Ne pas dévisser

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Publié le 28 juin 2008
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Second marché officinal de parapharmacie, le buccodentaire continue de progresser en pharmacie alors qu’il stagne en GMS. Une belle performance en partie liée aux investissements des laboratoires vers des produits à forte valeur ajoutée mais aussi au développement du conseil officinal.

Malgré la forte résistance de l’officine sur le marché buccodentaire, vous êtes seulement 34 % à estimer qu’il s’est développé en 2007. Et presque autant (31 %) à vouloir investir pour le développer.

Le buccodentaire en officine progresse de 5,3 % en volume et près de 4,6 % en valeur. Tous les segments de marché croissent, hormis celui des produits pour prothèses dentaires (- 4 % en valeur comme en volume). Et le potentiel de ce marché reste important. En effet, si les « bonnes pratiques » préconisées par les professionnels étaient suivies, la moyenne d’achat des Français (3,6 tubes et 1,6 brosse à dents par an) serait largement dépassée pour atteindre 6 tubes et 4 brosses ! De quoi attiser la convoitise des grands groupes qui luttent pour les premières places du marché officinal.

Campagne TV contre campagne terrain

Pierre Fabre Oral Care, le leader, engrange encore en 2007 les fruits d’une stratégie de proximité, concentrant ses efforts sur le soutien de la prescription et du conseil officinal. Le laboratoire a enregistré une croissance de 7 % et totalisait 30,5 % de parts de marché (en valeur, source Nielsen) l’an dernier. Derrière, Procter & Gamble, qui investit massivement sur la communication grand public depuis le rachat en 2005 de Fluocaril, progresse plus vite (+ 9 %). « Nous avons cette année accentué nos investissements sur Fluocaril 250, dont les pharmaciens ont le monopole de vente, indique Sébastien Portes, chef de produit au sein de ce laboratoire. Le produit a bénéficié d’une campagne TV, d’une forte augmentation de nos budgets « officine » (vitrine et PLV) et « dentiste » (échantillonnage massif). Cette stratégie nous a permis de gagner des parts de marché. » Procter & Gamble détenait ainsi, en 2007, 17,9 % de parts de marché en valeur.

Le troisième acteur, Johnson & Johnson (14,1% des parts de marché à l’officine), voit aussi ses ventes croître (+ 7 %). Mais la palme revient à Colgate Gaba dont les ventes décollent de 28 % ! Une performance portée par les campagnes télévisées d’Elmex, le lancement d’un nouveau dentifrice et la mise en place d’une stratégie de communication grand public via Internet en 2007. Mais avec ses gammes plutôt courtes, il ne totalisait que 8,7 % de parts de marché en 2007.

Chez GSK SGP, au coude à coude avec Colgate Gaba, c’est la communication globale qui a été choisie l’an dernier avec une campagne événementielle « L’art à la bouche » . En 2008, le groupe lance un concours ouvert aux professionnels et au grand public sur le thème « Imagine ta santé ! » relayé par Internet. «Ce type d’actions nous permet de transmettre des messages de santé buccodentaire auprès de clients potentiels très différents », commente Agnès Espiasse, responsable de la communication externe.

ça s’agite dans les bains de bouche

Premier segment à l’officine, les bains de bouche se portent plutôt bien. Les « traitements des infections buccales », qui regroupent les bains de bouche sur prescription remboursables et les bains de bouche OTC avec AMM, enregistrent, selon IMS Health, une hausse d’environ 5 %. Les bains de bouche sans AMM s’envolent avec + 14 % d’unités vendues et un CA qui croît de 13 %.

Si Méridol, Elmex et Botot sont les trois produits les plus vendus, d’autres marques se mêlent à la bagarre comme Listerine, racheté à Pfizer par McNeil SGP. « Les meilleures ventes ne reflètent pas les parts de marché des différents acteurs, assure même Véronique Dumont-Le Bellec, chef de produit senior de la marque. Avec nos cinq références qui totalisent 18 % de parts de marché en valeur et 21 % en volume, nous sommes devenus leader en volume devant Méridol. » La marque enregistrerait + 52 % en volume contre + 15 % pour Elmex, + 11 % pour Méridol et – 6 % pour Botot.

