La maladie grave n’est pas toujours un cas de force majeure

Réservé aux abonnés
Publié le 16 novembre 2019 | modifié le 6 septembre 2025
Par Anne-Charlotte Navarro
Mettre en favori

Le 19   septembre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a affirmé que le vendeur qui n’a pas signé le contrat dans les délais impartis ne peut pas échapper à sa responsabilité en invoquant la maladie qui le frappe.

LES FAITS

Le 5 octobre 2015, M. D. et M. et Mme N. ont signé une promesse de vente pour l’achat d’une maison à usage d’habitation. Les parties devaient signer l’acte authentique au plus tard le 31 mars 2016. M. D., vendeur, ne s’est pas présenté devant le notaire pour signer l’acte authentique, M. et Mme N. l’ont assigné en perfection de la vente et en indemnisation de leur préjudice.

LE DÉBAT

M. D. justifie son absence à la signature de l’acte de vente chez le notaire par la survenue d’une pathologie cardiaque diagnostiquée en janvier 2016, suivie d’une opération en avril. Il considère que cette maladie l’a mis dans l’impossibilité de libérer les lieux et de signer l’acte notarié dans le délai convenu. Il estime par ailleurs que c’est un événement de force majeure. L’article 1218 du Code civil définit la force majeure comme « un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêchant l’exécution de son obligation par le débiteur ». Dans ce cas, le Code civil estime que le débiteur de l’obligation n’engage pas sa responsabilité. M. D. n’aurait donc pas à dédommager M. et Mme N.

A contrario, la cour d’appel d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), le 15 mai 2018, estime que M. D. n’apporte pas les preuves suffisantes permettant aux magistrats de juger que son état de santé présentait un caractère imprévisible ou brutal et qu’il n’avait pas connaissance, lors de la signature du compromis de vente, d’un problème cardiaque. Les magistrats relèvent que le délai entre janvier 2016, mois du diagnostic, et mars, mois prévu pour la signature, aurait dû permettre à M. D. d’organiser son déménagement et de mandater quelqu’un pour signer la réitération de la vente. Ils condamnent M. D. à payer aux époux N. la somme prévue au titre de la clause pénale dans le compromis, soit 10 % du prix de vente. Estimant qu’une erreur de droit a été commise, M. D. saisit la Cour de cassation.

LA DÉCISION

Le 19 septembre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation rappelle que les magistrats de la Cour de cassation ne sont pas compétents pour apprécier les faits liés à une affaire. En effet, en France, la compétence de la Cour de cassation se limite à l’interprétation du droit. Les magistrats précisent que la survenance d’une maladie grave n’est pas en soi un cas de force majeure. Elle ne l’est que si elle présente un caractère imprévisible et irrésistible lors de la conclusion du contrat. Il revient au contractant défaillant de prouver que l’événement invoqué répond à ces caractéristiques. Cette solution est applicable lors de l’exécution de contrats commerciaux. 

Publicité

Source : Cass., 3 e civ., 19   septembre 2019, n°   18-18.921

•   Le débiteur d’une obligation peut échapper à son exécution s’il évoque un événement de force majeur.

•   Un événement de force majeur est un fait irrésistible et imprévisible.

•   Une maladie cardiaque survenue 3 mois avant la signature de l’acte définitif n’est pas un événement de force majeure.