Les bons points de l’année 2000

Réservé aux abonnés
Publié le 13 octobre 2001
Mettre en favori

Un chiffre d’affaires moyen en forte progression, un résultat d’exercice en légère amélioration : tels sont les principaux éléments positifs à retenir de l’étude de Fiducial Expertise sur les comptes des officines en 2000. Mais la marge commerciale poursuit sa lente dégradation et les petites pharmacies souffrent.

Selon les statistiques professionnelles du cabinet Fiducial Expertise portant sur un panel de 460 officines de la métropole, l’activité des pharmacies en 2000 a été marquée par une croissance plus soutenue, en moyenne de 8,34 %, contre seulement 4,73 % en 1999. Et le chiffre d’affaires moyen hors taxes des officines s’établit désormais à 6,641 MF. Cette tendance générale, toutes typologies d’officines confondues, cache certaines disparités. La progression du CA, en pourcentage, est plus élevée pour les officines de centre commercial (+ 9,43 %) et les officines rurales (+ 8,36 %) que pour les officines de quartier (+ 8,21 %) et celles de centre-ville (+ 8,19 %). Comme en 99, la hausse est plus sensible pour les officines individuelles (+ 8,47 %) que pour celles en société (+ 7,96 %).

« Il faut remonter au milieu des années 80 pour retrouver de tels chiffres, relève Philippe Becker, directeur du département pharmacie de Fiducial Expertise. On s’attendait à ce que l’arrivée du générique fasse baisser le CA « ordonnance ». C’est le contraire qui s’est produit ! Indiscutablement, l’effet CMU et l’arrivée de médicaments plus chers expliquent pour une large partie cette tendance. »

Pour 2001, cet expert-comptable note un certain tassement de la croissance sur les six premiers mois (+ 4 % à 5 %) et pense que le plan médicament d’Elisabeth Guigou, lorsqu’il aura été mis réellement en place, modérera sans doute encore plus l’évolution de l’activité.

Frais de personnel maîtrisés et résultats en hausse

Les effets de la nouvelle MDL à deux tranches ont été palpables en 2000. Le taux de marge moyen des officines après remises commerciales n’a chuté que de 0,39 point à 29,06 %, contre 0,55 point en 99. L’an dernier, seules les officines de centre commercial ont conservé une marge dépassant 30 %, talonnées par les officines de centre-ville (29,47 %). Les officines rurales et de quartier voient leur taux de marge désormais bien installé, malheureusement en deçà du seuil de 29%.

Quel que soit le mode d’exercice, l’érosion de la marge est identique mais les officines exploitées en société conservent toujours une marge commerciale supérieure de près de 0,2 point sur celles exploitées en nom propre. Selon la taille des officines, ce sont celles de 5 à 7 MF (moyennes) qui font état de la marge – en pourcentage – la plus faible (28,92 %).

Publicité

Malgré ce léger ralentissement de la dégradation du taux de marge, il est difficile de se prononcer sur l’impact de la nouvelle rémunération. « La bonne tenue de l’activité a masqué en 2000 les tendances négatives relevées ces dernières années, analyse Philippe Becker. Psychologiquement, les pharmaciens ont repris confiance. Ajoutons que le coût du crédit, qui est assez bas, a permis de réinvestir. Ceci étant dit, l’un des indicateurs de gestion les plus importants, la marge commerciale, a poursuivi sa lente dégradation. L’impact de la révision du calcul de la marge a été sensiblement amoindri par la baisse du niveau des conditions commerciales. La vigilance de la DGCCRF a laissé des traces dans le résultat opérationnel des officines ! »

En 2000, les frais de personnel, représentant en moyenne 8,89 % du CA hors taxes, ont été bien maîtrisés, ce ratio étant inférieur à celui de 99 (9,18 %). Les effets de la mise en place des 35 heures sur ce poste sont quasiment nuls, l’accord de branche n’étant entré en vigueur qu’en décembre 2000. La stagnation relative des frais de personnel tient également à la pénurie de main-d’oeuvre qualifiée. Bon nombre de pharmacies se retrouvent aujourd’hui à travailler en sous-effectif. On remarquera toutefois que les frais de personnel restent un poste lourd dans les pharmacies de centre commercial (au-delà de 10 %) et celles de plus de 10 MF (juste en dessous de cette barre fatidique).

