Quatre raisons de mettre en place un tableau de bord

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Publié le 1 mars 2008
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Réalisé chaque mois, le tableau de bord donne l’état de santé des finances de l’officine, tirant la sonnette d’alarme lorsque certains clignotants virent au rouge. S’il n’exige pas d’être un expert en gestion, le tableau de bord impose néanmoins rigueur et méthode. Voici quatre bonnes raisons de l’utiliser.

1. Un réflexe nécessaire

« Les pharmaciens se contentent trop souvent du compte de résultat prévisionnel annuel réalisé par leur expert-comptable », déplore Philippe Becker, du cabinet Fiducial Expertise. Or, les temps changent. L’activité officinale connaît des soubresauts qui bousculent l’ordre établi : concurrence de la grande distribution, baisse des marges, érosion des remises commerciales. « Les facteurs conjoncturels commencent à devenir déterminants pour l’officine, admet l’expert-comptable. Il faut prévoir pour éviter de subir. »

D’où la nécessité d’avoir un tableau de bord, un document mensuel reportant les indicateurs phares de l’activité officinale. « Un tableau de bord tous les six mois ne servirait à rien, avertit Alexandra Barth, consultante en gestion à l’Agence pour la création d’entreprise. Il doit être réalisé au minimum chaque mois, idéalement de façon hebdomadaire pour pouvoir réagir à temps si l’un des indicateurs passe au rouge. »

2. Des indicateurs simplissimes

La création d’un reporting mensuel est aussi simple qu’un jeu d’enfant. Comment ? D’abord, en prenant les indicateurs classiques tels le chiffre d’affaires ou la productivité. Ceux-ci peuvent ensuite être déclinés pour chaque secteur d’activité (vigneté, parapharmacie, médication familiale, homéopathie…). « Il n’y a pas de tableau de bord type, car chaque officinal construit ses propres critères de mesure en fonction des points qu’il souhaite surveiller », précise Philippe Becker.

Votre rayon en parapharmacie est conséquent ? Faites figurer, pour la parapharmacie, le panier moyen par mois, le chiffre d’affaires par type de produits ou laboratoire, la marge réalisée pour chaque gamme… Mais si vous venez de vous lancer sur le maintien à domicile, vous pouvez aussi mettre en place des critères précisant l’évolution de cette clientèle à part, l’investissement généré pour l’achat ou la location de lits ou de fauteuils roulants et, bien sûr, la marge dégagée par cette nouvelle activité (par type d’équipement par exemple). « Le choix des indicateurs doit être lié au positionnement stratégique, le lieu d’implantation, la typologie de la clientèle », note Alexandra Barth.

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Autre indicateur clé pour les pharmacies : les génériques. « Dans le cadre d’un suivi régulier, il est bon de savoir quelle est la part de la substitution dans le chiffre d’affaires global et, surtout, dans quelle mesure la marge y est plus élevée », note André Altmeyer, consultant en gestion chez Demos, un organisme de formation. Sans oublier la gestion des ressources humaines si, par exemple, vous devez prendre des préparateurs en extra ou remplacer une adjointe partie en congé de maternité.

3. Des objectifs réalistes

Vous avez déterminé une trentaine d’indicateurs ? Reste ensuite à leur fixer des objectifs, comme une hausse de chiffre d’affaires de 2 % durant le mois de janvier ou une progression du panier moyen pour telle gamme solaire avant l’été. Comment procéder ? D’abord par comparaison. « Il faut déterminer un objectif par rapport au chiffre effectivement réalisé depuis deux ans », explique Philippe Becker. Le chiffre d’affaires progresse, en moyenne, de 4 % sur la médication familiale en février ? Veillez à maintenir ce cap, voire à le dépasser. Des chiffres qui seront ensuite à ajuster en fonction d’une nouvelle réorientation, d’un changement de clientèle dans le quartier, de la création d’un nouveau rayon ou d’un nouveau concurrent…

Vous vous êtes agrandi en rénovant de fond en comble l’officine ? Cela pourra avoir un impact sur vos recettes. Vous pourrez donc réajuster à la hausse les objectifs. Au contraire, le déremboursement des veinotoniques pourra avoir un effet négatif sur les ventes de cette classe de produits. A pondérer à la baisse dans le tableau de bord.