Eludril totalise plus de 16 millions d’unités vendues, soutenu par les dentistes et les généralistes. 40 ans après son lancement, il reste leader sur le segment des bains de bouche avec AMM, avec un peu moins de la moitié des parts de marché. « Son succès perdure grâce à sa formule entretenue d’un point de vue clinique et à une visite médicale soutenue », analyse Hervé Maso. Alodont et Hextril (30 % de parts de marché au total) se partagent la 2e et 3e place. Hextril gagne 3,3 % de croissance sur le segment des bains de bouche OTC avec AMM grâce à l’impact des campagnes de communication grand public. C’est le leader de cette classe. « Le nouveau spot télévisé a très bien fonctionné. Nous totalisons désormais 58 % de parts de marché en unités sur le segment des bains de bouche OTC », se félicite Nicolas Saudreau, chef de produit senior Hextril.

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Alodont reste stable en termes de parts de marché malgré une légère progression des ventes (+ 4,5 % en unité et en valeur). Une croissance confirmée en 2008. Prexidine (Expanscience), en 5e position en 2007 derrière Paroex, est passé devant en 2008 suite aux difficultés rencontrées par cette marque à l’automne 2007 (retraits de lots).

Les dentifrices se frottent à la GMS

Second segment du marché en volume et valeur, les dentifrices connaissent une belle embellie avec + 12 % en 2007, selon Nielsen, grâce au dynamisme des segments « dents sensibles » (+17 %) et « enfants » (+ 17 % en volume et + 16 % en valeur, selon IMS Health). « GSK SGP, Pierre Fabre, Procter & Gamble et Colgate ont tous beaucoup investi sur l’officine, note Anne-Gaëlle Daniélou, chef de marque Oral Care chez GSK SGP. Parodontax (+ 21 %) génère 50 % de la croissance du segment des gencives. C ‘est un marché d’avenir mais méconnu du public. C’est une catégorie qui devrait exploser si l’on considère que 80 % des adultes en France souffrent de gingivites. »

Le leader, Procter & Gamble, totalise 35 % des ventes de dentifrices en pharmacie. Il mise beaucoup sur son activité en officine (promotions, vitrines, présentoirs…). En outre, le groupe s’efforce de réduire les écarts de prix avec la GMS. « Nous avons souvent recours à une offre promotionnelle de lots de deux, voire de trois produits », explique Sébastien Portes.

Pierre Fabre Oral Care propose une formation sur le buccodentaire aux 13 000 officines clientes directes du laboratoire. Si Arthrodont, leader du segment « gencive », est un dentifrice de prescription, Elgydium s’appuie en revanche sur le conseil officinal.

Peu de nouveautés en 2007 hormis le « nettoyage intense » (Colgate Gaba). « C’est un concept nouveau destiné à prolonger les effets du détartrage », explique Marie-Agnès Richard.

Brosses à dents : attention au coup de jus !

« Les brosses à dents techniques continuent de tenir le marché », constate la directrice marketing de Gaba France, qui a lancé deux nouvelles brosses. Pierre Fabre Oral Care capte la moitié du segment des brosses à dents non électriques. Inava pèse 29,7 % (+ 11% en 2007). Près de 12 % des parts de marché sont réalisées par l’Inava Chirurgicale 15/100, la brosse la plus vendue en pharmacie. Procter & Gamble occupe la 2e place.

