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La listériose
Maladie d’origine alimentaire, rare mais grave chez la femme enceinte, le nouveau-né et les immunodéficients, la listériose est traitée par une antibiothérapie, d’autant plus efficace qu’elle est précoce.
La pathologie
Définition
La listériose est une maladie infectieuse causée par Listeria monocytogenes, une bactérie très répandue dans l’environnement (sol, eau, plantes, animaux). La contamination se fait essentiellement par ingestion d’aliments contenant la bactérie : en particulier certains produits laitiers (notamment les fromages au lait cru), charcuteries (rillettes, pâtés), légumes crus, viande hachée, produits de la mer, viandes ou poissons insuffisamment cuits.
En France, la listériose est une maladie à déclaration obligatoire. Elle évolue le plus souvent sous la forme de cas isolés. Lors de la survenue de cas groupés, une enquête est déclenchée afin d’identifier une éventuelle source de contamination. La mortalité globale peut atteindre 30 % des individus touchés.
Les sujets à risque
Généralement bénigne chez les adultes et les enfants en bonne santé, cette pathologie est grave chez les sujets aux défenses immunitaires diminuées – on parle de formes invasives de listériose : femmes enceintes, nouveau-nés, personnes âgées (> 65 ans), sujets immunodéprimés (cancer, patients transplantés ou atteints de maladies hépatiques, prise d’imm+unosuppresseurs dans les pathologies inflammatoires, de corticoïdes au long cours…), certaines pathologies chroniques (diabète, cirrhose…).
Les symptômes
• Chez le sujet en bonne santé. La bactérie est peu pathogène chez l’homme de moins de 65 ans ayant un système immunitaire efficace. La maladie se traduit par une gastro-entérite plus ou moins marquée (diarrhées, douleurs abdominales, parfois de la fièvre). L’évolution est généralement favorable spontanément en quelques jours.
• Chez le sujet immunodéprimé. La bactérie peut être à l’origine d’une septicémie, d’une méningite, d’une méningoencéphalite…
• Chez la femme enceinte. L’infection prend souvent la forme d’un syndrome pseudo-grippal, parfois associé à des troubles digestifs. Elle peut aussi être asymptomatique. La maladie est sans gravité pour la mère mais très grave pour l’enfant à naître : fausse couche, prématurité, voire mort in utero, infection néonatale (contamination par voie transplacentaire ou au moment de l’accouchement) prenant la forme d’une septicémie avec syndrome de détresse respiratoire, ou localisations méningées dans des formes tardives (plusieurs jours à plusieurs semaines après la naissance).
Objectif du traitement
L’antibiothérapie est indispensable dans les formes invasives de la listériose (septicémie, méningite) car, en l’absence de prise en charge adéquate, ces formes sont le plus souvent mortelles. L’antibiothérapie est d’autant plus efficace qu’elle est instaurée rapidement après l’apparition de signes cliniques, y compris chez la femme enceinte (voir « Stratégie thérapeutique »). Les décès, fréquents (20 à 30 % des cas), surviennent chez les patients les plus fragilisés (âgés, immunodéprimés, grands prématurés…) ou en cas de diagnostic tardif.
Stratégie thérapeutique
Chez le sujet en bonne santé
Un traitement symptomatique (antipyrétique, antinauséeux, antidiarrhéique, antispasmodique) améliore le confort du malade.
Dans les autres situations
Les symptômes et la gravité de la maladie imposent une prise en charge hospitalière et une antibiothérapie. Les pénicillines A (amoxicilline) sont associées à un aminoside afin d’obtenir un effet bactéricide dans les formes sévères ou septicémiques. Les schémas actuels recommandés sont les suivants :
• Pour les formes neuroméningées : amoxicilline durant 21 jours + aminoside (les 5 à 7 premiers jours seulement), ou amoxicilline + cotrimoxazole (association de deux antibactériens : sulfaméthoxazole et triméthoprime) en intraveineux durant 21 jours.
• Pour les formes néonatales : amoxicilline + aminoside pen-dant 15 jours.
• Pour la femme enceinte : devant toute fièvre inexpliquée, il faut suspecter une listériose. Un traitement antibiotique par voie orale est instauré sans attendre le résultat des hémocultures. Une fois le diagnostic confirmé, l’amoxicilline est utilisée par voie parentérale.
