Le marché prend une bouffée d’oxygène

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Publié le 1 octobre 2019
Par Peggy Cardin-Changizi
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La naturalité est une tendance de fond dans tous les domaines (alimentation, cosmétiques, produits d’entretien…) et le rayon ORL est particulièrement concerné. L’occasion pour le pharmacien de jouer pleinement son rôle de conseil, puisque,30 % seulement des patients a une marque en tête en entrant dans le point de vente.

L’hiver arrive avec son lot de pathologies saisonnières : rhumes, états grippaux, toux et autres maux de gorge. Pour une large majorité des Français, le premier réflexe est de se rendre à l’officine, afin de se faire conseiller un produit adapté. Sur cette période, le recours à l’automédication est davantage pratiqué : 79 % des Français y ont recours en hiver, contre respectivement 40 % et 49 % pendant le printemps et l’été, rapporte un sondage Harris Interactive pour l’Afipa, portant sur l’année 2018. Les consommateurs l’utilisent en premier lieu pour soigner le rhume et l’état grippal (51 %), puis les maux de tête (46 %) et enfin les maux de gorge (41 %). Il n’est donc pas étonnant de trouver une fois de plus le secteur des voies respiratoires en première position du marché de l’automédication, en 2018 : il s’élève, ainsi, à 436 M d’€ (sur un marché total de 2,1 Mds d’€), mais en recul de – 9,1 %. Une tendance à la baisse pour l’OTC, que l’association explique « par une pathologie hivernale de moindre intensité en début d’année et en retard en fin d’année ». Au global, le marché de la sphère ORL (rhume/état grippal, maux de gorge, toux et hygiène nasale) en pharmacie est en baisse : – 0,8 % en valeur (à 804,3 M€) et – 1,8 % en volume (159 M d’unités vendues), selon Iqvia (en cumul annuel mobile à fin février 2019) du fait notamment du relistage de certaines molécules. En revanche, on observe une progression marquée des produits hors AMM (+ 7,1 % en cumul annuel mobile à fin mars 2019, Iqvia), notamment en phytothérapie (+ 2 % à 13 M€) et en aromathérapie (+ 10,1 % à 61 M€).

LA TOUX se met au vert.

Premier segment du marché ORL avec 233,8 M€ de C.A (+ 0,5 %), selon Iqvia en CAM à fin février 2019, le marché de la toux reste quasiment stable, malgré la baisse des produits pour toux grasse (- 3,2 %, en valeur) et ceux pour toux sèche (- 4,2 %). « Suite au listage des substances codéinées, seulement 2 substances sont encore autorisées en OTC pour la toux sèche : l’oxomémazine qui permet de calmer la toux sèche à prédominance nocturne, et la pentoxyvérine, seul antitussif d’action centrale, détaille Claire Hauseux, Chef de produit Clariver (Laboratoire Cooper), qui occupe 1,2 % de parts de marché en valeur, selon Ospharm. Notre gamme propose des produits issus de ces 2 molécules ». Le segment voit, en revanche, exploser les références pour toux mixtes (sèche et grasse), qui s’affichent à + 57,1 % en valeur, selon Iqvia ! En tête de ce groupe, la gamme Phytoxil de Sanofi qui occupe 30,1 % de parts de marché en valeur (à + 75,7 %), selon Ospharm. Les sirops avec et sans sucre prennent les deux premières places du Top 5 produits en valeur, avec respectivement 14,6 % et 15,5 % de parts de marché. « Phytoxil est une marque 100 % naturelle, assez récente mais très dynamique, affirme Julie Breard, responsable marketing de la gamme Maux d’hiver chez Sanofi. C’est la marque d’automédication la plus contributrice à la croissance en pharmacie. La naturalité – qui représente déjà 28 % en valeur sur les maux d’hiver (Iqvia, mai 2019) – est un changement fondamental en santé. Les patients recherchent dans un premier temps des solutions naturelles pour se soigner, avant de passer à d’autres options ». Derrière Phytoxil, on trouve encore deux marques “naturelles” : Aboca Grintuss avec 17,8 % de parts de marché en valeur (+ 75,2 %) et Phytosun Aroms avec 13,9 % de pdm (+ 66,1 %), selon Ospharm. « De plus en plus de pharmaciens proposent un linéaire dédié aux produits naturels incluant la sphère ORL, constate Laurent Mermet, pharmacien et directeur marketing chez Naturactive. Le conseil est essentiel ; le rôle du pharmacien est donc à valoriser ». A noter également, la belle performance des poudres, qui avec seulement 0,1 % de pdm en valeur, affichent une évolution à + 53,51 % (Ospharm). « Le vrai plus de ces produits c’est qu’ils peuvent être donnés à de jeunes enfants », précise Hélène Hermet chez Bouchara Recordati, présent sur la catégorie avec Exomuc, administrable dès 2 ans.

