TROIS CONSEILS POUR MIEUX S’ORGANISER

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Publié le 19 mai 2012
Par Françoise Sigot
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L’organisation des gardes est souvent un casse-tête pour les titulaires. Volontariat, horaires à respecter ou majoration de salaire sont autant de questions dont les réponses appellent la mise en application d’une équation fragile.

Les gardes imposent toujours de s’organiser en interne. Mais s’il existe des règles relativement claires en matière de rémunération et de repos compensateur, chaque officine conserve la liberté de gérer et d’organiser les gardes comme elle l’entend entre les différents membres de l’équipe, même si la présence d’un pharmacien diplômé est indispensable.

1 Anticiper et structurer dès l’embauche

« Comme tout acte de gestion, les gardes s’anticipent et se planifient. D’un point de vue organisationnel d’abord, afin d’éviter les malentendus, il est important de signifier dès l’embauche à un futur collaborateur qu’il aura à assumer tel nombre de gardes par mois ou par an. Le formaliser par écrit dans le contrat de travail est encore plus prudent. Au-delà de l’organisation, les gardes sont également à prendre en compte sous l’angle financier, car le salaire des collaborateurs de garde est évidemment majoré », explique Brigitte Defoulny, fondatrice et directrice du cabinet conseil Héliotrope.

A Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), Philippe Ducher est titulaire d’une officine ouverte 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Parmi la vingtaine de collaborateurs, personne n’échappe à son tour de garde. « Nous fonctionnons avec deux équipes. Les membres de l’équipe de jour ont un contrat de travail qui prévoit des heures de journée et de soirée jusqu’à 23 heures ainsi qu’un nombre de gardes les dimanches et jours fériés. En parallèle, nous avons une équipe composée de pharmaciens diplômés et d’étudiants en cinquième et sixième année qui ne font que des gardes en vacation. J’organise une réunion trois ou quatre fois par an avec l’équipe de jour, afin que nous organisions les plannings. Si toutefois quelqu’un ne peut pas se rendre disponible le jour de sa garde, les collaborateurs s’organisent entre eux pour échanger. » En 27 ans, ce titulaire n’a dû faire face qu’à deux ou trois absences. « J’ai la chance d’être installé dans une ville universitaire. Cela facilite considérablement les choses car si nous n’avions pas de faculté de pharmacie ici, je pense que je ne pourrais pas tenir cette organisation », témoigne Philippe Ducher, qui profite de l’entretien annuel pour aborder le sujet des gardes et, si besoin, renégocier la rémunération avec ses collaborateurs.

2 Faire preuve de souplesse

En marge des rendez-vous annuels, l’organisation des gardes peut s’inviter plus régulièrement au menu des discussions entre un titulaire et ses collaborateurs. Les contraintes personnelles de chaque membre de l’équipe doivent, autant que possible, être prises en compte. Philippe Canonne, installé à Voiron (Isère), a fait le choix d’allier du formalisme à un peu de souplesse. Toutes les neuf semaines, les cinq salariés de l’officine, titulaire compris, sont mobilisés pour assurer une garde le lundi, jour où toutes les autres officines du canton sont fermées. De même, les préparatrices sont mobilisées toutes les 18 semaines le dimanche. « Nous avons inscrit les obligations de garde dans les contrats de travail. Je laisse ensuite la liberté aux préparatrices de s’organiser comme elles le souhaitent entre elles pour prendre leur tour de garde », témoigne le titulaire isérois, qui assure lui-même les gardes de nuit et celles des dimanches.

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A l’image d’Eric Aubertin, titulaire à Nice, certains titulaires préfèrent opter pour moins de formalisme. Organisé en secteurs qui découpent la ville en cinq quartiers, le service de garde de la préfecture des Alpes-Maritimes conduit la Pharmacie du Port à assumer deux ou trois gardes par an, qu’il s’agisse de dimanches ou des jours fériés. Ce sont les deux titulaires qui se répartissent les gardes et, pour les assister, ils peuvent toujours compter sur une préparatrice volontaire. « Nous n’avons pas inscrit les obligations de garde dans le contrat de travail de nos collaborateurs. Jusque-là, nous avons toujours des volontaires parmi nos cinq préparatrices. Les tours sont répartis suivant les disponibilités de chacun. Jamais encore nous n’avons eu de souci avec cette organisation », souligne Eric Aubertin. La rémunération, souvent attractive, et le faible nombre de gardes s’accommodent en effet plutôt bien d’un système ouvert au sein duquel chacun peut composer avec ses contraintes personnelles et professionnelles. Par ailleurs, le volontariat est toujours à privilégier. « La bonne organisation des tours de gardes est celle où tout le monde trouve son compte », synthétise Brigitte Defoulny.

