Dix propositions qui défrisent

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Publié le 4 février 2017
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Audacieuses, et provocantes pour certaines, les «   dix propositions pour la pharmacie   » d’un collectif d’officinaux sont nées d’échanges sur Twitter. HygieSuperBowl s’explique au nom du collectif.

Des pharmaciens actifs sur le réseau social Twitter font parler d’eux depuis l’automne dernier avec dix propositions pour la pharmacie, dont certaines sont décapantes. Ce groupe de cinquante pharmaciens rassemble essentiellement des officinaux, titulaires et adjoints, mais aussi des étudiants en pharmacie et quelques confrères travaillant dans l’industrie pharmaceutique.

Comment sont nées vos propositions ?

Après notre mobilisation cet été contre le projet de l’Ordre d’introduire une clause de conscience dans le code de déontologie pour les pharmaciens, projet qui nous a paru dangereux pour les patientes et patients. Notre groupe échangeait de manière informelle sur nos souhaits pour le futur de notre métier. Nous voulions aller au-delà des actions syndicales, des URPS ou de l’Ordre, et proposer du concret pour les patients. Nous avons eu l’idée de lancer une consultation des confrères actifs sur le réseau Twitter pour récolter les propositions de chacun. J’en ai gardé dix parmi celles qui revenaient le plus souvent. La rédaction du texte a ensuite été collégiale et il a été proposé à la signature des membres du collectif.

Parmi ces propositions, quelles sont les plus audacieuses ?

Le droit de prescription de certains médicaments dans des situations très cadrées : infection urinaire simple, pilule contraceptive, certains traitements de prévention du paludisme. Ce serait sur la base d’un protocole à établir, une démarche novatrice en France. Cela nécessite un changement complet de perception du rôle du pharmacien. La rémunération du refus de vente est également une rupture de perspective. Elle reconnaît que l’acte pharmaceutique n’est pas de vendre une boîte, mais d’analyser une prescription et d’autoriser, de modifier ou de refuser la délivrance dans l’intérêt du patient. Et d’ajuster les prescriptions en informant le prescripteur. Quant au déremboursement de l’homéopathie, une des pistes pour rémunérer ces actions, il doit être anticipé pour ne pas déstabiliser le principal laboratoire français concerné. Cette solution permet de conserver un placebo pur pour ceux qui le souhaitent. Enfin, la validation pharmaceutique de chaque acte signé par la carte de professionnel de santé nominative suppose de repenser l’organisation de la dispensation avec les préparateurs et l’embauche de pharmaciens en sus.

Quel accueil vos propositions ont-elles reçu ?

Un très bon accueil dans la profession, notamment chez les jeunes pharmaciens. Le public y voit une évolution dans l’intérêt du patient. Quelques rares médecins ont approuvé. Mais, sans surprise, elle en a heurté certains par réflexe corporatiste, balayant les expériences positives à l’étranger, au nom de la protection de leurs intérêts particuliers. Beaucoup se sont insurgés contre la prescription par le pharmacien. La substitution de médicaments interchangeables au sein d’une même classe thérapeutique ou celle des biosimilaires inquiète. La vaccination ne fait toujours pas consensus. Le dialogue semble difficile lorsqu’un médecin s’interroge sur les critères « commerciaux ou scientifiques » qui prévaudraient à la substitution au sein d’une même classe pharmacologique.

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Retrouvez les «   dix propositions pour la pharmacie   » sur le blog La coupe d’Hygie en accédant par bit.ly/2kFhZeO

LES DIX PROPOSITIONS POUR LA PHARMACIE

1. Inciter l’opinion, l’intervention et le refus
2.  Substituer les me-too, les biosimilaires et un médicament en cas de rupture d’approvisionnement
3. Dérembourser l’homéopathie
4.Rendre la pilule et d’autres médicaments essentiels accessibles sans ordonnance
5.Ajuster une ordonnance
6.Renouveler et prolonger les ordonnances
7. Demander et interpréter des tests de laboratoire
8.  Autoriser la vaccination par le pharmacien et l’enseignement de l’administration des médicaments
9. Réformer les études avec moins de chimie et plus de soins pharmaceutiques
10.  Validation pharmaceutique obligatoire et signée par la carte professionnelle de santé sans délégation