4. Une gestion efficace de ses priorités

Une fois constitué, le tableau de bord exige la plus grande rigueur. Chaque mois, en effet, il faudra minutieusement remplir les cases en reportant les différentes recettes et dépenses de l’officine. Certains clignotants pourront alors virer au rouge. Un écart important entre l’objectif et le chiffre réalisé doit vous mettre la puce à l’oreille. Un diagnostic est alors nécessaire : les objectifs sont-ils trop élevés ? la conjoncture est-elle mauvaise ? cet écart est-il lié à l’arrivée d’un concurrent ou à un changement dans le personnel ?… Toutes les pistes doivent être évoquées pour chercher là où le bât blesse… et mettre en place des actions correctrices.

A cet égard, le tableau de bord peut s’apparenter à un plan de vol. « Il permet de différer des investissements, en termes de recrutement par exemple, si les chiffres ne sont pas au beau fixe », note Philippe Becker. Bref, le tableau de bord est aussi là pour tirer la sonnette d’alarme quand certains clignotants virent au rouge. Sans en arriver là, vous pourrez également voir, à court terme, si le plan de communication au sein de l’officine sur une nouvelle gamme de soins pour les pieds a porté ses fruits. Ou si une autre ligne de produits mérite, au vu de la sollicitation de la clientèle, d’être mise devant le comptoir.

Au-delà de la gestion quotidienne de l’officine, le tableau de bord va-t-il vous permettre de gagner de l’argent ? Oui, clament les experts. « Les pharmaciens qui mettent en place un tableau de bord prévisionnel ont souvent un excédent brut d’exploitation supérieur de 1 à 2 % », soutient Philippe Becker. Un argument suffisant pour sauter le pas, non ?

« Le tableau de bord m’a permis de mettre le doigt sur des lacunes »

« Je ne pourrai plus me passer de mon tableau de bord prévisionnel. Il est indispensable au suivi de la pharmacie », s’exclame Jean-François Robert. Depuis dix ans, ce titulaire d’Ancenis, en Loire-Atlantique, compte sur ce reporting mensuel pour gérer son officine dotée d’un chiffre d’affaires de 3 millions d’euros. « C’est le seul élément palpable dont dispose un pharmacien pour mesurer son activité », explique-t-il. Ainsi, chaque mois, Jean-François Robert reporte, sur un tableau de bord informatisé, son chiffre d’affaires (avec une ventilation par taux de TVA), le panier moyen de sa clientèle et les ventes sur l’OTC. Un réflexe. « Ce n’est pas fastidieux car les éléments mesurés sont simples », assure l’officinal.

Surtout, grâce à ce reporting régulier, Jean-François Robert a gagné en réactivité. Spécialisé en homéopathie, le pharmacien s’est par exemple vite rendu compte qu’il ne réalisait pas ses objectifs de vente. Le tableau de bord l’a incité à se poser les bonnes questions. « J’ai pris conscience que cela était dû à un manque de formation du personnel sur le sujet », confie Jean-François Robert. Dont acte. La dizaine de salariés de l’officine suit aussitôt une formation sur le conseil associé en homéopathie. Résultat : « Les objectifs de vente de tubes homéopathiques ont été dépassés », se félicite le titulaire.

pratique

Vous envisagez de mettre en place un tableau de bord ? Vous pouvez commencer par évaluer l’activité et le panier moyen de votre officine. Voici l’un des modèles développés par Philippe Becker, expert-comptable chez Fiducial Expertise et auteur de « Gestion de votre officine ».