Apo Gé !

Réservé aux abonnés
Publié le 30 juin 2007
Mettre en favori

Malgré des baisses de prix importantes, la croissance du marché du générique (+ 11 % en volume) est restée très supérieure à celle du marché remboursable (+ 0,7 %). Conséquence : 2006 a été exceptionnelle en termes d’économies pour la collectivité.

Fin décembre 2006, le taux de substitution moyen national au sein du Répertoire a atteint 70,5 %, dépassant légèrement l’objectif conventionnel. Un chiffre atteint grâce à la mesure « générique contre tiers payant ».

Avec environ 470 millions de boîtes vendues en 2006, pour un CA de 1,68 MdEuro(s), le générique représente désormais 18 % des unités et 9 % de la valeur du marché du médicament remboursable total. Malgré une baisse de prix générale de 15 % qui a directement pénalisé génériqueurs et officinaux, l’évolution du marché est restée très favorable. Son taux de croissance est de 17 % en valeur. Sans ces baisses de prix, il serait monté de 25 ou 30 % ! 2006 a tout de même été exceptionnelle en termes d’économies pour la collectivité, estimées entre 750 MEuro(s) et 1 MdEuro(s).

Sur la période de 2003 à 2006, les chiffres parlent d’eux-mêmes : le générique a connu en France la plus forte croissance de tous les pays d’Europe, avec un taux annuel moyen de + 21 %. En unités, la part des génériques a progressé d’une boîte sur douze fin 2002 à une boîte sur six fin 2006. Mais si la France devance désormais des pays comme l’Italie et l’Espagne (une boîte sur dix), elle se situe encore loin derrière l’Allemagne (une sur trois), la Grande-Bretagne ou les Pays-Bas (une sur deux).

Merci le « tiers payant contre générique » !

Certes, avec une consommation moyenne de huit boîtes par habitant et par an (sorties officine), environ 22 000 boîtes délivrées par pharmacie et par an, « les génériques font désormais partie de la vie courante de tous les Français, mais les possibilités de croissance restent immenses ! », estime Hubert Olivier, P-DG de Ratiopharm.

Depuis 2003, c’est plus de 50 molécules nouvelles qui sont venues enrichir le Répertoire. Le profil des médicaments y entrant change. Il y a quatre ans, il s’agissait surtout de produits à rotation élevée et PFHT faible. Depuis deux ans, ce sont des spécialités à prix plus élevé mais à plus faible volume.

En 2006, la croissance a été soutenue par la tombée dans le domaine public de nombreuses spécialités au potentiel important (au premier rang la pravastatine) et par la dynamique de substitution entretenue par l’objectif national de 70 % fixé en début d’année entre les syndicats de pharmaciens et l’Assurance maladie. Fin décembre 2006, le taux de substitution moyen national au sein du Répertoire a atteint 70,5 %, dépassant légèrement l’objectif conventionnel. Ce succès remporté in extremis n’aurait pu être atteint sans l’aide de la mesure « tiers payant contre générique » qui a permis de réaliser en quelques semaines des progressions spectaculaires dans les départements les plus retardataires.

La « feuille de route » des pharmaciens pour 2007, avec un objectif national à 75 %, revient à faire progresser le taux de substitution de 8 points (compte tenu de l’élargissement du périmètre du répertoire en cours d’année), contre 10 en 2006. « L’objectif d’atteindre une part de marché de 10 % en 2007 est tout à fait réaliste », assure Pascal Brière, président de Biogaran et du Gemme, pour qui la croissance devrait encore être de 10 à 15 %, en dehors de toute nouvelle baisse de prix. Ceci compte tenu de l’arrivée à échéance à compter du second semestre des principales grosses molécules de l’année (amlodipine en août, lansoprazole en décembre).

Publicité

Un potentiel de 700 MEuro(s) en 2007

Le rythme des lancements en 2008 ne devrait pas faiblir, avec les entrées en lice d’autres ténors telles la venlafaxine et la fluvastatine. Les prochaines échéances brevetaires devraient peser 1,25 MdEuro(s) supplémentaire d’ici à 2010. « Le potentiel des nouvelles molécules est de 700 MEuro(s) pour 2007, ce qui laisse présager, avec une montée rapide en taux de substitution à 70 %, une économie de 250 MEuro(s) pour l’assurance maladie », calcule Anne Baille, présidente de Ranbaxy.