En cas d’allergie aux pénicillines, le choix se porte généralement sur l’association cotrimoxazole-rifampicine.
Médicaments
Amoxicilline
Mode d’action : antibiotique à large spectre de la famille des bêtalactamines ayant une bonne diffusion neuroménin-gée, en particulier par voie intraveineuse. Inhibe la synthèse de la paroi bactérienne. Administration : indifféremment par rapport aux repas pour la voie orale. Les comprimés dispersibles s’avalent avec de l’eau ou sont à disperser dans un demi-verre d’eau. La forme intramusculaire (IM) peut être administrée par voie intraveineuse (IV), à la condition de reconstituer la solution injectable en utilisant de l’eau pour préparation injectable (1 g de poudre dans 20 ml). Le solvant (alcool benzylique) ne doit être utilisé que pour une administration en intramusculaire. Précautions : adaptation de la posologie chez l’insuffisant rénal. Toute survenue de manifestation allergique impose l’arrêt du traitement. Contre-indications : allergie aux pénicillines ou aux céphalosporines.
Gentamicine
Mode d’action : antibiotique de la famille des aminosides qui agit par inhibition de la synthèse protéique bactérienne. Administration : par voie intraveineuse en perfusion. Précautions : adaptation de la posologie chez l’insuffisant rénal. Surveillance des fonctions auditive et rénale en raison des risques d’oto– et néphrotoxicité. Contre-indications : hypersensibilité aux aminosides, myasthénie sévère. En principe, pas d’utilisation au cours de la grossesse, sauf en cas de rapport bénéfice/risque favorable.
Cotrimoxazole
Mode d’action : cette association d’un sulfamide (sulfaméthoxazole) et d’une diaminopyrimidine (triméthoprime) inhibe la synthèse d’acide folique. Administration : voie intraveineuse en perfusion. Précautions : contrôle hématologique régulier. Surveillance de la kaliémie chez les patients à risque (insuffisants rénaux, sujets âgés…). Contre-indications : déficit en G6PD, atteinte sévère du parenchyme hépatique. Par mesure de précaution, pas d’utilisation au premier trimestre de la grossesse.
Rifampicine
Mode d’action : antibiotique de la famille des rifamycines. Inhibe l’ARN polymérase bactérienne. Administration : voie intraveineuse en perfusion. Précautions : surveillance régulière des fonctions hépatiques et de l’hémogramme (y compris plaquettes). Adaptation de la posologie chez l’insuffisant rénal et hépatique. Inducteur enzymatique, le rifampicine peut diminuer l’efficacité de certains médicaments. Contre-indications : porphyries, hypersensibilité à la molécule.
Prévention
Les gestes de prévention contre la listériose découlent des caractéristiques de la bactérie, de son habitat et de sa résistance (voir encadré p. 24).
Pour tous
Des règles d’hygiène classiques de conservation et de manipulation des aliments préviennent la transmission de la listériose. Ces règles sont valables pour tous.
• Se laver les mains avant et après la manipulation de tous types d’aliments.
• Laver soigneusement les fruits et les légumes crus car la bactérie vit principalement à la surface des aliments. Laver également les ustensiles de cuisine qui ont été en contact avec ces aliments.
• Nettoyer régulièrement le réfrigérateur à l’eau savonneuse, puis le désinfecter avec de l’eau javellisée (eau de Javel diluée au 1/100e).
• Conservation des aliments. Pour éviter les contaminations croisées d’un aliment à l’autre, conserver les aliments crus (viande, légumes…) séparément des aliments cuits ou prêts à consommer. S’assurer que la température du réfrigérateur est assez basse (4°C). Ne pas dépasser les dates de péremption indiquées sur les produits.
Pour les personnes à risque
Des précautions supplémentaires s’imposent chez les femmes enceintes, patients immunodéprimés, personnes âgées, patients atteints de pathologies chroniques (cirrhose hépatique, diabète…).
• Éviter certains aliments ne subissant pas de cuisson : fromages au lait cru, poissons fumés, coquillages crus, surimi, tarama… ainsi que des graines germées crues (soja, luzerne).
