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Un conte de fées pour le pot d’Anne
Anne Dupouy-Camet a bataillé pour mettre au point une crème capable de réparer les peaux polluées par la nicotine et la fumée de tabac. Cette pharmacienne spécialiste en cosmétologie a fondé sa société, les laboratoires Biorecept, et se démène pour se faire référencer par le circuit officinal.
Enveloppée de cuir noir, Anne Dupouy-Camet porte le chignon haut. Sa voix pétille et sa peau est veloutée. « Mon visage témoigne de tous les bienfaits de la cosmétique !, lance-t-elle en riant. Ou, plus exactement, de la dermocosmétique. » Cette pharmacienne a obtenu son doctorat en 1989. Déjà sa thèse portait sur les molécules générant la mélanogenèse, le processus de pigmentation de la peau.
Au cours de ses stages en officine, Anne Dupouy-Camet s’est découvert un goût pour les préparations magistrales. Mais les pharmaciens en réalisent de moins en moins… C’est pourquoi elle opte pour une carrière dans la cosmétique pour « touiller » à son aise ! Pendant dix ans, elle officie chez Procter #amp; Gamble en Grande-Bretagne comme responsable du développement de produit au sein de la division santé. Elle dépose treize brevets et participe à la mise au point de nouveaux produits cosmétiques. Puis elle rentre en France en 1998 et rejoint L’Oréal comme responsable marketing.
Haro sur la nicotine !
Ce retour à la culture francophone ne se fait pas sans mal. Mais le gouvernement français de l’époque, qui lance une grande campagne antitabac, va lui donner une idée : s’il existe déjà quantité de produits pharmaceutiques permettant d’aider fumeurs et fumeuses à s’arrêter, il n’y a en revanche aucun cosmétique efficace pour réparer les dommages causés par la nicotine sur la peau. Or, dans les locaux du groupe où elle travaille, cette non-fumeuse voit souvent des femmes écraser cigarette sur cigarette. Leur visage, avec le temps, devient blafard, jaunâtre, et prend un aspect cartonné très disgracieux… Sa décision est prise : elle se lance dans de vastes travaux de recherche, avec l’appui du Dr Naïma Zerrouk, chargée de recherche à la faculté de pharmacie de Paris-V.
Pendant deux ans, Anne Dupouy-Camet loue à ses frais des heures de laboratoire tout en travaillant comme free-lance pour des groupes de cosmétique. Et elle met en lumière qu’« avec le temps la nicotine suscite un vieillissement cutané très particulier. Elle génère entre autres une dégradation du collagène, favorise l’apparition de peau atopique et entraîne même un phénomène de vasoconstriction. Mais nous avons pu également montrer qu’il existe des récepteurs à la nicotine sur la peau. En d’autres termes, celle-ci stocke la nicotine et est polluée à la fois de l’intérieur et de l’extérieur. A cela s’ajoute l’effet de la fumée proprement dite qui contient elle-même 3 800 toxines dont 40 sont cancérigènes ».
Peu à peu, Anne met au point un « duo de crèmes » qu’elle finit par breveter. « La formule repose sur une série de molécules implantées en cotte de mailles qui forment un bouclier pour piéger tous les polluants gazeux, explique-t-elle. Elle associe des dérivés de plantes, des dérivés de réglisse connus pour leur effet anti-inflammatoire ou encore des précurseurs de vitamine C. » A l’entendre, cette formule qui a fait l’objet de tests cliniques préserverait la peau des effets des polluants à plus de 90 %.
Un laboratoire est né.
Pour pouvoir commercialiser son produit, Anne Dupouy-Camet a fondé en novembre dernier, à quelques semaines de son quarantième anniversaire, sa propre SARL, les laboratoires Biorecept, dont elle est le seul associé-gérant. Cette nouvelle aventure n’est pas sans risque. Mais outre qu’elle a l’expérience du terrain, Anne Dupouy-Camet peut s’appuyer sur ses solides connaissances des techniques de marketing, de distribution et de management dans la mesure où elle a suivi un MBA à HEC.
Ainsi a-t-elle fait faire une étude de marché par des sociétés indépendantes qui démontre que près de neuf millions de femmes sont potentiellement concernées, dont six millions de fumeuses et trois millions de personnes en cure de sevrage. Anne Dupouy-Camet a également su s’associer avec Dermscan, un laboratoire installé à Lyon, obtenu une subvention du Centre régional d’innovation et de transfert de technologies et déposé un dossier auprès de l’Agence nationale de valorisation de la recherche.
Depuis, Anne prospecte les officinaux. « Trois pharmacies parisiennes m’ont déjà référencée et les ventes sont aussi satisfaisantes que celle d’un produit cosmétique classique, assure-t-elle. Je suis actuellement en pourparlers avec des grossistes. »
La jeune chef d’entreprise espère atteindre le million d’euros de chiffre d’affaires à la fin de cette année et parvenir à la même date à l’équilibre financier, ce qui lui permettrait de récupérer les 80 000 euros investis sur ses propres deniers.
Si son produit fait mouche, Anne compte bien créer au moins un ou deux emplois, sachant qu’elle fait déjà travailler des partenaires extérieurs. Et elle esquisse un autre projet : celui de lancer une ligne de produits dermocosmétiques spécifiquement conçue pour les peaux très immatures… Mais il lui faut au préalable remporter son premier pari.
Anne en quelques chiffres
– 5 janvier 1964 : naissance à Paris.
– 1989 : doctorat en pharmacie.
– 1989/1998 : responsable du développement de produit puis chef de groupe chez Procter #amp; Gamble.
– 1998/1999 : MBA à l’Ecole des hautes études commerciales.
– 1999/2000 : responsable du marketing chez L’Oréal.
– 2000 : recherches sur les effets du tabac en association avec le Dr Naïma Zerrouk, chercheur à la faculté de pharmacie de Paris-V.
– Novembre 2003 : fonde sa SARL, les laboratoires Biorecept.
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