D’autres vecteurs de croissance pour l’officine se profilent à l’horizon d’ici à deux ans, comme les biosimilaires (médicaments biologiques similaires) qui constituent un axe de développement prometteur (voir ci-contre). Même s’ils ne seraont pas substituables.

Avec ce potentiel en ligne de mire et les caractéristiques alléchantes du marché, il serait absurde pour les pharmaciens ne pas poursuivre leur effort. Hubert Olivier invite d’ailleurs chaque officinal à identifier quels sont les marchés les plus rentables pour les développer en priorité. De ce point de vue, les génériques arrivent largement en tête (taux de marge moyen de 52,60 % en 2006), devant le médicament familial (35,64 %), la para (32,98 %) et les princeps (seulement 22,35 %). Et en 2007, même avec un taux de remises arrière plafonné à 15 % (contre 20 % en 2006), le générique reste intéressant pour le pharmacien en termes de marge et de rentabilité. Compte tenu que sa marge a baissé en valeur en 2006, ce n’est donc pas le moment pour lui de baisser la garde sur la substitution !

Quelles marges arrière demain ?

ette année se profile la révision de la loi Dutreil sur les coopérations commerciales. De l’avis des laboratoires de génériques et des syndicats professionnels, il faut que les dispositions en matière de coopération commerciale ménagent le nécessaire intéressement du pharmacien – qui reste le pivot du développement du marché – à la délivrance des génériques. Les rappels à l’ordre incessants de la DGCCRF sur la répercussion de l’abandon de marge grossiste sur le prix public des médicaments, risquent d’avoir des effets contre-productifs sur la substitution et donc très déstabilisants pour le marché. Même si la DGCCRF est juridiquement dans son droit, les syndicats souhaitent le maintien de cet avantage justifié à leurs yeux, et, concernant l’action du nouveau gouvernement, la continuité de la politique menée jusqu’ici avec l’ensemble des acteurs : responsabilisante et incitative.

Le Gemme mesure aussi les progrès réalisés dans les relations avec l’administration. « Le dispositif législatif est aujourd’hui parfaitement normé pour le générique, les délais d’instruction des dossiers de mise sur le marché se sont considérablement raccourcis, tandis que la politique du générique mise en place avec le Comité économique des produits de santé est incitative plutôt que restrictive, avec le non-recours au TFR généralisé », fait remarquer Pascal Brière.

Avec approximativement 470 millions de boîtes vendues en 2006, le médicament générique représente désormais 18 % des unités et 9 % de la valeur du marché du médicament remboursable total.

Cependant, une politique de plus grande responsabilisation des patients (favorisant la demande active et non plus l’acceptation passive du générique) et des médecins (davantage disposés à prescrire dans le Répertoire) est plus que jamais requise. Le changement de comportement du patient reste un défi majeur, même si en sept années de substitution, sa perception du générique a bien évolué.

Selon un récent sondage réalisé pour l’Assurance maladie, le dossier médical personnel et le générique sont perçus par les assurés sociaux comme les deux principales sources d’économies pour l’assurance maladie. Mais au-delà de l’argument économique qui fait appel à la fibre citoyenne de chaque Français, il faut à l’avenir travailler une autre forme de compréhension du générique pour qu’il soit adopté comme une norme sociale. « Les patients ont compris l’aspect citoyen du médicament générique mais ils ont encore en tête des questions concernant sa qualité et sa sécurité qu’ils ne se posent pas pour les autres médicaments », s’étonne Anne Baille. Face à cette crise de confiance, elle suggère d’engager un travail pédagogique sur la propriété intellectuelle des marques et la contrefaçon. « Il faut lutter contre les amalgames et clarifier auprès des patients consommateurs la différence entre un vrai et un faux générique. »

Les trois laboratoires leaders concentrent près de 62 % du marché du générique.

« Bien implanter les nouvelles molécules »

Dans un futur que syndicats et laboratoires de génériques espèrent le plus proche possible, les économies issues des ventes de génériques se trouveront aussi chez les médecins qui devront jouer à plein le jeu de la prescription dans le Répertoire, que ce soit sous nom de marque ou en DC.