LE BOOM des sprays.

Pour voir une dynamique du côté des maux de gorge, il faut se tourner vers les sprays : ils représentent 25,8 % de pdm en valeur, soit une progression de + 4,9 %. Leur atout : une action localisée synonyme d’efficacité dans l’esprit des consommateurs. En tête sur la catégorie : Hexaspray des laboratoires Bouchara Recordati avec 5,5 % de pdm en valeur (+ 0,5 %), devant Colludol (Cooper) à 4 % de pdm en valeur (+ 5 %), selon Ospharm. Une performance que le laboratoire attribue notamment à un puissant dispositif publicitaire. « Hexaspray est un produit familial qui bénéficie d’une image de produit prescrit, reconnaît Hélène Hermet, responsable marketing OTC du laboratoire. Afin de toucher plus massivement le grand public et face à une concurrence accrue sur le rayon, nous avons investi pendant 3 mois (de décembre 2018 à février 2019) dans une campagne TV et digitale ». En effet, le rayon des sprays a enregistré ces dernières années de nouvelles références issues la plupart du temps, de marques déjà implantées sur le segment des voies respiratoires qui entendent bien élargir leur cible. A commencer par le leader, Hexaspray, qui a lancé en 2016 une version fruits exotiques (à partir de 6 ans), soutenue en affichage. « Nous avons adopté la logique des pastilles, qui se déclinent en plusieurs goûts pour répondre à la demande et gagner en visibilité », poursuit notre interlocutrice. Phytosun Aroms d’Omega Pharma a complété sa gamme Respiration avec un spray mal de gorge. Humex s’est positionné avec un spray mal de gorge à la Lidocaïne. Et Upsa a lancé une nouvelle marque de dispositifs médicaux baptisée “Les Elémentaires” à base de miel et extraits naturels de plantes, qui comprend notamment un spray buccal Maux de gorge préconisé dans les affections de la gorge chez l’adulte et l’enfant de plus de 12 ans.

L’HYGIÈNE nasale au beau fixe.