Les différents acteurs misent sur une forte accélération des ventes de brosses à dents électriques. « En GMS, le segment électrique représente déjà un quart du marché alors qu’il est quasi inexistant à l’officine, note Pierre Fraignaud, chef de produit chez Pierre Fabre Oral Care. Aujourd’hui, moins de 10 % des Français les utilisent, contre 15 % en Europe et 26 % en Allemagne. » Début 2008, le laboratoire a implanté un mobilier spécifique dans 3 000 officines suite au lancement de la toute première brosse à dents électrique dotée d’un système de navigation sans fil : l’Oral-B Triumph avec SmartGuide. « L’objectif est de faire référencer la brosse à dents électrique dans toutes les officines. »

D’autres marchés de niche attisent aussi les convoitises : accessoires et produits pour l’orthodontie ou aphtes. Lyso 6 et Lyso Calm ont ainsi été rachetés par Pierre Fabre Oral Care en 2007 au laboratoire UCB Healthcare. « C’est un produit qui s’inscrit vraiment dans le conseil officinal et correspond donc totalement au positionnement de nos produits buccodentaires », souligne Hervé Maso.

Car si ce marché se porte si bien, c’est parce que l’officine a su mettre en valeur ses atouts face à la GMS avec une offre adaptée aux différentes pathologies buccodentaires et un conseil compétent.

+ 4,6 %

En 2007, le marché buccodentaire représentait un CA de 321,2 MEuro(s) en officine (+ 4,6 % vs 2006), soit 75,8 millions d’unités vendues (+ 5,3 %).

LES MEILLEURES VENTES

Traitements des infections buccales

1 Eludril (200 ml)

2 Alodont (200 ml)

3 Hextril 1 % (200 ml)

Dentifrices adultes

1 Arthrodont (80 mg)

2 Fluocaril Menthe (125 mg)

3 Fluocaril Menthe (75 ml)

Soins pour dentiers

1 Fixodent Pro Confort (40 ml)

2 Stéradent Nettoyant cp (90)

3 Fixodent Pro Neutre (40 ml)

Bains de bouche

1 Méridol (400 ml)

2 Elmex Sensitive (400 ml)

3 Botot (150 ml)

Dentifrices enfants

1 Fluocaril Kids 2-6 ans fraise

2 Fluocaril Junior 7-12 ans

3 Elmex Junior

Brosses à dents électriques

1 Waterpik Familial

2 Waterpik Voyage

3 Oral B Power

La concurrence

Calme plat en GMS

Si la parapharmacie fait encore mieux que l’officine sur le buccodentaire (+ 7,2 % en volume et + 7,7 % en valeur), la GMS ne brille guère avec un petit + 0,3 %, selon Nielsen. Les parapharmacies totalisent 24 MEuro(s) selon IMS Health quand l’officine atteint plus de 307 MEuro(s) et la GMS 541 MEuro(s). En GMS, les dentifrices reculent d’un point. Recul qui s’accentue début 2008.

Les brosses à dents électriques et les bains de bouche se montrent les segments les plus dynamiques. « C’est un marché à fort potentiel car la pénétration en France est seulement de 8 % pour les bains de bouche vendus en GMS, l’une des plus basses d’Europe, indique Virginie Paint, directrice marketing Oral Care chez Colgate. Notre rôle en tant que leader du segment est d’expliquer l’intérêt d’utiliser un bain de bouche au quotidien. »

Paroles de clients

Odette, 67 ans, retraitée

« J’achète les nettoyants et fixatifs pour mon dentier à la pharmacie depuis que j’ai eu une gingivite. Les prix sont peut-être un peu plus chers mais si j’ai un problème je peux avoir un conseil, alors qu’au supermarché il n’y a personne de compétent dans ce rayon ! »

Maryse, 44 ans, professeur, trois enfants

« Le plus souvent, j’achète dentifrices et brosses à dents en GMS, pour une question de coût. Mais les brochures du dentiste me pousseraient à aller à la pharmacie pour trouver des dentifrices de meilleure qualité. La pharmacie reste pour moi l’espace de vente des médicaments. Dentifrices et brosses à dents font plus partie des produits de consommation courante. »

Pierre, 42 ans, commercial, père de Lucas, 10 mois

« J’ai toujours acheté brosses à dents et dentifrices en GMS. Mais je vais en pharmacie pour acheter ceux de Lucas. Du coup, je prends aussi régulièrement des produits pour mon épouse et moi-même. Ma pharmacie propose des prix intéressants et, finalement, la différence avec les GMS n’est pas si importante. »