• Éviter certains aliments cuits. Les aliments cuits mais consom-més froids présentent un risque car ils peuvent être contaminés après leur cuisson. C’est le cas de certains produits de charcuterie : rillettes, pâtés, foie gras… De manière générale, les produits préemballés (pâté, jambon, saucisson…) présentent moins de risques d’être contaminés que ceux qui sont vendus à la coupe.
• Prendre des précautions. Recommandez aux personnes à risque de systématiquement enlever les croûtes de fromage, de cuire les aliments d’origine animale : viandes, poissons ; les steaks hachés, plus à risque, doivent être cuits « à cœur ». Expliquez qu’il faut réchauffer également à chaque fois les restes d’aliments ou de plats cuisinés avant consommation.
Vie quotidienne
Sensibiliser les personnes à risque
Toute fièvre sans autres symptômes chez une femme enceinte ou chez un immunodéprimé doit faire suspecter une listériose : une consultation médicale s’impose rapidement afin de débuter en urgence un traitement antibiotique.
Être à l’écoute des proches
Expliquer que la listériose est une maladie grave chez les sujets les plus fragilisés, chez qui elle peut entraîner des formes neuroméningées sévères, et peut être à l’origine de séquelles neurologiques. Une prise en charge précoce permet de rester encourageant face à l’évolution de la maladie.
Rassurer
Rappelez que chez le sujet « jeune » (moins de 65 ans) et sain (c’est-à-dire dont le système immunitaire est efficace), Listeria monocytogenes est peu pathogène.
Soyez rassurant vis-à-vis des femmes enceintes. Si les conséquences de l’infection peuvent être sévères chez l’enfant, là encore, une antibiothérapie précoce et bien suivie réduit considérablement les risques. Si une antibiothérapie orale est prescrite jusqu’à l’accouchement, rappelez qu’une bonne observance est primordiale.
La culture au service du diagnostic
Les signes qui orientent
Toute fièvre isolée survenant chez un patient immunodéficient fait rechercher la notion d’antécédents de diarrhées et de douleurs abdominales. Toute fièvre inexpliquée de la femme enceinte fait suspecter une listériose : l’hémoculture doit être systématique.
Chez l’adulte
• Le diagnostic repose sur l’isolement de la bactérie en culture dans un liquide biologique : sang (hémoculture) ou liquide céphalo-rachidien (LCR). Dans tous les cas, l’examen du LCR s’impose lorsque des signes neurologiques sont présents (raideur méningée, tremblements, convulsion, troubles de la conscience…) et devant toute suspicion de septicémie (fièvre élevée, signes respiratoires…).
• L’IRM (imagerie par résonance magnétique) : examen clé pour objectiver des petits abcès multiples du tronc cérébral ; caractéristiques, ils témoignent d’une atteinte de l’encéphale.
Chez le nouveau-né
Après l’accouchement, l’examen du placenta est un élément important pour diagnostiquer la maladie. Des prélèvements au niveau du méconium, du liquide gastrique et des conduits auditifs sont réalisés chez tout nouveau-né susceptible d’être contaminé. Des hémocultures et un prélèvement du LCR sont fréquemment effectués.
La vie de Listeria monocytogenes, l’agent pathogène
Listeria monocytogenes est une bactérie Gram positif, très résistante dans le milieu extérieur.
• On la retrouve dans les sols, l’eau, les végétaux, les animaux (ruminants, rongeurs, moineaux…).
• Elle peut survivre longtemps, y compris dans des conditions défavorables. Elle peut notamment se développer à basse température – donc dans les réfrigérateurs – et résister à la congélation.
Sa dissémination est donc favorisée par l’allongement de la chaîne du froid.
• Elle est détruite après une cuisson de 30 minutes à 60°C ou après 1 à 2 minutes à ébullition.
• Elle est sensible à un pH acide ; il n’y a donc pas de contamination des yaourts.
• Il existe une recrudescence des cas au printemps et à l’automne.
En savoir plus
Consulter « Les dossiers de la santé de A à Z » > « Listériose »
« Maladies infectieuses » > « Maladies à déclaration obligatoire » > « Listériose »
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