Le vaccin sur le banc des accusés

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Publié le 20 mai 2006
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En mars dernier, l’Etat a été condamné à verser plus de 524 000 euros à un médecin. Motif : un syndrome de Guillain-Barré (une neuropathie) survenu après une vaccination contre l’hépatite B… obligatoire pour tous les personnels soignants.

Peut-on réellement imputer la survenue du syndrome de Guillain-Barré exclusivement à la vaccination ? La réponse n’est pas simple car la cause exacte n’en est que très rarement retrouvée. Toute vaccination peut être exceptionnellement suivie d’une polyradiculonévrite de Guillain-Barré. En clair, la vaccination est, plus que la cause, le facteur déclenchant ou révélateur. Alors pourquoi cette indemnisation ? « Quand une vaccination est obligatoire, la réparation est tacite, même sans preuve de lien de causalité », explique le Pr Christian Perronne, président du Comité technique de la vaccination.

En 1994, la recommandation de vaccination généralisée contre l’hépatite B était limitée aux enfants et préadolescents. Environ 400 000 enfants, âgés de 10 à 13 ans, ont été inoculés en l’espace de quatre semaines sur l’ensemble du territoire. Mais une vaccination très large des adultes a été faite, en dehors des recommandations officielles et non justifiée sur le plan épidémiologique. Selon certains, ce dérapage aurait été favorisé par la pression de l’industrie pharmaceutique sur les médecins. En quelques années, 30 millions de Français ont consciencieusement reçu leurs trois injections accompagnées d’un rappel. Du coup, statistiquement, il était évident que l’on observe des simultanéités entre la vaccination et l’apparition d’une poussée de sclérose en plaques. « Nous pouvons élargir la réflexion à tous les vaccins et aux maladies auto-immunes. Le vaccin n’est pas la cause de la maladie. De façon exceptionnelle, il peut être le facteur déclenchant d’une poussée comme n’importe quel autre stimulus », réaffirme Christian Perronne. Les recommandations vaccinales anti-hépatite B ont été confirmées en 2004 : la vaccination est recommandée pour tous les enfants avant l’âge de 13 ans, en privilégiant la vaccination du nourrisson.

Chaque pays a sa bête noire. Si l’histoire de la campagne contre l’hépatite B est une exception française, la Grande-Bretagne a dû essuyer une psychose autour du vaccin contre les oreillons, accusé de provoquer un autisme. Encore une fois, la campagne a buté sur une coïncidence fâcheuse entre l’augmentation des cas d’autisme et la date de l’introduction du vaccin ROR. En 2001-2002, les comités d’experts, indépendamment constitués en Angleterre, aux Etats-Unis ou à l’OMS pour évaluer l’ensemble des données disponibles, ont tous conclu qu’il y avait suffisamment de données disponibles pour rejeter l’hypothèse d’une association causale entre vaccination contre la rougeole et autisme.

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Attention aux sérums de contre-vérités !

Hépatite B en France, ROR en Grande-Bretagne : les ligues anti-vaccin trouvent leur compte dès qu’une campagne est mal orchestrée. Et en profitent pour agiter des peurs, en marge de tout fondement scientifique, même si, c’est incontestable, les craintes des personnes sont sincères et à prendre au sérieux.

La Ligue nationale pour la liberté des vaccinations ne date pas d’hier. Fondé en 1954, ce mouvement de résistants aux vaccinations publie un bulletin d’informations baptisé Réalités vaccinations. Son contenu est pour le moins gratiné. Cette ligue n’est pas la seule. En France, l’association Liberté Information Santé agit aussi « pour une information indépendante sur les vaccinations et la suppression des obligations vaccinales ».

Aux Etats-Unis, les lobbies anti-vaccin sont plus puissants. Le National Vaccine Information Center n’hésite pas à proposer sur son site des récits catastrophiques d’enfants et même une évaluation du taux de mercure reçu par le biais des vaccins. Beaucoup d’agitation autour des informations proposées en ligne, mais peu de caution scientifique.