3 Expliquer et surveiller

Plutôt que d’imposer une organisation, la consultante conseille d’impliquer les équipes. « Réunir l’équipe permet d’abord d’exposer les contraintes en matière de garde et de les justifier. Ensuite, ces rencontres permettent à chacun de se positionner et de s’impliquer. Ainsi, les décisions seront acceptées plus facilement puisqu’elles auront été comprises et que les solutions seront le fruit d’une discussion collective », précise Brigitte Defoulny. Reste que le volontariat doit toutefois être surveillé. Car, à laisser les collaborateurs s’organiser entre eux, certains peuvent rapidement prendre le dessus. « Sous couvert de l’acceptation générale, certains imposent facilement leur point de vue à une équipe. On peut alors se retrouver avec des sortes de volontaires contraints. Pour éviter cela, les gardes doivent être l’un des points abordés au cours de l’entretien annuel. Le titulaire se rendra ainsi rapidement compte si l’adhésion du salarié est contrainte ou si l’organisation est le fruit d’une vision partagée et respecte au mieux les souhaits de tous les collaborateurs », souligne Brigitte Defoulny.

Enfin, les gardes sont, en général, des nuits et des journées chargées. Dès lors, il est difficile de mobiliser des personnes connaissant mal l’officine et qui auront des difficultés à répondre à des demandes urgentes. « La garde est différente des jours ordinaires. La clientèle n’est pas la même », pointe la consultante.

Ce que disent les textes

Tout ce qui touche à la rémunération et aux horaires est clairement encadré par le droit du travail et la convention collective nationale de la pharmacie d’officine. Voilà ce qui s’applique, en attendant la mise en œuvre de la convention pharmaceutique, qui a quelque peu modifié le paiement et les horaires des gardes.

• La programmation des gardes doit être connue de chaque salarié concerné au moins 15 jours à l’avance, sauf circonstance exceptionnelle. Dans ce dernier cas, le salarié doit être averti deux jours ouvrables à l’avance.

• Un salarié qui accomplit un service de garde ou d’urgence doit bénéficier d’un repos quotidien d’au minimum onze heures consécutives.

• Les gardes à volets ouverts

– Si elles s’effectuent en semaine, elles sont considérées comme du travail effectif rémunéré sur la base de 100 % du temps passé. Une majoration doit être appliquée en cas d’heures de nuit et d’heures supplémentaires.

– Si elles s’effectuent un dimanche ou un jour férié, le salarié a droit à une indemnité de sujétion, un repos compensateur d’égale durée et, bien sûr, une majoration en cas d’heures de nuit et d’heures supplémentaires.

– Si elles s’effectuent le 1er mai, le salarié a droit, en plus d’un repos compensateur d’égale durée, une indemnité égale au salaire correspondant au travail effectué. Pour les heures de nuit et les heures supplémentaires, des majorations de salaire doivent être également prévues.

• Les gardes à volets fermés

– Si elles s’effectuent en semaine, elles sont indemnisées à hauteur de 25 % du temps de présence à l’officine pour les salariés à temps plein (100 % pour les collaborateurs à temps partiel), sans compter une éventuelle majoration en cas d’heures supplémentaires.

– Si elles s’effectuent un dimanche ou un jour férié, le salarié a droit à une indemnité de sujétion, un repos compensateur d’égale durée et des majorations en cas d’heures supplémentaires.

– Si elles s’effectuent le 1er mai, l’indemnité est calculée sur la base de 25 % du temps de présence à l’officine pour les salariés à temps plein (et 100 % pour ceux à temps partiel). Le salarié a aussi droit au repos compensateur d’égale durée et à une majoration en cas d’heures supplémentaires. S.B.

Pour en savoir plus, voir la fiche Moniteur expert n° 2763 du 24 janvier 2009.