Autre catégorie phare du marché des voies respiratoires : l’hygiène nasale (sprays nasaux, gouttes, unidoses de sérum physiologique). Des produits que près de 8 consommateurs sur 10 vont acheter en pharmacie, rapporte une étude Arcane Research sur le sujet. Leur première attente ? Décongestionner le nez, nettement en tête devant les aspects financiers (prix de vente raisonnable et bon rapport quantité/prix) et la naturalité. Pourtant, c’est bien ce dernier critère qui a le vent en poupe sur le rayon. Première marque sur le podium avec 15,1 % de pdm en valeur (+ 7,5 %), Physiodose (Gilbert) dont le sérum physiologique unidose prend à lui tout seul 14,4 % de pdm en valeur (+ 10 %). Elle devance Prorhinel (GSK) avec 13,2 % (0 %) et Physiologica (Gifrer) avec 10,6 % (+ 15 %), selon Ospharm. « Nous avons une croissance forte à la fois sur le sérum physiologique et sur le spray d’eau de mer isotonique, observe Céline Rambaud, Responsable Marketing & Développement Produits chez Gifrer. Nous proposons aux consommateurs des produits naturels et tournés vers leurs attentes notamment en termes de développement durable : c’est la raison pour laquelle nous avons lancé un nouveau format de sérum physiologique qui utilise 25 % de plastique en moins ». Une tendance vers la naturalité que constate également Audrey Beladina, Chef de groupe marketing Categorie Respiratory chez GSK. « Les sprays d’eau de mer et ceux enrichis aux huiles essentielles se portent bien ». Profitant de cet engouement, la marque a ainsi lancé Prorhinel Extra Eucalyptus, un spray eau mer aux huiles essentielles d’eucalyptus « qui procure une sensation immédiate de soulagement » (2,6 % de pdm en valeur ; + 10,4 %, selon Ospharm) et un spray nasal décongestionnant 100 % naturel riche en Oligo éléments, pour adulte et enfant à partir de 3 ans. « Si la marque se positionne comme l’expert du nez pour toute la famille, notre ADN reste le bébé, concède Audrey Beladina . Nous réalisons aujourd’hui, 65 % de notre C.A sur le segment bébé et les jeunes mamans nous font confiance avec 65 % de notoriété ». A noter parmi les autres lancements : Clariver (Cooper) lance un spray nasal isotonique dédié à l’hygiène nasale quotidienne, Phytosun Aroms (4ème marque sur l’hygiène nasale avec 5,9 % de pdm en valeur, selon Ospharm) enrichit sa gamme “Respiration” avec un spray nasal isotonique pour nettoyer le nez et un spray nasal hypertonique pour soulager rapidement le nez bouché. Quant aux laboratoires Boiron, ils proposent désormais une version en unidose buvable de leur célèbre Coryzalia, pour prendre en charge les symptômes du rhume et des rhinites, dès 18 mois… Une cible enfant qui prend de l’importance, puisqu’une large majorité de mères recherchent avant tout des remèdes naturels, selon une Enquête de l’Institut des Mamans de décembre 2018.

804,3 M €

EN PHARMACIE ÉVOLUTION en valeur

– 0,8 %

Un recul plus modéré en valeur, signe que la sphère ORL est soutenue par des produits vendus plus chers. Source : Iqvia en CAM à fin février 2019

159 M D’UNITÉS VENDUES EN PHARMACIE

ÉVOLUTION en volume

– 1,8 %

Cette légère décroissance est liée aux nouvelles règlementations (relistage de certaines molécules, par exemple). Iqvia en CAM à fin février 2019.

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La TENDANCE

La naturalité a le vent en poupe en officine et, en particulier, sur le segment des voies respiratoires. « Les produits à base de composants naturels attirent de plus en plus d’utilisateurs à la recherche d’alternatives naturelles pour se soigner et sont un véritable relais de croissance en pharmacie, insiste Laurent Mermet, Pharmacien et directeur marketing chez Naturactive. C’est pour cela que nous proposons aux pharmaciens depuis la rentrée, un module de formation en atelier ou en e-learning dédié aux extraits de plantes et aux huiles essentielles adaptés aux pathologies hivernales. C’est aussi un segment dynamique en termes d’innovation et donc de lancements. » Dernier en date : un sirop aux essences (avec du miel, des extraits de Grindélia, Plantain et Hélichryse), conseillé comme adjuvant dans le traitement de la toux sèche et de la toux grasse.

→ NATURALITÉ. À l’image des marques présentes dans le Top 3 des références pour toux mixtes, Phytoxil, Aboca Grintuss et Phytosun Aroms, la naturalité gagne du terrain.

→ LE CONTENANT S’AMÉLIORE. Depuis l’année dernière, Boiron propose un verseur antigouttes intégré directement dans le col du flacon de ses sirops anti-toux Stodal et Stodaline (version sans sucre). Objectifs : éviter que le sirop ne coule le long du flacon, pouvoir verser plus facilement la dose en évitant, ainsi, la cristallisation pour une ouverture facilitée.

Maux de gorge

Les pastilles en recul

Sur la catégorie des maux de gorge, les pastilles et gommes ont longtemps fait office de locomotive. Aujourd’hui, elles restent toujours ultra plébiscitées par les patients (elles pèsent plus de 70 % de parts de marché en valeur et en volume, selon Ospharm), pour le choix des arômes proposés, les versions sans sucre et leur nomadisme ; mais aussi par le pharmacien qui les propose en première intention à hauteur de 56 % (selon une étude Arcane Research sur les maux de gorge).