« Dans les années à venir, il sera également nécessaire de trouver un équilibre entre médicaments princeps et médicaments génériques, aspire le président du Gemme. L’essor de ces derniers ne peut plus être considéré comme un frein au développement des produits innovants. » Comment ? Selon l’association des génériqueurs, en consacrant une part des économies générées par le recours croissant aux génériques au développement d’une politique de l’innovation dynamique. Ceci afin de rémunérer de façon adaptée les produits apportant un réel avantage thérapeutique. « Il ne faut pas voir le générique uniquement comme une source d’économies pour la collectivité, poursuit Anne Baille. Il dégage aussi des ressources que l’on peut réinvestir dans la santé. » Quant au problème de la prescription en DC, il se réglera selon elle avec le temps, au fur et à mesure que les logiciels de prescription s’imposeront.

Malgré une baisse de prix générale de 15 % qui a pénalisé les génériqueurs et les officinaux, l’évolution du marché du générique reste stable à + 17 % en valeur.

La période 2007-2010 devrait donc consacrer une nouvelle étape dans le développement des génériques, qui devra reposer sur la totalité des acteurs du marché. « Les efforts importants demandés aux pharmaciens, et qui ont permis le premier essor des génériques, ne pourront pas être infinis, le maximum de substitution au sein du Répertoire ayant été estimé à 80 % », considère le Gemme. C’est pourquoi Anne Baille appelle les pharmaciens à consacrer leurs efforts avec discernement : « Il est préférable de bien implanter les nouvelles molécules que de chercher à progresser de un point sur l’oméprazole. »

Elargir le Répertoire : un enjeu

Parce que le taux de substitution ne peut pas grimper indéfiniment et qu’il est illusoire d’augmenter toujours plus l’objectif (en pourcentage) des pharmaciens, le Gemme plaide pour une politique d’extension du périmètre de la substitution à de nombreuses spécialités dites « quasi génériques » qui échappent à la définition même du générique, telles que les sprays antiasthmatiques, les patchs ou encore certaines spécialités « essentiellement similaires ».

Ainsi, comme c’est déjà le cas dans certains pays d’Europe, de nombreux produits supplémentaires pourraient être éligibles à la substitution dans les années futures. « L’intégration de ces produits permettrait d’augmenter d’un tiers voire de la moitié la taille du Répertoire », conclut Pascal Brière.

+ 17 %

En 2006, le marché du générique pesait 1,68 milliard d’euros (+ 17 % par rapport à 2005), correspondant à 470 millions de boîtes vendues (+ 11 %).

Le boom attendu des biosimilaires

Plusieurs génériqueurs ont fait le pari des médicaments biosimilaires. Sandoz est le premier à s’illustrer en commercialisant tout récemment Omnitrope, la première hormone de croissance biosimilaire. 20 % moins chère que la spécialité de référence (Genotonorm), elle pourrait, selon le laboratoire, générer une économie de 30 millions d’euros pour la collectivité. De son côté, Ratiopharm a déposé au début de cette année sa première demande d’AMM biosimilaire pour le G-CSF (« Granulocyte-colony stimulating factor ») auprès de l’Agence européenne du médicament. Rien que sur ce produit, le potentiel de marché en France est de 400 millions d’euros dont 180 millions uniquement pour le circuit « ville ».

Un génériqueur racheté chaque année

Au niveau des acteurs du marché du générique, le paysage industriel se transforme depuis trois ans sous l’emprise des restructurations et de la mondialisation. Après les absorptions/disparitions de G GAM/Hexal en 2005, puis d’Ivax en 2006, tous les regards sont maintenant rivés sur Merck Generics qui a été racheté au printemps dernier par l’Américain Mylan pour la bagatelle de 4,9 milliards d’euros. Sa filiale française, Merck Génériques, est actuellement le leader du générique en France.

TOP

La campagne TV Biogaran, au-delà de la mise en avant de la marque, participe à la promotion du générique auprès du grand public. Autre bon point attribué au laboratoire, son « kit pilule », perçu comme une aide efficace et utile pour promouvoir les pilules génériques non remboursées.

Des pharmaciens s’étonnent que les commandes passées par Internet, via Direct Médica, soient rapidement traitées et livrées quand elles concernent les produits de Merck Génériques et, au contraire, d’une grande lenteur quand il s’agit de Winthrop.

FLOP

D’une manière générale, on constate un essoufflement des génériqueurs à apporter au pharmacien des aides à la substitution. La baisse des prix les aurait-elle contraints à faire d’autres choix ?

La disparition de G GAM laisse des regrets à certains confrères qui appréciaient la gamme conseil Hexal et d’autres services qu’ils ne retrouvent pas chez Sandoz.