« J’ai développé mon propre logiciel de gestion officinale »

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Publié le 4 septembre 2021
Par Yves Rivoal
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Antoine Prioux est souvent perçu comme un doux utopiste. Ce titulaire installé en Corrèze n’en a cure. Il défend inlassablement la territorialité, l’interprofessionnalité et l’innovation. Un credo qui l’a conduit à imaginer un LGO d’un nouveau genre.

Pour Antoine Prioux, le déclic se produit en 2017, un an après son installation à Bugeat, sur le plateau de Millevaches, en Corrèze. « Je me suis rendu compte que les logiciels de gestion officinale (LGO) permettaient de gérer des stocks et des commandes mais pas de structurer correctement l’information santé autour des patients, raconte ce titulaire de 36 ans qui coordonne depuis 2015 la société interprofessionnelle de soins ambulatoires Millesoins. Comme j’avais de plus en plus de mal à supporter que les data brokers exploitent les données de mes patients, sans leur consentement explicite, j’ai décidé de couper les ponts avec mon éditeur de LGO. » Une décision lourde de conséquences puisqu’Antoine Prioux n’arrivera pas à récupérer lesdites données de sa patientèle. Qu’à cela ne tienne, il se rapproche d’un développeur, Julien Misiak, qui a conçu en open source un LGO pour son épouse, titulaire elle aussi en rupture de ban avec son éditeur. « Notre collaboration autour d’un logiciel a débouché sur une refondation basée sur une gestion de stock prédictive et personnalisée », note Antoine Prioux.

Après trois années de preuve de concept, P4pillon prend son envol. « La particularité de notre LGO, c’est sa gestion de stock adaptée au pharmacien correspondant, confie Antoine Prioux. Il aborde les ordonnances des médecins en multiple de semaine, et non en mois. Ainsi, grâce à notre algorithme de parcours de soins pharmaceutiques, les patients chroniques sont classés en quatre groupes de couleurs différentes (bleu, vert, jaune et rouge) qui correspondent à un intervalle de temps hebdomadaire pendant lequel ils auront besoin d’une dispensation ou d’un renouvellement de traitement. »

Un parcours coloré

Le pharmacien a également la possibilité de paramétrer le plan de posologie qui va conditionner la nature et la quantité des traitements à commander. « Il déclenche sur son tableau de bord une commande pour un groupe couleur donné, ajoute Antoine Prioux. A réception, l’équipe préconditionne alors les médicaments. Les groupes couleur permettent, eux, d’identifier plus facilement les parcours de soins pharmaceutiques des patients, les ruptures de traitement et l’inobservance. »

Tous ces arguments ont convaincu Pharmaland d’intégrer le prototype P4pillon dans son propre LGO en version bêta. « Via une campagne de crowdfunding visant à indemniser le développeur, nous souhaitons maintenant que l’intégralité de notre code soit en open source. Ainsi, tous les éditeurs de LGO pourront copier nos fonctionnalités et les proposer à leurs clients, précise Antoine Prioux, qui pense déjà à l’étape d’après. Notre prochain objectif, c’est de l’inscrire dans un substrat pluriprofessionnel. Nous sommes en effet persuadés que l’exercice se fera demain au sein de collectifs et avec de nouvelles missions de santé, comme celles qui sont dévolues au pharmacien correspondant. »

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BIO Antoine Prioux

2013 Diplômé de la faculté de pharmacie de Limoges (Haute-Vienne)

2016 Primo-installation à Bugeat (Corrèze)

2019 Création de l’association P4pillon