Six pistes pour enrayer les difficultés commerciales

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Publié le 15 novembre 2008
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Un titulaire confronté à une chute des performances commerciales de son officine ne peut rester attentiste. S’il veut rebondir et reprendre le cap de la croissance, il doit revoir sa stratégie et mettre en oeuvre certaines actions correctrices. Nous vous en proposons six.

Déceler que son officine est confrontée à des difficultés commerciales est à la portée de n’importe quel titulaire. Il lui suffit de prendre régulièrement le pouls de son entreprise et d’analyser ses résultats commerciaux. Et c’est seulement de cette façon qu’il pourra décider rapidement des éventuels changements de cap à effectuer dans sa politique commerciale pour éviter de s’échouer sur des écueils financiers redoutables. Pour analyser les indicateurs d’activité, le tableau de bord sera son meilleur allié. « Il permet d’avoir une rapidité de réaction et de pouvoir sécuriser les différentes décisions à prendre », confirme Jean-Noël Quénelle, expert-comptable du réseau KPMG.

Car les indicateurs économiques peuvent être riches en enseignement. Ainsi, face à une baisse de chiffre d’affaires, le pharmacien peut déterminer la part de responsabilité de chacune de ses composantes : la fréquentation et le panier moyen. Un panier moyen qui régresse peut traduire un nouveau tour de vis dans la politique de maîtrise des dépenses de santé du gouvernement ou tout simplement être la conséquence d’un changement dans l’environnement de l’officine (départ à la retraite, déménagement d’un prescripteur local…). Quant à la baisse de clientèle, elle peut être liée aussi bien à des facteurs externes (baisse de la population locale, changement de typologie, création d’une officine à proximité, fermeture d’un commerce voisin, travaux devant l’officine…) qu’à des facteurs internes (agencement vieillissant, produits manquants, mauvais accueil réservé aux clients, personnel insuffisamment attentionné ou motivé…).

La trésorerie fait elle aussi partie des indicateurs à suivre par le titulaire. « Mieux vaut anticiper plutôt que constater », conseille l’expert-comptable. Le relevé bancaire peut donc être un reflet fidèle des difficultés rencontrées, mais, quand ce clignotant s’allume, il est déjà trop tard…

C’est à partir de ces différents constats, mis en lumière par les indicateurs de l’officine, que le pharmacien va établir un diagnostic et bâtir un plan d’action à court et à moyen terme. Voici six pistes qui peuvent être suivies.

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1 Renforcer son coeur de métier

En cas de perte de vitesse face à une concurrence particulièrement offensive, les efforts du titulaire doivent porter prioritairement sur les fondamentaux du métier : la qualité de service, l’accueil, la disponibilité de l’équipe, l’écoute, la disponibilité dans le choix des produits, le prix, le conseil… Même dans les difficultés, le titulaire pourra difficilement faire l’impasse sur tous ces facteurs de différenciation.

2 S’adapter aux besoins des clients

Parfois, les produits mis en avant dans l’officine ne sont plus en adéquation avec les attentes de la clientèle. Les consommateurs sont influencés par la publicité, par la mode. Leurs goûts évoluent ainsi que leurs besoins. « Ces changements doivent interpeller le titulaire, qui doit se demander s’il a fait les bons choix de marchés et de produits », conseille Thierry Camuzeaux, du cabinet de conseil DPO Concept. Pour lui, le titulaire doit analyser ses marchés et examiner de près les ventes pour chacun de ses segments développés afin de déterminer si certaines gammes doivent être maintenues, renforcées ou réduites : « Il doit devenir plus sélectif sur le plan commercial en termes de prix et de promotions sur les produits fortement demandés, mais aussi sur d’autres références sensibles comme les pilules non remboursables, qui sont coûteuses, et les articles de contention veineuse inscrits à la LPPR en raison des dépassements de prix par rapport au montant pris en charge. » Thierry Guieu, installé à Montauban (Ille-et-Vilaine), applique à la lettre ces recommandations. « Nous sommes confrontés à des pharmacies discount à Rennes, raconte-t-il. Nous avons resserré l’offre pour pratiquer des prix dynamiques et animer les ventes sur les gammes leaders. Ainsi, nous avons notamment proposé à nos clients trois offres promotionnelles tournantes par mois. »

