Génériques : le « J’accuse » de Sandoz

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Publié le 20 mars 2010
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En perte de vitesse sur le marché français du générique, Sandoz jette un pavé dans la mare en dénonçant, sans les nommer ouvertement, ses concurrents pour pratiques abusives et anticoncurrentielles en matière de remises sur les génériques.

Nous regrettons qu’il existe en France des pratiques de rabais consentis aux pharmaciens qui vont bien au-delà de ce qu’autorise la loi. C’est une spécificité de ce marché à laquelle nous refusons de nous conformer. Je préfère perdre du terrain en respectant l’éthique qu’en gagner en l’oubliant. Mais c’est un fait : les sociétés qui observent un code éthique et légal sont désavantagées en France. Nous devons donc continuer à dialoguer avec les autorités pour assurer une plus grande équité », a livré en pâture Jeff George au quotidien « La Tribune », le 12 mars dernier. Le directeur général de la branche générique de Novartis a évoqué, à titre d’exemple, le clopidogrel, générique de Plavix, arrivé en octobre 2009 sur le marché français. Celui de Sandoz a connu « un fort démarrage. Malheureusement, à cause des rabais que je viens d’évoquer, le marché est inéquitable ». Une façon comme une autre d’expliquer le déclin du chiffre d’affaires (CA) enregistré en 2009 par sa filiale française qui rétrograde de la troisième à la cinquième place, derrière Teva et Sanofi-Winthrop, avec une part de marché tombée sous les 10 %. Avec trois biosimiliaires (plus de 15 % du CA), « nous voulons donner à Sandoz la place qui est la sienne, celle de n°2 mondial et de n°1 en Europe ».

Des baisses de prix pour sanctionner les surremises

« Jeff George doit se justifier face à sa direction, mais il ne peut chercher la responsabilité de ces mauvais résultats chez ses concurrents », réagit Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO (Union des syndicats de pharmaciens d’officine).

Ces accusations risquent-elles d’être lourdes de conséquences pour le réseau ? Pas sûr. Pour Philippe Gaertner, président de la FSPF (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France), ce sont les groupements qui profitent principalement de la générosité des laboratoires de génériques « car ils disposent de moyens pour obtenir des remises supplémentaires ». Mais il ne nie pas que, « dans une situation économique difficile et tendue, certains pharmaciens aux abois cèdent à la pression des remises ». D’où, pour son président, la légitimité de la Fédération de réclamer une revalorisation du seuil de la première tranche de la marge dégressive lissée, qui aurait le mérite, entre autres, d’assainir la situation des remises.

Ceci étant, les dérapages sur les marges arrière n’ont plus de secrets pour personne, pas même pour Noël Renaudin, président du Comité économique des produits de santé (CEPS). Celui-ci n’est pas dupe. « Le CEPS sanctionne les surremises par des baisses de prix plus fortes et plus rapides sur les nouvelles molécules entrées au répertoire », constate Gilles Bonnefond. Et Philippe Gaertner d’ajouter : « La nouvelle baisse programmée des prix de 100 millions d’euros sur le générique est parfaitement coordonnée avec les dépassements de remises. » « Le souci du CEPS est de trouver le juste équilibre entre cette baisse, l’incitation au développement du marché et le maintien de la qualité des génériques », poursuit Gilles Bonnefond.

Côté industriels, aucun génériqueur n’a souhaité répondre aux accusations de Sandoz et s’exprimer sur sa politique de remises. Qui ne dit mot consent ? Chacun sait que ne pas franchir la ligne jaune, c’est prendre le risque de se mettre hors marché.

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Enfin, en mettant le débat des remises sur la place publique et en demandant aux autorités « d’appliquer une plus grande équité », Sandoz risque de se mettre à dos à la fois le Gemme (Générique, même médicament) dont il est adhérent et les pharmaciens. Suite à ses déclarations sulfureuses, l’image du laboratoire pourrait donc bien prendre du plomb dans l’aile !

Repères

Ce que dit la loi

La loi Chatel de 2008 a instauré un nouveau plafond de remises de 17 % du PFHT sur les génériques et spécialités sous TFR. Le pharmacien peut acheter au mieux au PFHT minoré des remises ou rémunérations de services de 17 % maximum ou de 2,5 % selon les médicaments. Aucune autre proposition commerciale, quelle qu’en soit la forme, ne permet de dépasser ce montant maximal de conditions commerciales.