LA CROISSANCE s’est inversée. Les pastilles et gommes reculent de – 1,08 % en volume et stagnent à + 0,49 % en valeur, en cumul annuel à fin février 2019 (source Ospharm). Soutenue par la prescription médicale, la marque Lysopaïne (Sanofi-Aventis) domine la catégorie avec 17 % de parts de marché en valeur (- 4,4 %), selon Ospharm ; ses comprimés sans sucre réalisant à eux seuls 14,1 % de pdm en valeur (- 5 %). Sur le podium, on trouve, en seconde position, une autre marque emblématique, Strepsils, de Reckitt Benckiser, avec 11,7 % de pdm en valeur (- 0,7 %) et Strepsils Lidocaïne (5,5 %). Drill de Pierre Fabre Santé prend la quatrième position avec 4,9 % de pdm en valeur (- 6,6 %). Le segment reste néanmoins dynamique et accueille de nouvelles références, comme les pastilles à sucer, jour et nuit, Clariver (Cooper), pour apaiser la gorge et procurer un meilleur confort respiratoire la nuit, ou un nouvel arôme de pastilles Drill sans sucre au “miel citron”.

→ LES SPRAYS PLÉBISCITÉS. Sur le segment des maux de gorge, les sprays affichent de belles performances (+ 4,9 %, en valeur) boostées par les leaders, comme Hexaspray (laboratoires Bouchara Recordati) ou Colludol (Cooper).

→ NOUVEAUTÉS. Phytosun Aroms enrichit sa gamme “Respiration” avec un spray nasal isotonique pour nettoyer le nez et un spray nasal hypertonique pour soulager rapidement le nez bouché.

Communication

La pharmacie plébiscitée par les marques

Très logiquement, les gros faiseurs du marché (Oscillococcinum, Lysopaïne, Strepsils, Phytosun Aroms…) communiquent en mass médias (TV, presse et digital principalement) sur la période hivernale, pour mettre en avant leurs atouts, leur efficacité et asseoir la notoriété de leur marque. Parallèlement, le point de vente reste un support plébiscité. Par exemple, Prorhinel investit dans de l’échantillonnage en pharmacie. Cooper prévoit pour sa marque naturelle, Clariver, une campagne merchandising dans les plus grosses officines pour accroître sa visibilité. Et Naturactive met à disposition des pharmaciens, des panneaux, des présentoirs et le magazine Naturactive. En complément, le web et les réseaux sociaux feront l’objet d’animations régulières.

CHIFFRES CLÉS

EN PARTENARIAT AVEC OSPHARM* ET IQVIA

LA VENTE CONSEIL

Le pharmacien intervient dans 75 % des cas dans la vente d’un produit contre les maux de gorge : 1 produit sur 2 est vendu sur conseil direct du pharmacien et 1 sur 4 sur choix du client avec conseil du pharmacien à l’appui.

Source : Arcane Research

66,7 % C’est la part de marché en valeur des solutions salines sur le segment de l’hygiène nasale. En cumul annuel à fin mars 2019, leur évolution est en hausse, tant en valeur + 7,89 % qu’en volume + 8,73 %.

Source : Ospharm.

*Ospharm Datastat comprend un panel de 5500 pharmacies. Ospharm traite et restitue l’ensemble des flux de ventes de ses adhérents en temps réel.

TOP 5* des produits

1 Oscillococcinum globule : 8,5 %

2 Lysopaïne en comprimés sans sucre : 4,3 %

3 Physiodose serum physiologique : 3,5 %

4 Actisoufre solution pour pulvérisation nasale buccale : 3,3 %

5 Vick Vaporub Pommade : 2,7 %

TOP 5 DES produits de médicaments OTC sur le segment ORL (hygiène nasale, maux de gorge, rhume et toux). Pdm en valeur, en cumul annuel mobile, à fin février 2019. Source Ospharm