. Ainsi, lorsque l’officine est vendue, en régime de communauté et s’il s’agit d’un bien commun, le prix de cession appartient aux deux époux, et le conjoint est associé puisqu’il lui revient la moitié du profit. Dans le même ordre d’idées, si des conjoints sont en communauté et achètent une entreprise, même si l’acquéreur est un seul des époux, l’autre en sera copropriétaire. Il profitera également de la vente, de la croissance de l’entreprise et de sa plus-value éventuelle. En revanche, si l’officine est un bien propre du conjoint pharmacien et que les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens, ou s’ils le sont en communauté mais que l’officine a été acquise ou créée avant le mariage, un époux ne peut s’opposer à la vente de l’officine exploitée par son conjoint. Toutefois, l’époux non pharmacien peut réclamer une part sur la vente quand son travail ou ses revenus ont contribué à l’enrichissement de l’officine.

En régime communautaire, le double consentement est nécessaire lors d’une transaction. Aucun formalisme particulier n’est exigé : les époux expriment leur consentement en participant directement à l’acte, en donnant mandat au conjoint pour représenter l’autre ou en ratifiant l’acte a posteriori. Les époux ont en principe chacun la qualité de contractant, à moins qu’il ne soit stipulé que le consentement de l’un d’eux vaut seulement autorisation donnée à l’autre de passer l’acte.

Porte-fort porte préjudice

Le porte-fort (ou promesse de porte-fort) est la convention par laquelle une personne (le promettant, parfois appelé « porte-fort ») s’engage envers une autre (le bénéficiaire) à obtenir l’approbation d’un tiers à l’acte envisagé.

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Une promesse de porte-fort est fortement déconseillée par Guillaume Varga, avocat du cabinet Havre Tronchet à Paris. « Ce n’est pas un acte anodin. Il peut même parfois aboutir à des catastrophes et à une situation très défavorable. En effet, la non-ratification par le conjoint entraîne pour l’époux promettant l’obligation de verser des dommages-intérêts au bénéficiaire de la promesse (l’acquéreur). Cette solution est défavorable à l’époux non promettant. En tant que dette contractée par l’un des époux pendant le mariage, cette indemnisation est à la charge de la communauté, et donc partiellement à celle du conjoint non partie à l’acte. »