2000 laissera un meilleur souvenir que 1999. L’activité des pharmacies a été marquée l’année dernière par une croissance moyenne de 8,34 %, contre 4,73 % en 1999. Le chiffre d’affaires moyen des officines s’établit désormais à 6,641 millions de francs.

La réforme de la taxe professionnelle tient ses promesses

Autre petite bouffée d’oxygène : le poids du poste impôts et taxes (hors CSG) tend sérieusement à se réduire, passant de 1,19 % à 0,94 % du CA hors taxes. Merci à la réforme de la base de la taxe professionnelle !

La conjonction de toutes ces évolutions relativement favorables aboutit à un résultat de l’exercice exprimé en pourcentage du CA hors taxes supérieur à celui de 1999 : 11,20 % contre 10,72 %. Les officines de centre-ville sont toujours en queue de peloton sur ce dernier indicateur de performance, mais les bons résultats de 2000 le font repasser au-dessus des 10 %.

Parallèlement, les trésoreries n’ont pas été trop mises à rude épreuve l’an passé : les durées moyennes de rotation des marchandises et des crédits clients se sont raccourcies d’un jour tandis que celles des crédits fournisseurs s’est allongée de deux jours. Reste que, avec un résultat d’exercice à 8,12 %, la situation des petites officines réalisant un CA de 3 MF ou moins reste préoccupante.

L’année 2000 ne fait que confirmer une réalité économique rappelée depuis plusieurs années par Philippe Becker : « Les petites pharmacies ont du mal à sortir la tête de l’eau. Le poids des charges fixes dans le contexte d’une baisse continue de la marge commerciale dégrade la rentabilité à un point tel que leurs titulaires ont des rémunérations nettes inférieures à celles d’un assistant débutant. Il y a là un vrai sujet de débat car la possibilité offerte par le regroupement d’officines d’atteindre une taille suffisante n’est pas envisagée par les pharmaciens en question. Le corollaire est le phénomène associatif, qui sera certainement le mode d’exercice majoritaire dans les prochaines années. »

Les résultats 2000 sont donc ponctuellement satisfaisants puisqu’ils ont augmenté grâce à la forte progression de l’activité. Pour 2001, la croissance s’est un peu ramollie au vu des premiers chiffres disponibles, mais il est acquis que le droit de substitution « incitatif » et une MDL plus linéaire sont des facteurs d’amélioration d’une rentabilité qui s’était considérablement dégradée depuis 1991.

Compte tenu des résultats 2000 et de ceux pressentis pour 2001, les pharmaciens peuvent-ils supporter une baisse de 40 centimes du forfait à la boîte ? Philippe Becker reste très prudent sur cette question : « Toute manipulation du forfait à la boîte aura un impact très important sur la marge. Il sera forcément plus fort, par exemple, qu’une modification du taux de marge sur la tranche supérieure à 150 francs. Tout simplement parce que pour tous les « petits prix » le forfait représente l’essentiel de la marge. Le danger de la MDL modèle 99 réside justement dans la manipulation du forfait. Bien évidemment, il faut modéliser pour mesurer les conséquences pour chaque typologie d’officine. Il n’y a malheureusement pas de réponse globale. »

Autre interrogation que fait planer le réajustement à la baisse de la marge des pharmaciens : sont-ils armés pour passer aux 35 heures en 2002 ? Philippe Becker se veut ici rassurant, « si l’activité se maintient et si la marge commerciale ne continue pas à se dégrader ». Sur 2001, après une période de flottement liée aux incertitudes sur l’éligibilité de l’accord de branche, aux aides de l’Etat, « les pharmaciens ont très largement introduit dans leurs officines la réduction du temps de travail », conclut-il, constatant que « cela a été facilité par l’expérience qu’ils ont des contrats à temps partiel ». Mais quelques points noirs subsistent pour 2002 : les difficultés de recrutement dans beaucoup de régions et la complexité du système organisationnel.