3 Revoir les circuits d’achats

Une politique compétitive des prix suppose aussi de revoir ses habitudes d’achats : moins d’achats directs sur les médicaments remboursables (hors génériques), car le pharmacien n’en maîtrise pas les ventes, mais plus d’achats directs pour les produits à TVA 5,5 % et 19,6 %, ou d’achats groupés. Telle est la préconisation de Thierry Camuzeaux. Elle a d’ailleurs été suivie par Thierry Guieu afin de bénéficier de meilleures conditions commerciales. « Je me suis regroupé avec plusieurs confrères pour avoir de meilleures remises que je répercute partiellement à la vente, sauf au moment d’offres promotionnelles bisannuelles où je rétrocède l’intégralité au client », confie le pharmacien breton

4 Former et manager ses équipes

L’implication de l’équipe et les qualités managériales du titulaire sont la clé de voûte d’un plan d’actions mené pour enrayer une chute d’activité. Thierry Camuzeaux conseille d’organiser des réunions mensuelles et de mettre en place des plans de formation à court et à moyen terme afin d’impliquer les collaborateurs dans une nouvelle dynamique de vente. Ainsi, grâce à l’acquisition d’autres compétences, ils pourront adopter de nouveaux comportements au comptoir. Le cas de Thierry Guieu est, là aussi, exemplaire. Le pharmacien a trouvé de nouveaux relais de croissance en se spécialisant en phytothérapie, aromathérapie et produits bio. Cela lui a alors permis de développer autant le conseil simple que celui qui est associé à une prescription. « Afin d’élargir les compétences de l’équipe, nous avons associé les formations de laboratoires spécialisés avec celle d’un organisme de formation indépendant », témoigne-t-il. Et le challenge ? Thierry Camuzeaux n’y est pas favorable. « Il ne représente pas le moyen le plus approprié à la situation car il conduit à préférer un produit au détriment d’une autre. »

5 Revoir son organisation

Loin de tétaniser les entrepreneurs, les difficultés peuvent parfois les inciter à tout revoir de fond en comble. Quand des difficultés apparaissent, Jean-Paul Sécheresse (JPS consultants) conseille par exemple de réorganiser la répartition des tâches au sein des équipes. « Elle doit être revue pour augmenter la productivité du personnel. La réflexion doit porter sur la délégation des tâches logistiques et administratives à un personnel qui n’est pas préposé à la vente. Cela permettra à l’équipe officinale en relation avec les patients de se consacrer davantage à la vente aux comptoirs. »

6 Développer de nouveaux marchés

Se spécialiser apparaît comme le seul moyen de drainer une clientèle au-delà de la zone de chalandise habituelle. La pharmacie marquera ainsi sa différence, permettant d’affirmer son positionnement concurrentiel, d’augmenter son chiffre d’affaires et sa marge et d’apporter une nouvelle motivation à l’équipe. Thierry Camuzeaux conseille également aux pharmaciens de développer des segments à fort taux d’achats spontanés, comme l’hygiène buccodentaire et l’hygiène intime féminine, en travaillant le conseil et les prix.

Réagir aux signaux d’alerte

Le stock ne tourne pas

Il faut dès lors suivre l’évolution du stock physique pour, au besoin, mettre en oeuvre des actions correctrices.

La trésorerie s’essouffle

Il faut anticiper la trésorerie et comparer le budget établi avec celui remis à jour régulièrement. En cas de situation particulièrement difficile, mieux vaut aller démarcher son banquier plutôt que de continuer à s’autofinancer.

La clientèle diminue

L’action commerciale manque sûrement de dynamisme. Une réflexion sur le réaménagement de l’officine, la formation du personnel et le développement des gammes de produits s’impose.

La marge s’effrite

Il convient d’identifier les produits à forte valeur ajoutée et de mettre l’accent commercial sur ce segment.